Vous vous souvenez de l’époque où le PSG féminin faisait la une rien qu’en annonçant une nouvelle star internationale ? Moi oui. C’était il y a quelques années à peine, et pourtant on a l’impression que c’était dans une autre vie. Aujourd’hui, le club parisien est dernier de son groupe de Ligue des champions avec zéro point après trois journées… et personne ne crie au scandale dans les couloirs du Campus PSG. Étrange, non ?
Ce calme apparent cache en réalité une révolution profonde, presque discrète. Le PSG féminin a décidé de tourner le dos à la course à l’armement financier qui caractérise le foot féminin européen depuis cinq ans. Exit les chèques en blanc, place à la patience, à la formation locale et à une ambition revue à la baisse… du moins à court terme.
Un virage stratégique assumé
Quand on voit le classement actuel en Ligue des champions, on pourrait croire à une crise sportive. Trois défaites, zéro point, réception du Bayern ce jeudi soir… Sur le papier, c’est la cata. Pourtant, l’entraîneur Paulo César, 47 ans et look de prof de maths brésilien, affichait une sérénité désarçonnante en conférence de presse : « Il n’y a pas de raison de s’inquiéter. » Vraiment ?
« Contre Manchester, on a fait une bonne prestation même si on a perdu 1-2. On a notre destin en mains. »
Paulo César, entraîneur du PSG féminin
Ce discours, on l’entend rarement dans le foot moderne où chaque défaite devient un drame national. Mais ici, il colle parfaitement à la nouvelle philosophie du club.
Angelo Castellazzi, l’homme qui dit non aux enchères folles
Depuis son arrivée en août 2022, le directeur sportif italien a une mission claire : reconstruire sur des bases saines. Fini les recrutements à coups de millions pour attirer les plus grandes stars. Le PSG préfère désormais prospecter… en Île-de-France.
Le message est limpide :
- S’appuyer d’abord sur les jeunes du centre de formation
- Compléter avec quelques talents étrangers ciblés (Olga Carmona, Rasheedat Ajibade)
- Refuser de suivre l’inflation galopante des salaires dans le foot féminin
Résultat ? Frida Maanum a préféré prolonger à Arsenal plutôt que de venir à Paris. Alexia Putellas ? Même pas tenté, trop cher. Le club assume.
« Il y a deux ou trois clubs qui investissent massivement – ce qui n’est pas une assurance de succès d’ailleurs – et d’autres qui tentent de grandir de manière raisonnée. Il faut du bon sens. »
Angelo Castellazzi
Difficile de lui donner tort quand on voit certains clubs anglais ou espagnols proposer des salaires complètement déconnectés.
L’héritage douloureux des années chaos
Pour comprendre ce choix, il faut remonter un peu. Le PSG féminin a vécu des années agitées. Affaire Hamraoui en 2021, instabilité chronique, changements d’entraîneurs à répétition… Tout ça a laissé des traces.
Et puis il y a eu l’exode vers Lyon. Däbritz, Diani, Chawinga, Katoto, Shrader… Toutes parties chez le grand rival. Ajoutez à ça le départ de Grace Geyoro vers l’Angleterre l’été dernier, et vous avez un effectif complètement renouvelé, rajeuni, presque méconnaissable.
Castellazzi le dit sans détour : la continuité, c’est ce qui fait gagner. Paris n’a jamais réussi à l’avoir vraiment ces dernières années. Aujourd’hui, le club veut reprendre le temps long.
Paulo César, l’entraîneur inattendu devenu patron
Quand on pense « grand club européen », on imagine un coach avec un CV long comme le bras. Le PSG a choisi l’opposé : Paulo César, qui n’avait entraîné que des jeunes et au Brésil avant de prendre l’équipe première. Un pari osé.
Mais un pari cohérent avec la nouvelle ligne. On veut quelqu’un qui comprend la formation, qui sait faire progresser des jeunes, qui accepte de perdre quelques matchs aujourd’hui pour gagner demain. Et franchement, quand on voit la prestation d’Anaïs Ebayillin (17 ans) à Manchester United récemment, on se dit que le pari commence à payer.
