Vous vous souvenez de ce sentiment quand vous regardiez les gamins de la génération 2004 du PSG et que vous vous disiez « celui-là, c’est le prochain crack » ? Moi oui. Et parmi eux, il y en avait un qui faisait l’unanimité absolue : Ayman Kari. Technique soyeuse, volume de jeu impressionnant, vision, projection… Tout. Absolument tout. On murmurait même dans les couloirs qu’il était un cran au-dessus de Warren et de certains Portugais qu’on voit aujourd’hui à 100 millions. Et puis, un jour, plus rien. Le silence. Comme si le foot l’avait tout simplement avalé avant de le recracher. À 21 ans seulement.
Le prodige qu’on annonçait plus fort que tout le monde
Remontons un peu le temps. Octobre 2022, Youth League, PSG contre Benfica. Sur le papier, un match comme un autre. En réalité, un duel de monstres au milieu. D’un côté Joao Neves, déjà suivi par tout le continent. De l’autre, Ayman Kari. Et ce jour-là, pour beaucoup de recruteurs présents, il n’y avait pas photo : le Parisien était plus fort. Plus complet. Plus élégant.
« À l’époque, quand tu voyais sa technique, son abattage, sa capacité à se projeter et ses qualités athlétiques, tu te disais que celui qui irait le plus haut, c’était Ayman. Il avait tout. Vraiment tout. »
Un scout d’un très grand club européen
Ce n’est pas une opinion isolée. À la fédé, au PSG, partout, on parlait de lui comme du joyau brut le plus brillant de sa génération. Manchester City et le Bayern se déplaçaient pour le voir. Il choisit pourtant de rester, signe un premier contrat pro juteux en 2022. Tout semblait écrit.
Le premier prêt à Lorient : le début des fissures
Le haut niveau, ça ne pardonne pas. Et parfois, ça cogne plus fort quand tu viens d’un cocon comme le centre de formation parisien. Direction la Bretagne, le FC Lorient, pour découvrir la réalité du métier. Là, première claque : le rythme, la diète, l’autonomie, la pression d’un club qui se bat pour le maintien. Ayman joue, 19 matchs de Ligue 1 sur deux saisons, mais quelque chose se grippe.
On le décrit parfois nonchalant, pas toujours irréprochable sur l’hygiène de vie. Rien de dramatique, hein, on parle d’un gamin de 18-19 ans qui quitte le nid pour la première fois. Mais déjà, certains sentent que le plaisir n’est plus le même. Qu’il doit aller chercher le joueur, qu’il ne vient plus naturellement comme avant avec les potes du centre.
Retour à Paris : la douche froide de l’été 2024
L’été 2024, Luis Campos croit encore dur comme fer en lui. Luis Enrique aussi. On parle d’un milieu ultra-complet, capable de tout faire. Les premières séances de reprise arrivent… et là, c’est le choc. Huit à dix kilos en trop. Le corps ne suit plus le talent. L’attitude pose question. Le staff décide de le renvoyer chez les Espoirs. Pour un gamin habitué à être sur un piédestal depuis ses 12 ans, c’est une gifle monumentale.
À partir de là, tout s’effondre très vite. Il commence à sécher des entraînements. Ne répond plus aux messages. Disparaît progressivement des radars. Même ses anciens coéquipiers n’ont plus de ses nouvelles. En janvier 2025, Saint-Étienne se renseigne, mais recule en voyant la silhouette. Le message est clair : le foot pro, pour l’instant, c’est fini.
Ce n’est pas une question d’argent ni de dégoût
« Ce n’est ni l’argent ni un dégoût, c’est une décision personnelle d’un jeune homme qui estime qu’il n’est pas fait pour ce monde professionnel là. Une réflexion profonde, qui vient de loin. »
Un très proche d’Ayman Kari
C’est probablement la phrase qui résume le mieux la situation. On a envie de chercher des drames, des scandales, des blessures cachées. Mais non. Juste un garçon de 21 ans qui, après avoir goûté à tout ce que le foot pro demande comme sacrifices, s’est dit stop. Pas envie. Pas capable. Pas pour moi.
Et franchement, qui sommes-nous pour le juger ? On idéalise souvent ces gamins, on les met sur un piédestal dès 15 ans, on leur promet la lune, mais on oublie qu’ils restent des ados. Avec leurs doutes, leurs fragilités, leur besoin parfois de vivre simplement.
Le poids d’une génération dorée qui peut écraser
Être né en 2004 au PSG, c’est à la fois une chance énorme et une malédiction. Tu grandis avec Warren Zaïre-Emery qui devient capitaine à 17 ans, Senny Mayulu qui tape dans l’œil de Luis Enrique, Ethan Mbappé qui monte, et toi tu es censé suivre le même rythme. Sauf que tout le monde n’a pas la même maturité, le même mental d’acier, la même capacité à encaisser la pression.
- Warren : leader naturel dès 10 ans
- Senny : calme, bosseur, toujours propre
- Ayman : talent pur, mais enfant dans l’âme, besoin de plaisir et de potes avant tout
Zoumana Camara, qui l’a entraîné chez les U19, le dit avec beaucoup de tendresse : il fait partie des joueurs les plus talentueux qu’il ait eus. Mais le haut niveau demande une solidité mentale que tout le monde n’a pas. Et ça, personne ne peut l’apprendre à ta place.
Et maintenant ? Retour possible ou vie « normale » ?
Aujourd’hui, Ayman vit à Villejuif avec ses potes d’enfance. Il va bien, disent ceux qui le croisent. Il profite, respire, redécouvre une vie sans planning, sans pesée, réveil à 6h30 et pression médiatique. Son contrat pro lui assure une sécurité financière pour plusieurs années. Il pourrait reprendre plus tard, en Arabie, au Qatar, ou dans un championnat plus cool. Ou ne jamais reprendre.
Ce qui est sûr, c’est qu’on n’a pas fini d’entendre parler de lui. Soit parce qu’il reviendra et fera taire tout le monde (beaucoup l’espèrent encore), soit parce que son histoire deviendra le symbole d’une génération sacrifiée sur l’autel de la performance précoce. Dans les deux cas, elle nous rappelle une chose essentielle : le talent ne suffit pas toujours. Parfois, il faut aussi avoir envie de se battre tous les jours. Et ça, personne ne peut le forcer.
Ayman Kari, on te souhaite surtout d’être heureux. Le reste… on verra bien.
