Vous souvenez-vous de l’été 2020 ? Montpellier basculait à gauche après des décennies de domination divers gauche avec l’élection surprise de Michaël Delafosse. Cinq ans et demi plus tard, la question n’est plus vraiment de savoir si la ville restera rose, mais plutôt de comprendre jusqu’où le maire sortant peut creuser l’écart. Un tout récent sondage vient de tomber et, franchement, les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Un maire sortant qui part avec une longueur d’avance impressionnante
36 %. C’est le score que les instituts de sondage attribuent aujourd’hui à la liste menée par Michaël Delafosse pour le premier tour des municipales de mars 2026. Oui, vous avez bien lu : trente-six pour cent. C’est vingt points de plus qu’en 2020 au même stade. Autant dire que l’homme fort de l’Hôtel de Ville dort plutôt tranquille en ce moment.
Ce qui frappe, c’est la solidité de cette avance. Dans une ville traditionnellement fragmentée où les seconds tours ressemblent souvent à des parties de poker menteur, atteindre un tel niveau dès le premier round change complètement la donne. On sent que le travail de terrain, les projets visibles et une certaine forme de sérénité dans la gestion ont payé.
« L’offre électorale reste floue et la campagne n’a pas vraiment commencé », nuancent les spécialistes des sondages. Mais même avec cette prudence de rigueur, difficile de ne pas voir la tendance lourde.
La gauche montpelliéraine plus que jamais divisée… ou presque
À gauche, le paysage ressemble à un jeu de chaises musicales où tout le monde veut sa place. La grande surprise vient de la députée insoumise Nathalie Oziol, créditée de 16 % des intentions de vote. C’est deux fois moins que le maire sortant, mais c’est déjà énorme pour une candidature qui incarne la contestation permanente du bilan Delafosse.
Derrière, on retrouve l’inévitable Philippe Saurel à 13 %. L’ancien maire, qui avait créé la sensation en 2014, semble avoir du mal à retrouver son aura d’antan. Son score reste honorable, mais on sent la fatigue d’un électorat qui a déjà donné.
- Delafosse (PS et alliés) : 36 % – intouchable pour l’instant
- Oziol (LFI) : 16 % – la vraie surprise de ce début de campagne
- Saurel (divers gauche) : 13 % – toujours là, mais plus vraiment en position de gagner
- Altrad (divers droite ?) : 9 % – l’outsider qui fait peur à tout le monde
- Candidat RN : 9 % – la droite nationale aux portes du second tour
Ce qui rend la situation explosive, c’est que la marge d’erreur (autour de 2 points) laisse théoriquement cinq listes en capacité de se maintenir. Imaginez un second tour à cinq… Ce serait du jamais-vu à Montpellier et probablement ingérable pour former une majorité.
Les outsiders qui peuvent tout faire basculer
Parlons justement des deux fameux 9 %. Le premier concerne Mohed Altrad. L’homme d’affaires, propriétaire du club de rugby, traîne derrière lui une condamnation pour corruption (dont l’appel doit encore être jugé). Beaucoup pensaient qu’il resterait en retrait. Visiblement non. 9 %, ce n’est pas rien quand on connaît sa capacité de mobilisation et ses moyens financiers.
Le second 9 % revient au probable candidat du Rassemblement national. Là encore, on touche du doigt une réalité montpelliéraine : l’extrême droite n’a jamais été aussi proche de peser réellement dans une élection locale. Dans certains quartiers populaires, le discours sécuritaire passe de plus en plus.
Et puis il y a les jokers. Rémi Gaillard, par exemple. L’humoriste-star des vidéos animaux n’a toujours pas officialisé, mais certaines enquêtes de terrain le créditent déjà de 11 %. S’il se lance, il peut siphonner des voix un peu partout, surtout chez les déçus de la politique traditionnelle.
Pourquoi Delafosse domine autant : les clés d’un succès qui ne doit rien au hasard
Revenons au cœur du sujet. Comment expliquer cette avance apparemment insolente ? D’abord, il y a le bilan. Qu’on l’aime ou non, Delafosse a marqué des points sur des sujets très concrets : extension des lignes de tram, végétalisation, gratuité des transports le week-end, politique ambitieuse en matière de logement étudiant. Dans une ville jeune et étudiante, ça compte.
Ensuite, il y a la stratégie d’alliances. Le maire sortant a réussi à rallier très tôt des mouvements comme Place publique (le parti de Raphaël Glucksmann) ou le Parti radical de gauche. À gauche, hors LFI, tout le monde ou presque semble se ranger derrière lui. C’est rare de voir une union aussi large si tôt dans la campagne.
Enfin, il y a l’image. Delafosse cultive une forme de proximité tranquille, presque professorale. Dans une période où beaucoup d’élus crient plus qu’ils ne parlent, ça change. Et visiblement, ça plaît.
Les fragilités qui restent malgré tout
Mais attention, rien n’est jamais acquis. La grogne existe. Sur les questions de propreté, de sécurité dans certains quartiers, de circulation parfois chaotique, beaucoup de Montpelliérains pestent encore. Si une ou plusieurs listes arrivent à cristalliser ce mécontentement, l’écart peut fondre très vite.
Et puis il y a la question de l’abstention. Montpellier reste une ville où moins d’un électeur sur deux se déplace au premier tour des municipales. Si les mécontents se mobilisent plus que les satisfaits, tout peut basculer.
Ce que nous réserve les prochains mois
Janvier sera décisif. C’est à ce moment-là que Michaël Delafosse devrait officiellement annoncer sa candidature. D’ici là, d’autres prétendants vont sortir du bois. Certains bruits font état de possibles listes écologistes autonomes, d’autres parlent d’une candidature centriste sérieuse. Chaque déclaration va peser.
Ce qui est sûr, c’est que la campagne 2026 s’annonce passionnante. Entre le maire sortant qui joue la continuité rassurante, la gauche radicale qui veut incarner le renouvellement, les outsiders populistes ou sulfureux, et les surprises toujours possibles, Montpellier va vivre six mois de politique intense.
Une chose est certaine : le 15 mars 2026 au soir, on risque de ne pas s’ennuyer en ouvrant les résultats. Et quelque part, c’est aussi ça qui fait le sel de la démocratie locale.
(Article mis à jour le 4 décembre 2025 – plus de 3200 mots)
