Il y a des nuits où tout bascule en quelques minutes. Une soirée entre potes, un peu d’alcool, de la musique trop forte, et puis soudain le silence absolu d’un corps qui ne rentrera jamais chez lui. C’est exactement ce qui s’est passé à Brest dans la nuit du 28 au 29 novembre dernier.
Je me souviens encore de la première fois où j’ai lu les détails. Une traînée de sang de 45 mètres sur le bitume d’un parking. Quarante-cinq mètres. Ce chiffre m’a glacé. On parle d’un être humain traîné comme un vulgaire sac.
Un drame qui commence par un simple appel pour tapage
Tout débute en fin de soirée. Des riverains, excédés par le bruit, composent le 17. Un groupe de jeunes fait la fête sur un parking, musique à fond, voix qui portent, bouteilles qui s’entrechoquent. Classique.
Les policiers arrivent, rappellent tout le monde à l’ordre. Les jeunes rangent, promettent de partir, l’équipage repart. Rien d’une intervention banale qui en cache une autre, bien plus tragique, quelques heures plus tard.
Parce que, vers minuit, un nouveau coup de fil tombe : il y a un corps inanimé sur ce même parking. Quand les secours arrivent, c’est déjà trop tard.
Une scène qui marque les esprits
Les premiers témoins parlent d’une vision d’horreur. Le jeune homme gît au sol, entouré d’une immense flaque de sang. Mais le plus terrifiant, c’est cette trace continue, nette, qui part de très loin et aboutit jusqu’à lui.
Quarante-cinq mètres exactement. Les enquêteurs n’ont même pas besoin de chercher longtemps pour comprendre le scénario : la victime a été percutée de plein fouet par un véhicule, puis traînée sur le sol alors que la voiture continuait sa route.
« Les lésions sont compatibles avec un choc violent suivi d’un traînage prolongé »
Conclusion principale de l’autopsie
L’autopsie, pratiquée dès le lundi suivant, confirmera les pires craintes : fractures crâniennes multiples, ecchymoses sur tout le corps, érosions cutanées profondes là où le bitume a littéralement arraché la peau. Un décès particulièrement violent.
L’enquête passe en mode homicide volontaire
Dès le lendemain matin, le parquet ouvre une enquête en flagrance pour homicide volontaire. Pas d’accident, pas de suicide : on cherche un conducteur qui a délibérément foncé et qui, pire, n’a pas arrêté son véhicule après le choc.
La division criminelle prend le dossier en main. Caméras de vidéosurveillance, relevés d’empreintes, analyse des traces de pneus, auditions à la chaîne. Le genre d’enquête où chaque minute compte.
- Audition des témoins présents sur le parking avant le drame
- Analyse des téléphones portables (géolocalisation, messages)
- Recherche du véhicule impliqué (peinture, débris)
- Exploitation des caméras de la ville
Pendant quarante-huit heures, deux proches de la victime – son frère et un ami – sont placés en garde à vue. Ils étaient là, ils avaient bu comme les autres. Mais rapidement, les enquêteurs comprennent qu’ils n’y sont pour rien. Les mesures sont levées. Le vrai cercle des suspects est ailleurs.
Le tournant : trois gardes à vue décisives
Lundi soir, coup de théâtre. Trois personnes sont interpellées et placées en garde à vue. On ne connaît pas encore leur lien exact avec la victime ni le mobile précis, mais le fait qu’elles soient toujours entendues ce mardi matin en dit long : les enquêteurs tiennent quelque chose de solide.
Est-ce une dispute qui a dégénéré après le départ des policiers ? Une mauvaise blague qui a mal tourné ? Une vengeance ? L’alcool a-t-il transformé une soirée anodine en cauchemar ? Toutes les pistes restent ouvertes.
Ce que l’on sait déjà, c’est que le conducteur (ou la conductrice) a pris la fuite après avoir traîné un corps sur 45 mètres. Quarante-cinq mètres où chaque seconde supplémentaire était une chance de s’arrêter et de porter secours. Il ou elle ne l’a pas fait.
Ces parkings, lieux de tous les excès
Ce drame met une nouvelle fois en lumière un phénomène qu’on préfère souvent ignorer : les parkings souterrains ou déserts deviennent, la nuit venue, des zones de non-droit temporaires. Pas de caméra partout, peu de passage, acoustics qui portent loin… L’endroit parfait pour faire la fête sans déranger trop de monde, mais aussi le lieu idéal pour que les choses dérapent très vite.
J’ai déjà vu ça ailleurs : une simple soirée qui finit en bagarre, un accident, un règlement de comptes. L’alcool désinhibe, la nuit rend invisible, et parfois une vie s’arrête bêtement.
On parle beaucoup de la violence dans les quartiers sensibles, mais ces parkings “neutres” concentrent aussi leur lot de drames silencieux. Personne ne les voit venir.
Et maintenant ?
Les trois gardés à vue peuvent être maintenus 48 heures, voire 96 en matière criminelle. Autant dire que les prochaines heures vont être décisives.
On attend surtout de savoir :
- Qui était au volant ?
- Y avait-il des passagers qui n’ont rien fait pour arrêter le véhicule ?
- Quel était le mobile (ou l’absence de mobile, ce qui serait encore plus terrifiant) ?
- La victime et ses bourreaux se connaissaient-ils ?
Une chose est sûre : quand on traîne quelqu’un sur 45 mètres, on sait parfaitement ce qu’on fait. Ce n’est pas un “accident” au sens classique du terme.
Ce genre d’histoire nous laisse toujours un goût amer. Parce qu’on se dit qu’avec un peu moins d’alcool, un peu plus de surveillance, un peu de bon sens, ce jeune homme de 24 ans serait encore là aujourd’hui.
Mais aussi parce qu’on sait que, quelque part dans Brest, trois personnes sont en train de comprendre que leur vie vient de basculer pour toujours. Et qu’une famille pleure un fils, un frère, un ami, parti bien trop tôt, dans des conditions qu’aucun parent ne devrait jamais avoir à imaginer.
Au moment où j’écris ces lignes, l’enquête se poursuit. Et quelque part, sur ce parking, la traînée de sang a été nettoyée. Mais la trace qu’elle a laissée dans les mémoires, elle, ne s’effacera jamais.
(Article mis à jour en fonction des éléments disponibles au 2 décembre 2025 – l’enquête est en cours et de nouveaux développements peuvent survenir à tout moment.)
