Imaginez une ville où chaque élection ressemble à un épisode de série politique. Une commune cossue, entourée d’arbres centenaires, où les rivalités durent parfois depuis des décennies. Au Vésinet, dans les Yvelines, on ne parle plus seulement de trottoirs ou de ramassage des poubelles : on parle pouvoir, héritage, et surtout succession. Le maire actuel, après un seul mandat, a décidé de raccrocher l’écharpe. Et là, tout le monde retient son souffle.
Franchement, quand j’ai appris que Bruno Coradetti ne repartirait pas, j’ai tout de suite pensé : « Ça va être du lourd ». Parce que cette ville-là, ce n’est pas n’importe quelle commune des Yvelines. C’est le genre d’endroit où les habitants surveillent leur cadre de vie comme un trésor national, et où la politique locale passionne autant qu’un bon match de foot un dimanche soir.
Une succession qui était dans l’air depuis longtemps
À 72 ans, le maire sortant a choisi de tourner la page. Il l’a annoncé calmement dans le bulletin municipal, mais la nouvelle faisait déjà le tour des allées du parc depuis plusieurs semaines. « J’ai adoré ce mandat, mais il y a un moment où il faut savoir passer la main », confie-t-il avec cette franchise qu’on lui connaît. Il aurait pu repartir, oui, mais seulement pour céder le fauteuil en cours de route. Et ça, il refuse : « Ce serait tromper les électeurs ».
Difficile de lui donner tort. Dans une ville aussi regardée, partir en plein mandat aurait déclenché une tempête. Alors il laisse la place. Proprement. Et maintenant ? Maintenant, c’est open bar.
Le Vésinet, une ville qui ne fait jamais dans la demi-mesure
Si vous n’avez jamais mis les pieds au Vésinet, sachez une chose : c’est un ovni. Une « ville-parc » pensée au XIXe siècle pour la bourgeoisie parisienne, avec ses lacs, ses villas incroyables et ses règles d’urbanisme ultra-strictes. Ici, on ne plaisante pas avec le patrimoine. Et en politique non plus.
Rappelez-vous 2020 : neuf listes ! Neuf. Un record dans les Yvelines. Des alliances improbables, des trahisons, des retournements de veste… Un vrai feuilleton. Un maire d’une commune voisine m’a glissé un jour, avec un sourire en coin : « Le Vésinet, on suit ça comme une série Netflix ». Il n’a pas tort.
« Les vieilles guerres de clans, un terrain miné »
– Un observateur aguerri du microcosme local
Cette fois, on devrait être plus raisonnable… enfin, disons quatre ou cinq listes maximum. Mais l’intensité, elle, est déjà là.
Les trois mousquetaires… de la droite
Car oui, pour l’instant, tous les candidats déclarés viennent du même bord politique : la droite et le centre-droit. À gauche, on y reviendra, mais pour l’instant, c’est un match interne.
Premier visage, et pas des moindres : Sabine Delpeuch. 52 ans, adjointe sortante aux sports, elle s’est lancée il y a quelques jours, entourée d’une bonne partie de l’équipe municipale actuelle. Elle connaît la maison, elle a l’expérience du terrain. Et elle ne manque pas d’ambition.
« On a acquis de l’expérience. On a fait des choses dont on peut être fiers, mais on a aussi commis des erreurs. Et on a appris. »
– Sabine Delpeuch
Elle parle d’apaisement, de transparence, de gouvernance sincère. Des mots qui font mouche après six années parfois agitées. Elle promet une certaine rupture, sans renier totalement le bilan. Un exercice d’équilibriste.
Petit détail qui a son importance : Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale et conseillère municipale sortante, ne figurera pas sur sa liste. Priorités nationales obligent. Un absence qui pèse, quand même.
Stéphanie Cabossioras, l’outsider qui monte
De l’autre côté du conseil, il y a Stéphanie Cabossioras. 39 ans, cadre dans une grande banque, arrivée au Vésinet il y a six ans seulement. Elle a fédéré une bonne partie de l’opposition, y compris des figures historiques comme Bernard Grouchko, ancien maire. C’est dire.
Elle joue la carte du renouveau. « Un regard neuf », dit-elle. Celui d’une génération qui arrive, qui voit la ville évoluer, les familles s’installer, les besoins changer. Elle tape fort sur la gestion financière : dette en hausse, études jugées inutiles… Des arguments qui portent auprès de ceux qui trouvent que la mandature a parfois trop dépensé.
Et surtout, elle refuse l’étiquette LR, malgré son engagement chez les Républicains. Stratégie maligne : elle veut dépasser les clivages partisans dans une ville où la politique nationale pèse moins que le bulletin municipal.
Thibaut Gripoix, le revenant tenace
Et puis il y a lui. Thibaut Gripoix. 45 ans, déjà deux campagnes comme tête de liste au compteur. En 2020, il échoue à… 46 voix près. Autant dire que ça laisse des traces. Cette fois, il y retourne, avec l’étiquette LR et le soutien de l’ancien maire Didier Jonemann.
« Je reste cohérent avec mes valeurs. Le Vésinet, c’est chevillé à mon corps. »
– Thibaut Gripoix
Il met en avant des thèmes concrets : accès aux soins (un vrai sujet dans une ville vieillissante), sécurité, préservation du cadre de vie. Et il n’hésite pas à parler d’une campagne qui vire déjà au « caniveau ». Il a même porté plainte pour diffamation. Ambiance.
Et la gauche dans tout ça ?
On en parle peu, mais elle sera là. Une liste soutenue par le Parti socialiste est en préparation. Pas pour gagner – soyons honnêtes, la gauche dépasse rarement les 15 % ici – mais pour retrouver un ou deux sièges au conseil. Et pourquoi pas créer la surprise dans une triangulaire ou une quadrangulaire ? Dans cette ville, tout est possible.
Les grands enjeux qui vont tout faire basculer
Derrière les noms et les étiquettes, il y a des sujets concrets qui reviennent en boucle :
- La préservation du cadre de vie : c’est LE totem. Malheur à celui qui touche à un arbre ou à une villa.
- Le centre-ville : entre projets d’aménagement et craintes de densification, c’est explosif.
- La sécurité : même dans une ville aussi paisible, le sentiment d’insécurité progresse.
- Les finances : dette, fiscalité, investissements… Tout le monde a son avis.
- L’accès aux soins : déserts médicaux, maison de santé… Un sujet qui touche tout le monde.
Et puis il y a cette question lancinante : veut-on de la continuité ou de la rupture ? Sabine Delpeuch incarne un peu les deux. Stéphanie Cabossioras joue la carte du sang neuf. Thibaut Gripoix, celui de l’expérience et de la cohérence idéologique.
Pourquoi cette élection nous fascine tous
Parce qu’au fond, le Vésinet, c’est un concentré de France. Une ville riche, exigeante, où la politique locale reste vivante, passionnée, parfois excessive. Où on se bat pour des idées, pour un projet de société à l’échelle d’une commune. C’est rare.
On parle souvent de désintérêt pour les municipales. Pas ici. Jamais ici.
Alors oui, il y aura probablement moins de listes qu’en 2020. Mais l’intensité ? Elle est déjà à son maximum. Et quelque chose me dit que les prochains mois vont nous offrir quelques rebondissements dont seul le Vésinet a le secret.
À suivre. De très près.
Et vous, qui voyez-vous maire en 2026 ? Le commentaire est ouvert, et croyez-moi, ça va chauffer.
