Vous est-il déjà arrivé de regarder un match de hockey et de vous dire que, parfois, la vraie action n’est même pas dans le palet ? Hier soir, à la patinoire de Grenoble, on a eu droit à ce genre de moment où le sport bascule dans autre chose. Une simple étincelle, un regard de trop, et toute la glace s’est transformée en ring.
Je ne vais pas vous refaire le match minute par minute – d’autres l’ont déjà fait – mais franchement, quand on aime le hockey, on sait que ces séquences-là laissent toujours un goût bizarre. Entre l’adrénaline brute et la sensation que ça va trop loin.
Quand une provocation fait exploser la patinoire
Tout part, comme souvent, d’un détail. Un gardien qui parle un peu trop, qui chambre, qui sort de sa cage pour faire le malin. Dans le hockey nord-américain, on appelle ça du chirping. Chez nous, on dit juste que ça finit par énerver quelqu’un.
Et là, à la 15e minute du deuxième tiers, c’est le pétard qui prend feu. Un joueur de Grenoble craque, fonce sur un adversaire, et en quelques secondes tout le monde y va. Les casques volent, les gants tombent, les coups pleuvent. On est loin du ballet sur glace qu’on vend parfois aux nouveaux spectateurs.
Le pire ? Le gardien angevin finit avec l’arcade ouverte, du sang sur le masque. Expulsé logiquement, il laisse son équipe à 5 contre 5 pour le reste du match. Résultat des courses : Grenoble l’emporte 6-4 et enchaîne, Angers enchaîne une troisième défaite. Mais personne ne parle vraiment du score.
Le hockey, ce sport où la bagarre est (presque) autorisée
Il faut le rappeler : dans le hockey sur glace, se battre n’est pas forcément synonyme de carton rouge immédiat. Il y a même une pénalité spéciale, la misconduct pour bagarre, 5 minutes chacun, et on reprend comme si de rien n’était. C’est inscrit dans le règlement international.
Mais soyons honnêtes : voir dix joueurs se taper dessus pendant une minute entière, ça choque toujours un peu quand on n’est pas habitué. Et même quand on l’est.
« C’est le folklore du hockey », disent certains. « C’est juste pathétique », répondent les autres. Moi je suis entre les deux.
Parce que oui, il y a une forme de tradition. Les anciens racontent encore les grandes bagarres des années 80-90, quand les goons (les gros durs) avaient leur place attitrée dans le roster. Mais aujourd’hui ? Avec les vitesses actuelles, les protections, les salaires, est-ce que ça a encore du sens ?
Les images qui font mal à l’image du hockey français
Sur les réseaux, les vidéos tournent en boucle. On voit un joueur frapper au sol, un autre qui continue alors que l’arbitre essaie de séparer. Ce n’est pas glorieux. Et le pire, c’est que ça va rester. Dans dix ans, quand quelqu’un cherchera « bagarre hockey Grenoble », c’est ça qui sortira en premier.
Le hockey français se bat déjà pour exister face au foot, au rugby, au basket. On a une Ligue Magnus qui progresse, des salles qui se remplissent, des jeunes qui s’y mettent. Et là, bam, une séquence de deux minutes qui ramène tout le monde vingt ans en arrière.
- Des parents qui hésitent à mettre leur gamin au hockey « parce que c’est violent »
- Des sponsors qui se posent la question de l’image
- Des médias généralistes qui titrent sur la « baston » plutôt que sur le beau jeu
On le sait tous : une seule vidéo de bagarre fait plus de vues que dix highlights de buts magnifiques. C’est triste, mais c’est comme ça.
Et maintenant, quelles conséquences ?
La commission de discipline va se réunir, c’est certain. Des suspensions vont tomber, probablement lourdes. Le joueur qui a ouvert l’arcade du gardien risque gros. Le gardien lui-même pourrait écoper pour provocation. Et les deux clubs vont prendre des amendes.
Mais au-delà des sanctions, il y a une question de fond. Est-ce qu’on veut continuer à accepter ça comme une « tradition » ou est-ce qu’on pose enfin des limites plus claires ?
En Amérique du Nord, la NHL a déjà beaucoup réduit la tolérance. Les bagarres générales sont rares, les instigateurs sont sévèrement punis. En Europe, la tendance est la même. Sauf que chez nous, on a parfois l’impression de vouloir garder « l’âme » du hockey d’autrefois.
Le paradoxe du spectacle
Ce qui me gêne le plus, c’est le paradoxe. On vend le hockey comme un sport rapide, technique, spectaculaire. Et puis une fois de temps en temps, on se dit que pour remplir les salles, il faut aussi du « sang et des larmes ».
Regardez les affluences : quand il y a de la tension, quand les rivalités sont chaudes, les gradins sont pleins. Grenoble-Angers, c’est une vieille histoire, une finale récente, des joueurs qui se connaissent par cœur. Le public adore ça. Moi le premier, je l’avoue.
Mais il y a une différence entre intensité et violence gratuite. Entre un bon check légal qui fait trembler les vitres et dix mecs qui se tapent dessus parce que l’un a dit un mot de trop à la mère de l’autre.
Et les joueurs dans tout ça ?
Ils ne sont pas des anges non plus. Le gardien qui provoque, il sait très bien ce qu’il fait. Il joue avec le feu pour sortir l’adversaire de son match. C’est une arme comme une autre. Et ça marche, malheureusement.
De l’autre côté, répondre par les poings, c’est laisser l’adversaire gagner. Grenoble a gagné le match, ok. Mais ils ont aussi donné exactement ce que l’autre cherchait : de l’émotion brute, du chaos, de l’attention.
Dans le hockey, on dit souvent : « Ne jamais répondre à un idiot, il t’entraîne à son niveau et te bat par l’expérience. » Hier, c’est exactement ce qui s’est passé.
Vers un hockey plus propre ?
Je ne suis pas naïf. La physicalité fait partie du jeu. Un bon bodycheck propre, un engagement total, c’est magnifique. Mais les bagarres générales, les coups après le sifflet, les gestes dangereux, ça n’a plus sa place en 2025.
Les instances ont les outils. Expulsions automatiques en cas de bagarre générale, suspensions minimales de 10 matchs pour les récidivistes, amendes dissuasives pour les clubs. Ça existe ailleurs, ça peut exister chez nous.
Parce que sinon, on continuera à avoir ces soirées où, au lieu de parler d’un but en lucarne ou d’un arrêt miracle, on parlera de qui a frappé qui le plus fort.
Ce que j’en retiens, personnellement
J’aime le hockey pour son intensité, sa vitesse, son côté imprévisible. J’aime quand ça chauffe, quand les joueurs se rentrent dedans proprement. Mais hier, j’ai éteint la télé avec un sentiment mitigé.
On a gagné un match, oui. On a peut-être perdu un peu plus que ça.
Le hockey français mérite mieux que d’être résumé à une bagarre. Il mérite qu’on parle de ses talents, de ses salles pleines, de ses jeunes qui progressent. Pas de séquences qui font le tour des réseaux pour les mauvaises raisons.
Allez, on tourne la page. Prochain match, on remet le palet au centre. Et on essaie de se rappeler pourquoi on aime ce sport : pas pour les poings, mais pour la glace, la vitesse, et les émotions – les vraies.
Et vous, vous en pensez quoi ? La bagarre fait partie du hockey ou il est temps de tourner la page ? Dites-le moi en commentaire, on en discute.
