Vous prenez une bouteille d’eau fraîche au bureau, dans le train ou après le sport sans même y penser. Demain, ce petit geste anodin pourrait vous coûter nettement plus cher. Et non, ce n’est pas une rumeur : l’Assemblée nationale a bel et bien décidé de voter une mesure qui fait passer la TVA sur les bouteilles d’eau et boissons non alcoolisées en plastique de 5,5 % à 20 %. Autrement dit, on parle d’une hausse de près de 15 % en un claquement de doigts.
Je ne sais pas vous, mais moi, quand je vois ce genre de décision prise en catimini au milieu du brouhaha budgétaire, ça me fait grincer des dents. On nous parle d’écologie, de responsabilité, de transition… mais au final, c’est encore le consommateur lambda qui sort le portefeuille. Allez, on décortique tout ça calmement, parce que l’histoire est plus tordue qu’elle n’y paraît.
Une mesure qui arrive par la petite porte
Tout commence avec une ambition louable : faire payer plus cher le plastique pour pousser industriels et consommateurs à changer leurs habitudes. Le gouvernement voulait initialement créer une vraie taxe sur les emballages plastiques à usage unique, directement ciblée sur les entreprises qui mettent ces produits sur le marché. L’idée ? Plus ton emballage est pourri pour la planète, plus tu payes cher. Logique sur le papier.
Mais voilà, l’opposition de droite et d’extrême droite a purement et simplement supprimé cette disposition. Leur argument massue : « ça va se répercuter sur les collectivités et finalement sur le contribuable ». Traduction : personne ne veut être celui qui fait grimper la facture.
Le lendemain – comme par magie – un nouvel amendement tombe, porté cette fois par la majorité. Et là, surprise : au lieu de taxer les industriels, on augmente directement la TVA payée par… vous et moi au supermarché. Plus élégant, non ?
Concrètement, combien ça va nous coûter ?
Allons droit au but avec des chiffres simples :
- Une bouteille d’Évian ou Cristaline à 0,60 € → 0,68 €
- Un pack de 6 x 1,5 L à 2,70 € → environ 3,05 €
- Une canette de soda en plastique à 1 € → 1,13 €
- Un pack de 24 petites bouteilles pour les lunch-box des enfants → +3 à 4 € d’un coup
Certes, 8 centimes sur une bouteille, ça semble dérisoire. Mais quand on sait que la consommation moyenne d’eau en bouteille en France dépasse les 140 litres par personne et par an, ça commence à faire une somme. Et je ne parle même pas des sodas, thés glacés ou eaux aromatisées.
« Ce sont toujours les mêmes qui trinquent : les familles modestes qui n’ont pas le choix que d’acheter des packs au hard-discount. »
– Un député d’opposition, lors des débats
L’argument écologique : vrai ou alibi ?
Officiellement, l’objectif est de décourager l’usage du plastique à usage unique. Et force est de constater que la France est très, très en retard. On recycle à peine 26 % de nos déchets plastiques – on est quasi lanterne rouge en Europe. Résultat : on débourse chaque année plus d’un milliard et demi d’euros d’amendes à Bruxelles. Autant d’argent qui pourrait financer des écoles ou des hôpitaux.
Augmenter le prix, c’est donc censé faire basculer les comportements. Un peu comme la taxe sur le tabac ou l’alcool. Sauf que… l’eau, ce n’est pas du tabac. On ne peut pas s’en passer. Et contrairement au verre ou à la gourde, le plastique reste souvent la solution la plus pratique (et parfois la seule) dans certains contextes : festivals, chantiers, zones sans point d’eau potable, etc.
Du coup, est-ce que les gens vont vraiment se mettre à l’eau du robinet ou aux gourdes ? Pas si sûr. Beaucoup risquent simplement de… de payer plus cher.
Qui consomme vraiment de l’eau en bouteille ?
On entend souvent que « c’est un produit de bobo ». La réalité est plus nuancée. Oui, les catégories socioprofessionnelles supérieures en achètent régulièrement. Mais les chiffres montrent aussi que les employés et les ouvriers en consomment autant, voire plus, souvent par manque de confiance dans l’eau du robinet ou par praticité.