Le réservoir francilien, la nouvelle mine d’or
Paris et sa région, c’est un peu le Klondike du football féminin français. Des milliers de licenciées, des clubs formateurs partout, une densité folle. Le PSG veut en profiter à fond.
Un tout nouveau bâtiment dédié aux filles va ouvrir à Poissy en 2026. Symbole fort. Le message aux jeunes Parisiennes est clair : vous avez une vraie chance ici, pas besoin d’aller à Lyon ou à l’étranger pour percer.
J’ai discuté avec plusieurs éducateurs en Île-de-France récemment, et ils le confirment : le discours du PSG commence à porter. Des joueuses qui auraient filé direct à l’OL il y a encore deux ans réfléchissent désormais à rester ou à signer à Paris.
Un modèle économique plus sain ?
Ce qui frappe dans cette nouvelle stratégie, c’est qu’elle va à contre-courant de tout ce qu’on voit ailleurs. Pendant que certains clubs anglais cassent leur PEL pour une joueuse, le PSG dit stop.
Est-ce viable sur le long terme ? La question est légitime. Mais quand on regarde l’évolution du foot féminin ces dernières années, on voit que l’argent ne fait pas tout. Wolfsburg a dominé l’Europe pendant des années avec un budget raisonnable. Le Barça d’il y a dix ans non plus n’était pas le plus riche.
Au contraire, certains clubs qui ont trop dépensé se retrouvent aujourd’hui avec des effectifs pléthoriques, des salaires ingérables et des résultats en dents de scie. Le PSG veut éviter ce piège.
Et les résultats dans tout ça ?
Forcément, à court terme, ça fait mal. Être dernier de son groupe de LDC, ce n’est jamais agréable. Mais le club l’assume complètement. C’est le prix à payer pour reconstruire.
Paulo César le répète : l’équipe progresse. Les jeunes prennent de l’expérience. Les recrues étrangères comme Olga Carmona ou Rasheedat Ajibade apportent leur qualité. Et surtout, il y a une identité qui se dessine, chose qu’on n’avait plus vue depuis longtemps.
Je ne dis pas que le PSG va gagner la Ligue des champions dans deux ans. Mais je suis prêt à parier qu’on parlera beaucoup plus de ce projet dans cinq ans que de certains clubs qui flambent aujourd’hui.
Ce que ça change pour le foot féminin français
Ce virage du PSG n’est pas anodin pour le paysage hexagonal. Si Paris réussit son pari, ça pourrait inspirer d’autres clubs à miser sur la formation plutôt que sur le portefeuille. Et ça, ce serait une vraie bonne nouvelle pour tout l’écosystème.
Parce que soyons honnêtes : aujourd’hui, il n’y a quasiment que Lyon qui arrive à rivaliser avec les géants européens. Si le PSG revient par la formation et une gestion saine, ça rééquilibre les forces. Et ça pousse tout le monde à progresser.
Après, il reste un gros défi : convaincre les meilleures jeunes Françaises de rester. Car même avec le plus beau centre de formation du monde, si les talents continuent de filer à l’étranger ou à Lyon dès qu’elles explosent… le projet tombe à l’eau.
Mon avis (puisqu’on est entre nous)
Personnellement, j’adore ce genre de projet. Dans un monde du foot où tout va trop vite, où on veut tout, tout de suite, voir un grand club accepter de redevenir patient, c’est rafraîchissant.
Évidemment, il y aura des soirées compliquées comme celle qui arrive contre le Bayern. Mais si dans quatre ou cinq ans on voit une équipe du PSG féminine composée à 60-70 % de joueuses formées au club et qui joue les trouble-fêtes en Europe… on se dira que ça valait le coup.
Et vous, vous y croyez à ce PSG 2.0 ? Moi, en tout cas, je commence à y croire sérieusement.
Le foot féminin évolue à toute vitesse. Certains choisiront la voie rapide avec des risques énormes. Le PSG, lui, choisit la voie lente, mais peut-être la plus durable. Rendez-vous dans quelques années pour voir qui avait raison.
