Imaginez : vous n’êtes plus sorti faire la fête depuis des lustres. Une copine vous envoie un lien, « Regarde ça, c’est chez nous, ça va être énorme ! » Une affiche clinquante, trente artistes orientaux, du raï, du chaâbi, des DJ qui envoient du lourd jusqu’à l’aube. Vous craquez, vous prenez trois places. Et le soir J, vous arrivez… pour découvrir une salle quasi vide et zéro star à l’horizon.
C’est exactement ce qui est arrivé à des centaines de personnes vendredi 14 novembre à Mitry-Mory, en Seine-et-Marne. Ce qui était vendu comme le rendez-vous maghrébin de l’année a tourné au cauchemar collectif. Et franchement, quand on voit l’ampleur du mensonge, on comprend pourquoi certains parlent carrément d’escroquerie pure et dure.
Une soirée promise comme historique
Tout avait pourtant bien commencé. Depuis des semaines, les réseaux débordaient de vidéos alléchantes. Des montages ultra-pro, lumières laser, foules en transe, logos qui claquent. Les publications répétaient en boucle : « Le plus grand Maghreb Party d’Europe arrive enfin près de Paris », « Une nuit inoubliable jusqu’à 4 h du matin », « Plus de 30 artistes sur scène ».
Le nom ? Layan Festival. Le lieu ? L’Élysée Mariage, une salle connue du coin pour les mariages fastueux. Prix des places : entre 30 et 50 € selon les formules, avec carré VIP et bouteilles à table pour les plus généreux. Autant dire que beaucoup ont sorti la tenue traditionnelle, les chaussures cirées, parfum coûteux. L’excitation était à son comble.
« Mes amies m’ont tannée pendant quinze jours. On s’est dit que c’était l’occasion de se faire une vraie sortie entre filles, avec de la bonne musique orientale comme on adore. J’ai payé 150 € pour nous trois sans hésiter. »
– Nadia, une des participantes flouées
19 heures : l’arrivée et le premier doute
Les premiers invités arrivent à l’heure. Parking déjà bien rempli, ça sent la grosse ambiance. Mais dès l’entrée, ça coince. Le staff semble débordé, presque improvisé. Pas de vraie file d’attente organisée, pas de bracelet VIP visible, juste deux ou trois gars qui scannent les billets sur leur téléphone perso.
Puis vient le moment de franchir les portes de la salle. Et là… silence. Une immense pièce vide, quelques tables mal disposées, une sono qui grésille à peine. Aucun décor, aucune lumière spectaculaire, aucune scène digne de ce nom. Les gens se regardent, un peu gênés. « C’est normal, ils vont tout installer plus tard », se rassure-t-on.
21 heures : la vérité éclate
Les minutes passent, puis les heures passent. Toujours rien. Pas de DJ connu, pas de chanteur qui pointe le bout de son micro. Vers 21 h 30, un animateur monte sur scène – une petite estrade brinquebalante – et annonce que « certains artistes ont eu des contretemps ». La salle commence à gronder.
Puis plus rien. Plus d’annonce, plus de musique digne de ce nom. Les gens commencent à comprendre : personne ne viendra. Les noms affichés partout – des pointures du raï et de la musique orientale – ne foutront jamais les pieds ici ce soir.
- Aucun des 30 artistes annoncés n’est présent
- La sono tourne en boucle sur une playlist Spotify basique
- Les bouteilles « incluses » dans les formules VIP n’arrivent jamais
- Le personnel disparaît progressivement dans la soirée
À partir de minuit, c’est la débandade. Certains restent par espoir, d’autres exigent des explications. Mais les organisateurs ? Introuvables. Téléphones coupés, messages Instagram supprimés en direct. La totale.
Une arnaque savamment orchestrée ?
Ce qui choque le plus, c’est le niveau de préparation en amont. Les affiches étaient magnifiques, les teasers vidéos dignes de vrais professionnels. Des faux comptes d’artistes relayés, des stories bidons où on dirait que tout était calculé pour faire croire à un événement gigantesque.
J’ai moi-même vu circuler des « confirmations » d’artistes qui n’ont jamais existé. Des logos de médias partenaires inventés, des « sold out » annoncés alors qu’il restait des milliers de places. Tout sentait le fake à plein nez, mais présenté avec tellement d’assurance que beaucoup sont tombés dans le panneau.
« C’est une escroquerie, il n’y a pas d’autres mots. Ils ont pris notre argent et se sont barrés. »
Et le pire ? Certains participants disent avoir payé via des liens de paiement douteux, sans facture, sans nom d’entreprise claire. Résultat : impossible de se faire rembourser légalement pour l’instant.
Les conséquences pour les victimes
Beaucoup ont dépensé bien plus que le simple billet : essence, baby-sitter, tenue neuve, resto avant… Sans parler de la déception morale. Des gens qui avaient misé sur cette soirée pour fêter un anniversaire, un retour en France, ou tout simplement retrouver une ambiance qu’ils adorent.
Aujourd’hui, des groupes WhatsApp et Facebook se créent pour regrouper les plaignants. Certains parlent déjà de porter plainte collectivement. D’autres tentent le chargeback auprès de leur banque, mais quand c’est encore possible.
Ce qui est sûr, c’est que la confiance est rompue. Désormais, avant d’acheter un billet pour n’importe quelle soirée « événement du siècle », beaucoup vérifieront deux fois, trois fois.
Comment éviter de se faire avoir à l’avenir ?
Parce que malheureusement, ce genre d’histoire n’est pas isolé. Voici quelques réflexes simples qui sauvent :
- Vérifier que l’événement a un site officiel clair avec SIRET
- Regarder si les artistes annoncés ont partagé l’événement sur leurs propres réseaux
- Privilégier les billetteries connues (pas les liens Google Form ou Tipeee bizarres)
- Se méfier des « plus gros événement jamais vu » à prix cassés
- Lire les commentaires sous les publications (souvent les premiers à se faire avoir préviennent)
Un peu de bon sens, et beaucoup de vigilance. Parce que derrière chaque soirée ratée, il y a des gens qui ont bossé dur pour se payer ce moment de fête.
Layan Festival 2025 restera sans doute dans les mémoires… mais pas pour les raisons prévues. Une soirée qui promettait l’Orient et qui a livré la désillusion. Espérons que les responsables seront retrouvés et que les victimes obtiennent réparation. En attendant, la prochaine fois qu’on vous vend le « plus grand événement de l’année », posez-vous la question : est-ce que ça ne sent pas un peu trop le rêve vendu à la sauvette ?
Parce que la vraie fête, celle qui fait vibrer jusqu’au petit matin, elle ne se fabrique pas avec des montages vidéo et des promesses en l’air. Elle se construit avec du vrai son, de vrais artistes, et surtout… du respect pour le public.
