Vous vous souvenez de l’époque où les Lions Indomptables faisaient trembler l’Afrique entière avec leur rage et leur talent brut ? Aujourd’hui, à vingt jours du début de la CAN 2025, c’est plutôt la fédération camerounaise qui ressemble à un ring de boxe. Et franchement, on n’aurait jamais imaginé un tel feuilleton à l’approche d’une compétition aussi majeure.
Samuel Eto’o, réélu à la tête de la Fecafoot, a décidé de faire place nette. Et quand je dis place nette, ce n’est pas une image : le sélectionneur belge Marc Brys a été remercié sans ménagement, et plusieurs cadres historiques ont purement et simplement disparu de la liste. On parle quand même d’André Onana, Vincent Aboubakar et Éric-Maxim Choupo-Moting. Trois monstres qui totalisent plus de 240 sélections. Autant dire que le vestiaire risque de sentir la poudre.
Le Cameroun à l’aube d’une révolution ou d’un suicide sportif ?
Il y a des moments où le football dépasse le simple terrain. On est clairement dans cette situation. Ce qui se passe au Cameroun en ce moment, c’est un mélange explosif de pouvoir, d’ego et de vision radicalement différente de ce que doit être une sélection nationale.
Marc Brys, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase
Rappelez-vous : en avril dernier, le ministère des Sports nommait Marc Brys sans consulter la fédération. Pour Samuel Eto’o, c’était une déclaration de guerre. S’en sont suivies des mois de tensions, de déclarations à fleurets mouchetés, puis de plus en plus à visage découvert. Le Belge avait même annoncé sa démission… avant de se raviser quelques heures plus tard. On pensait l’affaire enterrée. Raté.
Désormais, c’est officiel : Brys n’est plus le patron des Lions. À la place, David Pagou, fidèle lieutenant de l’ancien staff, prend les rênes avec Martin Ndtoungou Mpilé comme adjoint. Deux hommes de l’intérieur, deux profils discrets. Est-ce le bon choix à trois semaines d’une CAN ? La question mérite d’être posée, même si je comprends l’envie de retrouver une certaine cohérence fédérale.
« Je ne vais pas me laisser faire comme ça. C’est ridicule et totalement illégal. »
Marc Brys, quelques heures après l’annonce de son limogeage
Onana, Aboubakar, Choupo-Moting : pourquoi tant de stars dehors ?
C’est là que ça devient vraiment intéressant – et inquiétant. André Onana reste l’un des tous meilleurs gardiens africains. Vincent Aboubakar est le capitaine, buteur en série, symbole vivant des sacres passés. Quant à Choupo-Moting, son expérience en sélection et en clubs reste précieuse.
Alors pourquoi les mettre à l’écart ? Officiellement, on parle de « choix sportifs ». Mais entre nous, tout le monde sait que les relations étaient devenues exécrables avec une partie du vestiaire et surtout avec le président Eto’o. Des histoires de leadership, d’influence, de prises de position publiques… Le genre de choses qui peuvent pourrir une ambiance pendant des mois.
- André Onana : 40 sélections, titulaire à Manchester United
- Vincent Aboubakar : capitaine, 102 sélections, 42 buts
- Éric-Maxim Choupo-Moting : 76 sélections, expérience en Ligue des Champions
En les écartant, le Cameroun se prive d’un capital expérience colossal. À titre de comparaison, l’Égypte aligne encore Salah, le Sénégal garde Mané, le Maroc construit autour de Hakimi. Le Cameroun, lui, choisit la rupture totale.
Une nouvelle génération pour porter les espoirs
Mais attention, ce n’est pas non plus une équipe de juniors qui va débarquer au Maroc. La liste comporte de sacrés talents, et certains sont en train d’exploser au plus haut niveau.
Bryan Mbeumo d’abord. Le mec est en train de mettre la Premier League à feu et à sang cette saison. Vitesse, technique, finition : il a tout. Carlos Baleba, le jeune milieu de Lille, apporte une intensité folle. Christopher Wooh, Jean-Charles Castelletto, Georges-Kévin Nkoudou… Il y a du potentiel, clairement.
- Bryan Mbeumo – en feu en Angleterre
- Carlos Baleba – le nouveau patron du milieu
- Christopher Wooh – solidité défensive
- Georges-Kévin Nkoudou – vitesse sur les ailes
- Jean-Charles Castelletto – expérience en Ligue 1
Est-ce suffisant pour jouer le titre ? Franchement, c’est osé. Très osé même. Mais parfois, un bon coup de balai peut réveiller une équipe. On l’a vu avec d’autres nations par le passé.
Samuel Eto’o : visionnaire ou président toxique ?
On ne peut pas parler de cette crise sans parler de l’éléphant dans la pièce : Samuel Eto’o. Légende absolue du foot africain, double vainqueur de la CAN comme joueur, il veut maintenant marquer l’histoire comme dirigeant.
Pour certains, c’est un président courageuin qui impose enfin son autorité et qui refuse les compromissions. Pour d’autres, c’est un dirigeant autoritaire qui place ses intérêts personnels avant ceux de l’équipe nationale. La vérité, comme souvent, est probablement entre les deux.
Ce qui est sûr, c’est qu’Eto’o ne fait jamais dans la demi-mesure. Il a promis de remettre de l’ordre et de redonner fierté aux Camerounais. Pour l’instant, il divise profondément. Mais dans trois semaines, si les Lions surprennent tout le monde, il deviendra le héros qui a eu raison contre tous.
Et maintenant ? Les scénarios possibles
On va être honnête : il y a plusieurs issues possibles, et aucune n’est à exclure.
Scénario 1 : le fiasco. Une équipe désunie, des joueurs démotivés, une élimination précoce. Eto’o deviendra alors le bouc émissaire parfait.
Scénario 2 : la réconciliation express. Certains cadres reviennent, on trouve un compromis, et le Cameroun joue libéré. Ça s’est déjà vu.
Scénario 3 : la surprise totale. La nouvelle génération prend le pouvoir, joue sans pression et crée l’exploit. Ce serait magnifique.
Moi, j’ai tendance à penser qu’on sous-estime la capacité de résilience de cette équipe. Le Cameroun a toujours eu ce truc en plus dans les grandes compétitions. Même au bord du gouffre.
Ce que cette crise dit du football africain
Au-delà du Cameroun, cette situation est révélatrice d’un mal plus profond. Entre les fédérations, les ministères des Sports et les anciens glorieux reconvertis en dirigeants, les luttes de pouvoir sont légion. On l’a vu avec la Côte d’Ivoire avant son titre en 2024, avec le Nigeria à plusieurs reprises, avec le Ghana aussi.
Le football africain produit des talents exceptionnels, mais il reste souvent prisonnier de ses querelles internes. Et pourtant, quand tout s’aligne, les résultats sont là. La CAN 2025 nous dira si le Cameroun a réussi à transformer sa crise en force ou si elle l’aura définitivement coulé.
Une chose est sûre : on n’a jamais vu un tel niveau de tension à l’approche d’une Coupe d’Afrique. Et paradoxalement, c’est peut-être ce qui rend cette édition si excitante. Parce que dans le chaos, parfois, naissent les plus belles histoires.
Le 20 décembre, quand le Cameroun entrera sur le terrain pour son premier match, des millions de supporters retiendront leur souffle. Peu importe le résultat, cette équipe entrera déjà dans l’histoire. Soit comme celle qui a su renaître de ses cendres… soit comme le plus grand gâchis de ces dernières années.
Le football, finalement, c’est ça : des drames, des passions, des paris fous. Et le Cameroun, en ce moment, incarne tout ça à la perfection.
