Imaginez : vous commencez la saison avec l’espoir fou de disputer les barrages de Ligue des Champions, et quatre mois plus tard votre entraîneur déclare publiquement que l’objectif est devenu… le maintien. C’est exactement ce qui vient d’arriver à l’OGC Nice. Dimanche soir au Moustoir, la défaite 3-1 contre Lorient a fait très mal, pas seulement au classement, mais surtout dans les têtes.
Je ne vais pas vous refaire le match minute par minute, vous l’avez probablement vu ou lu ailleurs. Ce qui m’a marqué, c’est l’après-match. Cette impression que quelque chose s’est définitivement cassé dans le groupe azuréen.
Quand le coach dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas
Franck Haise n’est pas du genre à en rajouter. L’homme est posé, réfléchi, parfois même un peu trop mesuré. Alors quand il prend le micro et balance cash : « On joue clairement le maintien », ça fait l’effet d’une claque. Pas de langue de bois, pas de « on va analyser », non. Une phrase claire, nette, presque libératrice.
« C’est important que les choses soient claires. Angers le week-end prochain, ça va déjà être un match pour le maintien. Comme ce soir, c’en était déjà un. »
Franck Haise, entraîneur de l’OGC Nice
Relisez bien. Un coach qui dit ça en décembre, pour un club qui a dépensé plus de 100 millions d’euros cet été et qui visait le podium il y a encore deux mois. C’est violent. Et en même temps, c’est peut-être le début de la solution : arrêter de se mentir.
Six défaites d’affilée, un record que personne ne voulait
Revenons aux chiffres, parce qu’ils parlent d’eux-mêmes. Nice reste sur :
- 4 défaites consécutives en Ligue 1 (la dernière fois, c’était en… 1977 !)
- 6 revers toutes compétitions confondues
- 10e place au classement avec seulement 3 points d’avance sur la zone rouge
- Une différence de buts catastrophique sur les 6 derniers matchs : -12
Et le pire, c’est la manière. Contre Lorient, Nice mène 1-0, domine la première demi-heure… et s’effondre complètement. Un but gag sur corner, une passivité incroyable sur coup de pied arrêté, et puis plus rien. Comme si l’équipe n’avait plus de jus, plus de mental.
Un vestiaire qui ne forme plus un groupe
Ce qui ressort le plus des déclas post-match, c’est ce sentiment d’impuissance face à un groupe qui ne coagule pas. Haise l’a dit sans filtre :
« Ça fait 23 ou 24 ans que j’entraîne et c’est la première fois que je n’arrive pas à faire groupe. À un moment, il faut s’aimer quand on joue au foot. »
Quand votre entraîneur dit qu’il n’arrive pas à faire en sorte que les joueurs aient envie de jouer les uns avec les autres, on est au-delà du simple problème tactique. On touche à l’humain. Et là, c’est beaucoup plus compliqué à réparer qu’un schéma en 4-3-3 ou un manque de finition.
Sofiane Diop, pourtant souvent critiqué pour son manque d’implication, a été l’un des seuls à aller s’expliquer devant les supporters niçois déplacés. Et il n’y est pas allé par quatre chemins : « On est pourris à l’heure actuelle, on le sait ». Au moins, il y en a un qui assume.
Un recrutement XXL qui ne prend pas
On peut tourner autour du pot autant qu’on veut, mais le recrutement estival pose question. Beaucoup de talents individuels, mais peu de liant. Des joueurs qui débarquent d’horizons très différents, avec des cultures foot différentes, des langues différentes, des attentes différentes.
Terem Moffi, censé être le grand attaquant, traverse une période compliquée. Kevin Carlos n’a toujours pas marqué. Les latéraux peinent à défendre, les milieux ne protègent pas assez… Et au final, personne ne semble prêt à mouiller le maillot pour le voisin.
Le directeur sportif Florian Maurice a été clair lui aussi : « On ne va pas changer 15 joueurs au mercato d’hiver ». Traduction : il va falloir faire avec ce groupe-là. Et ça rend la mission encore plus compliquée.
Le cas Melvin Bard, symbole d’une équipe qui craque mentalement
Le capitaine par intérim a vécu une soirée cauchemar à Lorient. Erreur sur le deuxième but, passivité sur le troisième… Le genre de match qui laisse des traces. Et pourtant, c’est lui qui porte le brassard en l’absence de Dante. Symbole cruel d’un groupe qui n’a plus de leaders naturels capables de tirer tout le monde vers le haut dans l’adversité.
Et maintenant ?
La bonne nouvelle, c’est que le club semble enfin regarder la réalité en face. Plus de discours ambitieux à la mords-moi-le-nœud, plus de « on vise l’Europe ». Non. On joue le maintien. Point.
Le match contre Angers la semaine prochaine prend déjà des allures de finale. Et derrière, il y aura Montpellier, Saint-Étienne, Le Havre… Des matchs où il faudra prendre des points, pas faire joli.
Le mercato d’hiver sera scruté à la loupe. Pas forcément pour faire venir des stars (de toute façon, qui voudrait rejoindre un club en ce moment ?), mais pour ramener des profils expérimentés, des joueurs qui connaissent la Ligue 1, qui savent ce que c’est de jouer sous pression avec le couteau sous la gorge.
Et surtout, il faudra que quelqu’un, quelque part dans ce vestiaire, prenne les choses en main. Que les anciens parlent aux jeunes, que les francophones discutent avec les anglophones, que tout le monde se mette à ramer dans le même sens. Parce que là, on a l’impression que chacun joue pour sa pomme.
Un électrochoc nécessaire ?
Haise a proposé sa tête après la claque contre Marseille (1-5). La direction a dit non. Était-ce la bonne décision ? L’avenir le dira. Mais ce qui est sûr, c’est que garder le coach permet d’éviter un énième changement qui aurait encore plus déstabilisé le groupe.
Maintenant, il faut que tout le monde se regarde dans la glace. Joueurs, staff, direction. Et qu’on arrête de se raconter des histoires. Nice n’est plus un prétendant à l’Europe. Nice est une équipe en danger. Et parfois, toucher le fond, c’est le seul moyen de rebondir.
Parce que oui, il y a du talent dans cet effectif. Oui, il y a un centre de formation exceptionnel. Oui, il y a un projet ambitieux porté par INEOS. Mais tout ça ne sert à rien si on n’a pas l’envie, la hargne, la solidarité.
Alors oui, ça fait mal d’entendre parler de maintien en décembre. Mais peut-être que c’est exactement ce qu’il fallait entendre. Parfois, il faut tomber très bas pour se relever plus fort.
Le Gym a déjà connu des périodes sombres par le passé. Il s’en est toujours relevé. Cette fois ne fera pas exception. Mais il va falloir se battre. Vraiment se battre. Et commencer dès la semaine prochaine contre Angers.
Allez Nice. On croit encore en vous. Mais là, il va falloir le prouver sur le terrain.
