Vous est-il déjà arrivé de rentrer chez vous et de trouver la serrure forcée ? L’idée fait froid dans le dos. Pourtant, c’est exactement ce qu’un propriétaire de Mantes-la-Jolie a failli vivre il y a quelques jours. Heureusement, une voisine particulièrement attentive a tout changé en quelques minutes.
Quand une simple alerte change tout
Il est un peu plus de 20 heures, un jeudi soir comme les autres dans le quartier du boulevard du Maréchal-Juin. Une habitante remarque du mouvement suspect devant l’appartement inoccupé de son voisin. Des allées et venues, des bruits de coups contre la porte, puis le craquement caractéristique du bois qui cède. Ni une ni deux, elle compose le 17.
Quand les policiers du commissariat et la police municipale déboulent sur place, la scène est presque surréaliste : la porte est défoncée, et six personnes se trouvent déjà à l’intérieur, certaines installent même leurs affaires. L’intervention est immédiate. Personne n’aura le temps de passer une seule nuit dans ce logement qui ne leur appartient pas.
Qui étaient ces squatteurs ?
Parmi les six interpellés, on trouve trois femmes (15, 19 et 53 ans) et un adolescent de 15 ans, tous de nationalité roumaine et sans domicile fixe. À leurs côtés, deux hommes du quartier du Val-Fourré, âgés de 29 et 42 ans. Ces derniers auraient, selon les premiers éléments, été rémunérés pour dénicher un logement vacant et faciliter l’installation.
Le schéma est malheureusement classique : des réseaux, parfois très organisés, repèrent les appartements vides (héritages en attente, propriétaires absents, locations en transition) et proposent leurs « services » à des personnes en grande précarité. Un « service » qui peut coûter plusieurs centaines d’euros… pour squatter illégalement le domicile d’autrui.
Le signalement par les voisins reste le moyen le plus efficace pour stopper un squat avant qu’il ne s’installe durablement.
Le maire de Mantes-la-Jolie, lors d’un récent échange avec la presse locale
La vigilance, cette arme méconnue mais redoutable
Ce que cette histoire montre surtout, c’est le rôle absolument crucial du voisinage. Sans cette femme qui a pris le temps d’observer, d’écouter et d’appeler, l’appartement aurait probablement été occupé pendant des mois, voire des années. Et là, le cauchemar aurait vraiment commencé pour le propriétaire.
Car oui, même si la loi a évolué ces dernières années (expulsion en 72 heures en cas de flagrant délit, création du délit de violation de domicile renforcé), la réalité reste cruelle : dès qu’un squat dure plus de 48 heures, la procédure devient longue, coûteuse et épuisante nerveusement.
- Constat d’huissier obligatoire
- Plainte au pénal + assignation au civil
- Audiences parfois repoussées plusieurs fois
- Factures d’avocat qui s’accumulent
- Et pendant ce temps… les squatteurs restent
Franchement, quand on voit ça, on se dit que la voisine mérite une médaille.
Mantes-la-Jolie, terrain particulièrement exposé ?
La ville n’est pas épargnée par le phénomène. Le premier édile parle de « quatre ou cinq squats problématiques » actuellement sur la commune. Et il n’hésite pas à pointer du doigt l’existence de réseaux qui sillonnent les quartiers à la recherche de portes closes et de boîtes aux lettres qui débordent.
Le Val-Fourré, quartier populaire et parfois stigmatisé, revient souvent dans ce type d’affaires. Mais attention à ne pas tout mélanger : la très grande majorité des habitants y vit tranquillement et souffre, elle aussi, de ces agissements qui dégradent l’image de tout un secteur.
D’ailleurs, j’ai pu le constater personnellement lors de reportages précédents : dès qu’un squat il y a, ce sont d’abord les voisins qui trinquent. Bruit, insalubrité, sentiment d’insécurité… Personne n’y gagne.
Comment se protéger quand on laisse un logement vide ?
La question revient sans cesse dans les conversations entre propriétaires. Voici quelques pistes concrètes qui ont fait leurs preuves :
- Faire relever le courrier régulièrement (ou opter pour la garde du courrier à La Poste)
- Installer un système d’alarme visible (même factice, ça dissuade parfois)
- Demander à un voisin ou un proche de passer de temps en temps
- Mettre des volets roulants ou des rideaux pour masquer l’absence
- Signaler son absence à la police municipale (certaines villes proposent des opérations tranquillité vacances ou tranquillité absence)
- Installer une boîte aux lettres anti-publicités (ça évite l’air habité)
Petit détail qui a son importance : une lumière qui s’allume le soir grâce à une minuterie peut faire toute la différence. Les repéreurs détestent les maisons qui semblent vivantes.
Et maintenant, que vont-ils risquer ?
Les six personnes ont été placées en garde à vue pour violation de domicile et dégradation volontaire. Depuis la loi ASAP de 2020 et son renforcement en 2021, le fait d’entrer et de se maintenir dans le domicile d’autrui est puni jusqu’à 3 ans de prison et 45 000 € d’amende.
En cas de flagrant délit comme ici, l’expulsion peut être immédiate sans passer par le juge. C’est exactement ce qui s’est produit. Le propriétaire n’a même pas eu besoin de porter plainte pour récupérer son bien dans l’heure.
Reste à savoir si les deux « rabatteurs » locaux seront davantage poursuivis. Car c’est bien là que le bât blesse : tant que l’organisation en amont ne sera pas démantelée, le phénomène continuera.
Un phénomène national qui ne faiblit pas
Ce qui s’est passé à Mantes-la-Jolie n’a rien d’exceptionnel. Partout en France, les signalements de squats explosent depuis quelques années. Entre les héritages bloqués, les locations Airbnb en attente, les résidences secondaires et les déménagements, le parc de logements temporairement vides est considérable.
Et quand la précarité explose, certains n’hésitent plus à franchir la ligne. Ce n’est pas une justification, juste une triste réalité. Mais ce qui me frappe le plus, c’est la professionnalisation croissante de certains réseaux. On est loin du squat idéologique des années 80-90. Aujourd’hui, c’est devenu un business.
Alors oui, cette voisine de Mantes-la-Jolie a permis d’éviter le pire à un propriétaire. Mais son geste nous rappelle aussi à tous une chose simple : dans nos immeubles, nos rues, nos quartiers, la sécurité commence souvent par un regard, une oreille tendue, un coup de téléphone.
Parce qu’au final, ce n’est pas seulement une question de lois ou de police. C’est avant tout une question de solidarité de proximité. Et ça, aucune réforme ne pourra jamais le remplacer.
Alors la prochaine fois que vous croiserez un voisin qui semble un peu trop attentif… remerciez-le. Il est peut-être en train de protéger votre porte.
