Vous est-il déjà arrivé de suivre un débat budgétaire en vous disant que ça ressemblait à une partie d’échecs géante où personne ne veut vraiment perdre ? Moi oui, et en ce moment, c’est exactement l’ambiance au Palais-Bourbon.
On est début décembre 2025, le thermomètre politique est au rouge, et pourtant, la présidente de l’Assemblée nationale garde un calme olympien. Elle le répète à qui veut l’entendre : oui, un accord est possible. Oui, le Parlement peut voter un budget sans que le gouvernement dégaine l’arme lourde. Et franchement, après des mois de chaos post-dissolution, ça fait du bien d’entendre quelqu’un parler de compromis comme d’une évidence.
Le pari audacieux : faire vivre le débat plutôt que l’étouffer
Mercredi, le Premier ministre a surpris tout le monde en annonçant qu’il n’utiliserait pas le 49.3, du moins pas tout de suite. Un choix courageux quand on sait qu’il n’a pas de majorité absolue. Le lendemain matin, la présidente de l’Assemblée enfonce le clou sur un plateau télé : il faut donner sa chance au débat parlementaire. Point final.
Pour elle, c’est presque une question de principe. Utiliser l’article 49 alinéa 3 dès le départ, ce serait dire aux Français que leurs élus ne sont pas capables de discuter. Et ça, elle refuse.
« Il y a ceux qui considèrent que l’Assemblée nationale ne doit pas voter. Je pense qu’ils ont tort. »
La phrase est cinglante, et elle vise directement certains poids lourds de la droite qui agitent le spectre du passage en force. Elle ajoute même, avec un sourire en coin qu’on imagine, qu’ils ne siègent pas dans l’hémicycle, donc ils ne voient pas ce qui s’y passe vraiment.
L’hémicycle plus vivant qu’on ne le croit
Et là, surprise : selon elle, ça bosse dur dans la salle. Les députés discutent, négocient, votent même des amendements. Il y a du monde, l’ambiance est studieuse. Bref, on est loin du cirque qu’on nous décrit parfois.
J’ai suivi quelques séances ces derniers jours, et je dois dire qu’elle n’a pas tout à fait tort. Entre deux éclats de voix, on sent que certains cherchent vraiment la sortie par le haut. Reste à savoir si ça suffira.
Les Républicains entre fermeté et pragmatisme
Côté LR, c’est plus tendu. Plusieurs figures historiques réclament ouvertement le retour du 49.3. Leur argument ? Sans majorité claire, on perd du temps, et le pays a besoin d’un budget rapidement. Logique, sur le papier.
Mais à l’Assemblée, la musique est différente. Beaucoup de députés de droite modérée sont prêts à discuter, à condition que leurs lignes rouges soient respectées (retraites, baisse des dépenses, etc.). Le compromis n’est pas un gros mot pour tout le monde.
- Ils veulent des gages sur les économies ? Possible.
- Ils exigent le maintien de certaines réformes ? Négociable.
- Mais s’ils campent sur des positions maximalistes, ça bloque.
C’est tout l’enjeu des prochains jours.
Et dans le camp présidentiel, ça grince aussi
Parce qu’il n’y a pas que la droite qui fait des manières. À l’intérieur même de la majorité relative, ça coince. Le groupe Horizons, notamment, trouve le projet de loi de financement de la Sécurité sociale trop light, pas assez ambitieux sur les économies.
Message reçu cinq sur cinq par la présidente : laisse le débat se faire. Traduction : arrêtez de saborder avant même d’avoir essayé de construire.
« Il faut accepter des concessions. Depuis la dissolution, il n’y a pas de majorité, donc pas de budget parfait. »
Un poids lourd du camp présidentiel, en substance
La phrase est rude, mais réaliste. On n’est plus en 2017 avec 350 députés dans la poche. On est dans une toute autre configuration.
Le calendrier infernal qui attend les députés
Maintenant, place aux choses sérieuses. Les débats s’enchaînent jusqu’à dimanche soir. Ensuite, vote sur la partie recettes du budget de la Sécu dès jeudi ou vendredi, puis le texte complet mardi 10 décembre au plus tard.
Autant dire que chaque heure compte. Un amendement mal négocié, une déclaration trop raide, et tout peut basculer. L’inverse est vrai aussi : un geste d’ouverture au bon moment, et on décroche peut-être le Graal.
Ce qui est sûr, c’est que les Français regardent. Et ils en ont marre des blocages à répétition. Un budget voté normalement, ce serait déjà une petite victoire démocratique.
Pourquoi ce budget 2026 est un test grandeur nature
Au-delà des chiffres, c’est toute la capacité du système politique actuel à fonctionner qui est en jeu. Depuis les législatives de 2024 et la dissolution, on navigue à vue. Chaque texte majeur devient un référendum sur la survie du gouvernement.
Si ça passe sans 49.3, ça prouvera qu’une majorité de circonstance peut exister, texte par texte. Si ça bloque, on repartira dans le cycle infernal : censure, chute du gouvernement, nouvelles élections ? Personne n’en veut vraiment.
D’où l’insistance de la présidente de l’Assemblée : le compromis dépend de nous. Pas de Bruxelles, pas des marchés, pas des commentateurs. De nous, élus et responsables politiques.
Et nous, dans tout ça ?
On peut critiquer les postures, les ego, les petites phrases. Mais il faut aussi reconnaître une chose : pour la première fois depuis longtemps, on a peut-être une fenêtre pour que le Parlement redevienne un vrai lieu de délibération.
Ce n’est pas sexy, ça ne fait pas la une des réseaux sociaux, mais c’est essentiel. Un budget voté après des jours de débat, avec des concessions des deux côtés, ce serait une respiration dans une Ve République souvent étouffée par l’hyper-exécutif.
Alors oui, le risque d’échec existe. Oui, certains préfèreraient le 49.3 pour aller plus vite. Mais tenter le coup, essayer de construire plutôt que de détruire, ça vaut le détour.
On saura d’ici quelques jours si la conviction de la présidente de l’Assemblée était fondée. En attendant, une chose est sûre : on vit un moment politique rare. Un de ceux dont on se souviendra, dans un sens ou dans l’autre.
Et vous, vous y croyez à ce compromis ? Ou vous pensez que ça finira comme d’habitude ? Dites-le moi en commentaire, j’ai hâte de lire vos avis. Parce que finalement, c’est aussi de ça dont il s’agit : redonner la parole, y compris à ceux qui regardent de loin.