Dans certains quartiers ou certaines régions, l’eau du robinet a un goût de chlore prononcé ou traîne une réputation (parfois justifiée) de mauvaise qualité. Résultat : même les ménages modestes se rabattent sur la bouteille. Et ce sont eux qui vont morfler le plus avec cette hausse.
Petit rappel qui fait mal : l’eau en bouteille coûte en moyenne 130 fois plus cher que l’eau du robinet. Avec la nouvelle TVA, on va frôler les 150 fois. Cher payé pour un produit dont 90 % du coût est… l’emballage et le transport.
Les alternatives existent-elles vraiment ?
On va me dire : « passez à la gourde ou au verre consignée ». Plus facile à dire qu’à faire pour tout le monde.
- Les gourdes en inox ou en verre sont chères à l’achat (20–50 € pièce)
- Il faut penser à les remplir, les laver, les transporter
- En entreprise, dans les transports ou à l’école, ce n’est pas toujours pratique
- Le verre consigné reste ultra-marginal en grande distribution
- Les fontaines d’eau potable publiques sont encore trop rares
Bref, pour beaucoup de Français, la bouteille en plastique reste la solution par défaut. Taxer ce produit sans proposer d’alternative massive et accessible, c’est un peu comme taxer l’essence sans développer les transports en commun.
Et les industriels dans tout ça ?
C’est peut-être le plus rageant. Initialement, la taxe devait frapper les entreprises qui produisent ou importent des emballages non recyclables. Elles auraient été incitées à investir dans le réemploi ou le plastique recyclé. Mais cette version a été enterrée par le Parlement.
À la place, on fait payer le consommateur final. Résultat : les grands groupes continuent tranquillement à produire des milliards de bouteilles en plastique vierge, pendant qu’on culpabilise le citoyen qui fait ses courses.
Certaines associations parlent ouvertement de victoire du lobbying. Et franchement, quand on voit à quelle vitesse l’amendement alternatif est tombé le lendemain du rejet de la taxe initiale… on peut se pose des questions.
Que va-t-il se passer maintenant ?
La mesure doit encore passer au Sénat. L’an dernier, une disposition similaire avait été votée par les sénateurs avant de disparaître mystérieusement en commission mixte paritaire. Tout est donc encore possible.
Si elle passe définitivement, elle entrera probablement en vigueur dès 2026. Les professionnels anticipent déjà une baisse des ventes de 10 à 20 % sur les formats plastique, avec un report possible vers… les briques carton (elles aussi très discutables écologiquement) ou les canettes aluminium (recyclables mais très énergivores à produire).
Quant à l’argent récolté (estimé entre 150 et 300 millions d’euros par an), il ira dans les caisses de l’État. On nous promet qu’il servira à financer la transition écologique. On a vu ça quelque part, non ?
Mon avis (parce qu’on est entre nous)
Je suis pour une vraie politique ambitieuse contre le plastique à usage unique. Vraiment. Mais là, on a l’impression d’une mesure punitive qui frappe au mauvais endroit. Taxer le consommateur au lieu du pollueur, c’est comme verbaliser le piéton parce que la ville n’a pas mis de passages cloutés.
Si on veut que les Français changent, il faut :
- Développer massivement les fontaines à eau dans les lieux publics
- Subventionner les gourdes et carafes filtrantes pour les ménages modestes
- Imposer enfin le réemploi (comme en Allemagne avec les bouteilles consignées)
- Et surtout, faire payer les industriels qui produisent 35 % d’emballages non recyclables
Sans ça, cette taxe ressemblera juste à une nouvelle manière de boucher les trous du budget sur le dos des citoyens. Et ça, franchement, c’est un peu facile.
Et vous, vous en pensez quoi ? Vous allez continuer à acheter des bouteilles ou passer à autre chose ? Dites-moi tout en commentaire, je suis curieux de savoir comment vous allez réagir à cette petite révolution du rayon boissons.
(Article mis à jour au 21 novembre 2025 – la mesure est toujours en navette parlementaire)
