Imaginez-vous dans une salle feutrée du Quai d’Orsay, là où les décisions qui façonnent le monde se murmurent entre diplomates. Ce vendredi après-midi, Paris devient le théâtre d’une rencontre discrète mais cruciale. Les chefs de la diplomatie française, saoudienne, jordanienne et égyptienne se réunissent pour poser les jalons d’une conférence internationale prévue en juin à New York. Leur ambition ? Relancer une idée qui, bien que souvent évoquée, reste un défi de taille : la solution à deux États pour résoudre le conflit israélo-palestinien. Mais dans un contexte géopolitique aussi tendu, quelles sont les chances de succès ?
J’ai toujours trouvé fascinant comment des réunions comme celle-ci, loin des projecteurs, peuvent dessiner les contours de l’avenir. Cette rencontre n’aura pas de conférence de presse, pas de déclarations tonitruantes. Pourtant, elle pourrait marquer un tournant. Pourquoi ? Parce que la France, en tandem avec l’Arabie saoudite, veut insuffler une nouvelle dynamique à un processus de paix enlisé depuis trop longtemps.
Un Pari Audacieux pour la Paix
La conférence prévue du 17 au 20 juin à New York n’est pas une simple réunion de plus. Coprésidée par la France et l’Arabie saoudite, elle ambitionne de remettre la solution à deux États au cœur des discussions internationales. Ce concept, qui prône la coexistence d’un État palestinien et d’un État israélien dans des frontières claires, est un leitmotiv de la diplomatie mondiale depuis des décennies. Mais entre les mots et les actes, le fossé reste immense.
Ce qui rend cette initiative intrigante, c’est l’implication de poids lourds régionaux comme l’Arabie saoudite, la Jordanie et l’Égypte. Ces pays, chacun avec son influence et ses priorités, partagent un objectif commun : stabiliser une région minée par des tensions historiques. La réunion de Paris, bien que technique, est un prélude essentiel pour aligner les positions avant le grand rendez-vous de juin.
La paix ne se décrète pas, elle se construit par des gestes concrets et une volonté partagée.
– Observateur diplomatique
La Position de la France : Un Engagement Fort
La France ne cache pas ses ambitions. Elle veut jouer un rôle moteur dans ce processus. Récemment, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a réaffirmé la volonté de Paris de reconnaître un État palestinien. Une telle démarche, bien que symbolique pour certains, est lourde de sens. Elle pourrait toutefois tendre les relations avec Israël, qui voit d’un mauvais œil toute reconnaissance unilatérale de la Palestine.
Ce choix reflète une conviction française : pour avancer vers une solution à deux États, il faut un équilibre. D’un côté, les pays qui n’ont pas reconnu la Palestine doivent franchir le pas. De l’autre, ceux qui hésitent à normaliser leurs relations avec Israël doivent entamer un mouvement dans ce sens. C’est une équation complexe, mais Paris semble prêt à relever le défi.
Ce qui m’interpelle, c’est la prudence de la France dans ses déclarations. Pas question de promettre une reconnaissance immédiate d’Israël par ses voisins. On parle plutôt d’un “mouvement” vers la normalisation, une expression qui laisse place à l’interprétation. Est-ce un signe de réalisme ou une manière d’éviter les faux pas diplomatiques ?
Un Mouvement Vers la Normalisation : Quels Contours ?
Le terme “mouvement” n’est pas anodin. Selon des experts, il pourrait inclure plusieurs formes d’engagement :
- Des contacts informels, notamment avec des acteurs de la société civile israélienne favorables à la paix.
- Une reconnaissance d’Israël dans ses frontières de 1967, un point clé pour relancer le dialogue.
- Des garanties sécuritaires pour Israël et ses voisins, un préalable non négociable pour beaucoup.
Cette approche graduelle semble pragmatique. Après tout, forcer la main à des États comme l’Arabie saoudite, qui a toujours conditionné la normalisation à des avancées concrètes sur la question palestinienne, serait contre-productif. Mais la question reste : comment créer une dynamique suffisante d’ici juin ?
Le Contexte Régional : Une Équation Explosive
Le Proche-Orient est un puzzle géopolitique où chaque pièce semble incompatible avec les autres. Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché une guerre dévastatrice, les tensions sont à leur comble. L’armée israélienne poursuit ses opérations à Gaza, avec pour objectifs affichés l’élimination du Hamas et la libération des otages. Mais ce conflit, loin de s’apaiser, alimente un cycle de violence qui complique toute tentative de dialogue.
