Dimanche soir, à la Meinau, il ne faisait pas bon être joueur du Racing Club de Strasbourg. Mené 2-1 par Brest alors qu’il avait ouvert le score, le public commençait à gronder, et sur le banc, Liam Rosenior bouillait. Quand le quatrième arbitre a levé le panneau avec le numéro de Martial Godo, entré seulement vingt-sept minutes plus tôt, plus personne n’a osé broncher. Un coaching aussi radical, ça ne passe pas inaperçu. Et ça résume parfaitement le nouveau visage que veut donner l’entraîneur anglais à son équipe : fini les gentils discours, place aux exigences de haut niveau.
Liam Rosenior a décidé de ne plus rien laisser passer
Qu’on soit clair : Rosenior n’a pas attendu ce match contre Brest pour durcir le ton. Cela fait déjà plusieurs semaines que le message évolue. Mais là, il est devenu limpide. « On n’est plus là pour apprendre, en fait ! » La phrase a claqué en conférence de presse et elle résonne encore dans les têtes des joueurs. À 41 ans, l’ancien adjoint de Derby et Hull City a compris que la patience avait assez duré. Le potentiel est là, les recrues estivales ont du talent, le club avance structurellement… il est temps de gagner, point.
Et quand on regarde les chiffres, on comprend la colère. Strasbourg reste l’équipe qui a perdu le plus de matchs en Ligue 1 après avoir ouvert le score depuis un an et demi : sept fois, dont quatre cette saison. C’est énorme. C’est surtout rageant, parce que ça montre une incapacité chronique à gérer les moments clés. Un but d’avance ? Trop souvent synonyme de panique plutôt que de maîtrise.
« Il faut arrêter les excuses, dire qu’on est jeunes et qu’on apprend : il faut gagner et c’est tout. Ce soir, c’est inacceptable. »
Liam Rosenior, en conférence d’après-match
Des décisions fortes qui marquent les esprits
Sortir Godo aussi vite, c’est un message envoyé à tout le vestiaire. Mais ce n’est pas un cas isolé. Lucas Högsberg avait déjà goûté à la médecine Rosenior : remplacé à la pause contre Lens, puis sorti avant la mi-temps en Conference League contre Crystal Palace. Félix Lemaréchal, lui, a été purement et simplement écarté du groupe à plusieurs reprises malgré de bons matchs par moments. Même Mathis Amougou, pressenti titulaire, s’est retrouvé hors de la feuille parce qu’il s’était plaint du dos à l’entraînement sans que ça justifie, selon le coach, de perturber la préparation.
Ces choix peuvent sembler brutaux. Ils le sont. Mais ils ont le mérite de la cohérence. Rosenior répète à l’envi que son exigence à l’entraînement est « immense ». Traduction : si tu baisses le pied, même cinq minutes, tu payes. Immédiatement. Et peu importe ton âge ou ton CV.
- 11 changements à la mi-temps en 14 journées : un record dans le vestiaire strasbourgeois
- Plusieurs joueurs laissés en tribune alors qu’ils étaient dans le groupe élargi la semaine précédente
- Des remplaçants sortis avant d’avoir vraiment joué
Les joueurs commencent à intégrer le message
Ce qui est intéressant, c’est que le discours commence à percoler chez les joueurs eux-mêmes. Après Lens, Mamadou Sarr lâchait déjà : « On apprend… mais j’en ai marre de répéter ça chaque semaine. » À la Meinau, Diego Moreira enfonçait le clou après le but de Magnetti : « Il y a des erreurs qu’on ne doit pas faire. On doit prendre de meilleures décisions. J’ai l’impression qu’on le dit chaque semaine. » Quand les acteurs sur le terrain se mettent à tenir le même langage que le coach, c’est que le virage est en train de s’opérer.
Car oui, il y a du talent dans cette équipe. Sebastian Nanasi, Andrey Santos, Diego Moreira, Ismaël Doukouré… la liste est longue. Le Racing a quatre points de plus qu’à la même époque l’an dernier. Le top 4 n’est qu’à quatre longueurs. Tout est encore possible. Mais pour y arriver, il faut arrêter de se tirer des balles dans le pied.
« On peut faire une super saison, peut-être atteindre le top 4. Il faut s’y mettre dès maintenant. »
Liam Rosenior
Un management à l’anglaise qui divise… mais qui peut payer
Évidemment, tout le monde n’adhère pas encore totalement. Dans les commentaires des supporters après le match, certains pointent déjà des choix tactiques discutables : ne pas faire entrer Moreira plus tôt, sortir Chilwell alors qu’il était le meilleur sur le terrain en première période… Les critiques existent, elles sont normales. Un coach qui secoue la baraque, ça dérange toujours un peu au début.
Moi je trouve ça plutôt sain. Strasbourg a trop longtemps joué la carte du « beau jeu » sans les résultats qui vont avec. Là, Rosenior impose une culture de la gagne, même si ça doit faire mal sur le moment. On l’a vu avec pas mal d’équipes anglaises ces dernières années : un management dur mais juste peut transformer une équipe moyenne en prétendant sérieux. Pourquoi pas le Racing ?
Après, attention. Il y a une frontière fine entre exigence et cassure. Si les résultats ne suivent pas rapidement, la méthode peut se retourner contre celui qui l’a mise en place. Mais pour l’instant, le message est clair : à Strasbourg, on arrête de se cacher derrière la jeunesse. On assume, on gagne, ou on s’assoit sur le banc. Point final.
Le prochain match va déjà être révélateur. Si l’équipe répond présent avec la même intensité mais plus de rigueur, Rosenior aura gagné son pari. Sinon… eh bien la Meinau risque de devenir encore plus chaude. Mais une chose est sûre : avec ce virage à 180°, le RC Strasbourg version 2025-2026 ne laissera personne indifférent.
Et vous, vous en pensez quoi ? Ce management à l’anglaise, c’est ce qu’il manquait au Racing ou ça risque de faire imploser le vestiaire ? Les paris sont ouverts.
(Article mis à jour le 1er décembre 2025 – environ 3200 mots)
