Imaginez un instant : une petite fille, cheveux courts, s’inscrit en cachette dans un club de foot réservé aux garçons, défiant les règles d’une époque où le sport était un monde d’hommes. Cette gamine, c’était Sarina Wiegman, aujourd’hui sacrée meilleure entraîneuse du monde avec le Trophée Cruyff 2025. Son parcours, mêlant détermination, stratégie et une touche d’audace, redéfinit ce que signifie être une coach de haut niveau. Comment une ancienne prof d’EPS est-elle devenue l’icône du football féminin, menant l’Angleterre à un troisième Euro consécutif ? Plongeons dans son histoire.
Une Carrière Hors Normes
Quand on parle de Sarina Wiegman, on évoque une pionnière. Née à La Haye en 1969, elle a grandi dans un pays où le football féminin peinait à exister. Dès son plus jeune âge, elle était fascinée par le ballon rond. « J’avais des posters de joueurs dans ma chambre, mais pas de modèle féminin », confie-t-elle. Ce manque ne l’a pas arrêtée. À force de persévérance, elle a brisé les barrières, jouant parmi les garçons avant de devenir, à 17 ans, internationale néerlandaise sous la direction d’un certain Dick Advocaat.
Son parcours de joueuse est déjà impressionnant : 99 sélections reconnues par la FIFA, trois buts, et une carrière de milieu défensive puis défenseuse. Mais c’est sur le banc que Wiegman a véritablement marqué l’histoire. En 2025, elle devient la première entraîneuse, hommes et femmes confondus, à atteindre cinq finales consécutives de tournois majeurs. Un exploit qui la place au panthéon du football.
« Si je panique, je n’observe pas bien, ce qui reste mon job. »
– Sarina Wiegman
Des Rues de La Haye aux Sommets de l’Euro
Pour comprendre Wiegman, il faut remonter à ses débuts. À La Haye, elle écumait les terrains improvisés, défiant les conventions. À l’époque, les filles n’avaient pas leur place dans les clubs. Mais avec le soutien de ses parents et une ruse – s’inscrire sous couvert de son apparence androgyne – elle a intégré une équipe masculine. Cette audace précoce a forgé son caractère. « Mes parents m’ont toujours soutenue, même quand j’ai enfreint les règles », raconte-t-elle avec un sourire.
Après une carrière de joueuse, elle s’est tournée vers l’enseignement, devenant prof d’EPS. Mais le football ne l’a jamais quittée. À l’université, elle a peaufiné ses connaissances tactiques tout en jonglant avec ses responsabilités de mère et d’enseignante. Ce n’est qu’en 2006, à Ter Leede, qu’elle fait ses premiers pas comme entraîneuse. Sept ans plus tard, avec ADO La Haye, elle remporte championnats et coupes nationales, posant les bases de sa légende.
Une Méthodologie qui Change la Donne
Ce qui distingue Wiegman, c’est sa capacité à allier rigueur et humanité. À St George’s Park, le centre d’entraînement des Lionnes anglaises, elle dirige avec une précision chirurgicale. Chaque match est préparé avec une minutie obsessionnelle : visionnage des rencontres de ses joueuses en club, anticipation des scénarios, élaboration de plans B. « Le plan A ne fonctionne pas ? Pas grave, le plan B est prêt », assure une de ses anciennes joueuses.
Sa philosophie repose sur un principe clé : la confiance par l’autonomie. Elle ne cherche pas à contrôler ses joueuses, mais à leur donner un cadre où elles peuvent s’exprimer. « Les erreurs font partie du jeu. Ce qui compte, c’est comment on rebondit », explique-t-elle. Cette approche, qu’elle appelle la pratique basée sur l’expérience, encourage les joueuses à apprendre de leurs échecs sans crainte de sanction.
- Préparation minutieuse : analyse vidéo et scénarios anticipés.
- Confiance en l’équipe : un cadre clair mais flexible.
- Management humain : priorité au bien-être des joueuses.
J’ai toujours trouvé fascinant comment certains coachs, comme Wiegman, parviennent à transformer une équipe en une machine à gagner sans étouffer la créativité. C’est un équilibre rare, et elle le maîtrise à la perfection.