Dans ce contexte, la solution à deux États peut sembler utopique. Pourtant, elle reste la seule voie crédible pour beaucoup d’observateurs. Comme le souligne un diplomate :
Soutenir la solution à deux États, c’est reconnaître le droit d’Israël à exister tout en défendant l’aspiration légitime des Palestiniens à un État.
Mais le terrain est miné. Si près de 150 pays reconnaissent l’État de Palestine, ce dernier n’a toujours pas de statut de membre à part entière à l’ONU, bloqué par l’absence d’un vote favorable au Conseil de sécurité. De leur côté, des pays comme l’Arabie saoudite, la Syrie ou le Liban refusent encore de normaliser leurs relations avec Israël, souvent par solidarité avec la cause palestinienne.
Les Accords d’Abraham : Une Référence à Nuancer
Pour comprendre les enjeux actuels, un détour par les accords d’Abraham s’impose. Signés en 2020 sous l’égide de l’ancien président américain Donald Trump, ils ont marqué une étape historique en normalisant les relations entre Israël et trois pays arabes : les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc. Ce précédent a montré qu’une normalisation est possible, mais il a aussi ses limites.
Pourquoi ? Parce que ces accords ont été critiqués par certains pour avoir contourné la question palestinienne. L’Arabie saoudite, par exemple, a toujours conditionné toute normalisation à des avancées concrètes pour les Palestiniens. Cette position, partagée par d’autres pays de la région, rend la tâche de la conférence de New York d’autant plus complexe.
| Événement | Impact | Contexte |
| Accords d’Abraham (2020) | Normalisation avec Émirats, Bahreïn, Maroc | Contournement de la question palestinienne |
| Attaque du 7 octobre 2023 | Escalade du conflit à Gaza | Tensions accrues dans la région |
| Conférence de New York (juin 2025) | Relance de la solution à deux États | Coopération France-Arabie saoudite |
Les Défis d’une Conférence à Haut Risque
Organiser une conférence internationale sur un sujet aussi sensible est un pari risqué. D’abord, il faut convaincre les parties prenantes de s’asseoir à la même table. Ensuite, il faut créer un élan suffisant pour que les discussions ne s’enlisent pas dans des déclarations d’intention. Enfin, il faut composer avec les réalités du terrain : un conflit actif, des otages toujours retenus, et une méfiance généralisée.
Ce qui m’a toujours frappé dans ce genre de négociations, c’est leur fragilité. Un seul faux pas, une déclaration maladroite ou un nouvel incident peut tout faire dérailler. Pourtant, il y a une lueur d’espoir. L’implication de pays comme l’Égypte et la Jordanie, qui ont une expérience des négociations avec Israël, pourrait apporter une crédibilité supplémentaire à l’initiative.
Et Après ? Les Enjeux à Long Terme
Si la conférence de New York parvient à poser les bases d’un dialogue constructif, elle pourrait marquer un tournant. Mais pour cela, plusieurs conditions devront être remplies :
- Une reconnaissance mutuelle des droits des deux parties, sans ambiguïté.
- Des engagements concrets pour la sécurité régionale, y compris des garanties pour Israël.
- Une implication plus large de la communauté internationale, notamment des Nations unies.
Ce qui me semble essentiel, c’est que cette conférence ne soit pas perçue comme un simple exercice diplomatique. Les populations, qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes, attendent des résultats tangibles. La paix ne se décrète pas dans des salles de réunion ; elle se construit sur le terrain, avec des gestes concrets.
En repensant à cette réunion parisienne, je ne peux m’empêcher de me demander : et si c’était le début de quelque chose de grand ? La solution à deux États, bien que difficile à atteindre, reste une boussole pour ceux qui croient en une coexistence possible. La route est longue, semée d’embûches, mais chaque pas compte. D’ici juin, les diplomates devront redoubler d’efforts pour transformer cette ambition en réalité. Et nous, en tant qu’observateurs, devrons rester attentifs à chaque signe, chaque avancée, chaque recul. Car dans ce coin du monde, l’histoire s’écrit au jour le jour.
