Imaginez-vous il y a dix ans, trempés sous la pluie parisienne, à livrer des sushis à vélo pour quelques euros de l’heure. Et puis, un jour, vous décidez de tout plaquer pour racheter des vélos électriques usagés, les retaper et les revendre. Résultat ? Vous devenez leader mondial du secteur en quatre petites années. Cette histoire, elle n’est pas sortie d’un film américain. Elle se passe à Gennevilliers, à deux pas de Paris, et elle est devenue réalité pour deux anciens livreurs qui ont créé ce qui est aujourd’hui la référence absolue du vélo électrique reconditionné.
Quand deux livreurs décident de changer la donne
Tout commence autour de 2014. À l’époque, la plateforme de livraison de repas explose. Les deux fondateurs, alors à peine la petite trentaine, enchaînent les kilomètres dans les rues de la capitale. Ils connaissent chaque modèle de vélo électrique sur le bout des doigts, les batteries qui lâchent au pire moment, les moteurs qui grincent après 5 000 km. Et surtout, ils voient arriver des milliers de vélos premium qui finissent à la casse simplement parce que leur propriétaire veut du neuf.
Un soir, l’idée fuse : et si on rachetait ces bécanes, on les remettait à neuf et on les revendait moitié prix ? Le concept est simple, presque évident. Pourtant personne ne l’a vraiment fait à grande échelle en Europe.
2021 : le grand saut
Fin 2021, l’entreprise voit le jour. Les débuts sont artisanaux : un petit local, quelques outils, des annonces sur les plateformes de seconde main. Très vite, la demande explose. Les gens veulent du vélo électrique, mais le prix du neuf fait mal au portefeuille – on parle souvent de 3 000 à 6 000 euros la bête. Un modèle reconditionné garanti, livré en 48 h et 40 à 50 % moins cher ? Le succès est immédiat.
En moins de deux ans, l’équipe passe de 5 à plus de 200 personnes. L’atelier de Gennevilliers, d’abord 1 000 m², devient vite trop petit. Aujourd’hui, on parle déjà d’un nouveau site gigantesque pour suivre la cadence.
Un process industriel qui fait école
Ce qui impressionne, c’est la rigueur du reconditionnement. Chaque vélo passe par plus de 70 points de contrôle. Batterie testée, moteur démonté si besoin, cadre vérifié aux rayons X, pièces changées systématiquement si usure supérieure à 20 %. Résultat : un vélo qui sort de l’atelier avec une garantie d’un an, parfois deux, et qui tiendra aussi longtemps qu’un neuf.
- Diagnostic complet en moins de 24 h
- Remplacement systématique des pièces d’usure (plaquettes, pneus, chaîne)
- Test d’autonomie réel sur 50 km minimum
- Mise à jour logiciel du moteur et de l’écran
- Nettoyage haute pression et polish final
Le client reçoit sa machine comme au premier jour, emballée dans un carton sur-mesure, prête à rouler.
Des chiffres qui donnent le vertige
En novembre 2025, la barre symbolique des 100 000 vélos vendus est franchie. Et ce n’est qu’un début. La dernière levée de fonds, 60 millions d’euros, porte le total à plus de 100 millions collectés en quatre ans. Des investisseurs du monde entier se bousculent.
« On ne construit pas juste une entreprise, on participe à changer la façon dont les gens se déplacent en ville. »
– L’un des cofondateurs, avec le sourire de celui qui sait qu’il a tapé dans le mille
Le modèle est désormais copié partout en Europe et commence à s’exporter aux États-Unis et au Canada. Des ateliers ouvrent en Belgique, en Allemagne, en Espagne. L’objectif affiché est clair : devenir le « Back Market du vélo électrique » à l’échelle mondiale.
Pourquoi ça marche si bien ?
Plusieurs raisons se cumulent, et franchement, c’est du génie simple.
- Le prix : jusqu’à 60 % moins cher qu’un neuf pour une qualité équivalente
- L’écologie : chaque vélo reconditionné, c’est plusieurs centaines de kilos de CO2 évités
- La confiance : garantie, SAV rapide, retours gratuits 14 jours
- La rapidité : livraison en 48 h partout en France, souvent le lendemain
- Le choix : plus de 80 marques, du city bike au VTT en passant par le cargo familial
Ajoutez à ça une communication maligne, très présente sur les réseaux, avec des vidéos avant/après qui font le tour de TikTok et Instagram, et vous avez la recette parfaite.
L’impact environnemental, le vrai bonus
Produire un vélo électrique neuf, c’est environ 200 à 300 kg de CO2, surtout à cause de la batterie. En reconditionnant, on divise ce chiffre par dix. Quand on sait que l’entreprise a déjà remis 100 000 vélos sur les routes, faites le calcul : c’est l’équivalent de plusieurs centaines de milliers de tonnes de CO2 économisées. Et avec l’objectif du million d’ici 2030, on parle d’un impact climatique absolument colossal.
Dans un monde où tout le monde parle transition écologique mais où peu agissent vraiment, cette success-story fait figure d’exemple concret.
Et demain ?
Les deux fondateurs ne comptent pas s’arrêter là. L’ambition est claire : 2 000 salariés dans le monde, des ateliers sur chaque continent, et peut-être même une entrée en bourse d’ici quelques années. En parallèle, ils développent des partenariats avec les grandes marques pour récupérer directement les stocks invendus ou les retours clients.
On parle aussi d’une gamme de pièces détachées reconditionnées, d’un abonnement « batterie illimitée », et même d’une assurance spécifique pour les vélos de seconde main.
Ce qui est sûr, c’est que ces deux anciens livreurs ont transformé leur galère quotidienne en une aventure entrepreneuriale hors norme. Et quelque part, ça fait du bien de voir que les plus belles réussites peuvent naître des expériences les plus modestes.
Alors la prochaine fois que vous croiserez un vélo électrique flambant neuf avec une petite étiquette « reconditionné par les pros », pensez à eux. Ces gars qui ont commencé sous la pluie avec un smartphone et un sac à dos thermique sont en train de changer la mobilité urbaine, un vélo à la fois.
Et quelque part, ça redonne sacrément espoir.