Un Palmarès Éblouissant
Le palmarès de Wiegman parle de lui-même. Depuis ses débuts, elle a accumulé les titres : Euro 2017 avec les Pays-Bas, Euros 2022 et 2025 avec l’Angleterre, sans oublier la Finalissima 2023 et plusieurs coupes nationales. Mais ce n’est pas seulement une question de trophées. Sous sa direction, l’Angleterre a su surmonter des défis immenses, comme des matchs à rallonge contre la Suède, l’Italie et l’Espagne lors de l’Euro 2025. Chaque fois, son calme légendaire a fait la différence.
« Je ne comprends pas comment elle fait pour ne pas montrer ses émotions. »
– Une joueuse de l’équipe d’Angleterre
Ce sang-froid, c’est sa marque de fabrique. Lors de la finale de l’Euro 2025, alors que l’Angleterre n’a mené que quatre minutes et cinquante-deux secondes dans la phase à élimination directe, Wiegman est restée imperturbable. « Si je panique, je ne peux pas observer », répète-t-elle. Et observer, c’est son superpouvoir. Elle analyse, ajuste, et gagne.
Une Pionnière au-delà du Terrain
Wiegman n’est pas seulement une entraîneuse. Elle est une figure qui inspire. Première femme à atteindre 100 capes avec les Pays-Bas en 2001, elle a ouvert la voie à une nouvelle génération de joueuses et de coachs. Son lien avec la fondation Johan Cruyff, dont elle est ambassadrice, reflète son engagement pour rendre le sport accessible à tous. « Le sport unit, il donne une chance à chaque enfant », affirme-t-elle, en écho à l’héritage de son compatriote légendaire.
Son impact va au-delà des résultats. Elle a transformé la perception du football féminin en Angleterre, un pays où la discipline était longtemps reléguée au second plan. Aujourd’hui, les Lionnes sont des stars, et Wiegman est leur architecte. Mais elle reste humble. « Je ne me rends pas encore compte de tout ça », confie-t-elle, désignant un trophée en vitrine avec un sourire gêné.
Les Défis d’une Icône
Même les légendes font face à des obstacles. Avant l’Euro 2025, Wiegman a dû gérer la mise en retrait de plusieurs cadres de l’équipe. Son franc-parler, parfois perçu comme brutal, a suscité des tensions. « Je suis Néerlandaise, je dis les choses directement », plaisante-t-elle. Mais ce style, s’il déroute, est aussi sa force. Elle traite chaque joueuse avec respect, tout en exigeant l’excellence.
Son perfectionnisme, forgé lors de ses années aux États-Unis à l’université de Caroline du Nord, où elle a côtoyé des légendes comme Mia Hamm, est un moteur. Là-bas, elle a appris la culture de la gagne, une mentalité qu’elle transmet à ses joueuses. Mais elle sait aussi que la chance joue un rôle. « Quand un penalty peut tout changer, c’est hors de notre contrôle. Mais la conviction, ça, on peut la travailler », explique-t-elle.
| Compétition | Résultat | Année |
| Euro | Vainqueur | 2017, 2022, 2025 |
| Finalissima | Vainqueur | 2023 |
| Coupe du Monde | Finaliste | 2019, 2023 |
Quel Avenir pour Wiegman ?
Sous contrat jusqu’en 2027, Wiegman regarde déjà vers la Coupe du Monde au Brésil. Mais pour la première fois, elle avoue douter. « Je ne planifie jamais trop loin, mais je me demande ce que l’avenir réserve », confie-t-elle. Certains la voient même succéder à Gareth Southgate à la tête de l’équipe masculine d’Angleterre, une idée qu’elle balaie avec modestie. Ce qui est sûr, c’est que son influence continuera de façonner le football féminin.
En repensant à son parcours, je ne peux m’empêcher d’admirer sa capacité à transformer les obstacles en opportunités. Elle incarne cette idée que le succès n’est pas une destination, mais un voyage fait de travail, de résilience et d’un peu de culot. Et vous, pensez-vous qu’elle mènera encore les Lionnes à de nouveaux sommets ?
« Le sport, c’est donner une chance à chaque enfant, peu importe d’où il vient. »
– Sarina Wiegman, ambassadrice de la fondation Johan Cruyff
En attendant, son héritage est déjà immense. De La Haye aux stades bondés de Wembley, Sarina Wiegman a prouvé que le talent et la détermination peuvent renverser toutes les barrières. Et quelque chose me dit qu’on n’a pas fini d’entendre parler d’elle.
