Imaginez la scène. Juin 2026, votre ado ouvre les résultats du bac. Il était à 11,8… et cette année, pas de miracle. Pas de « coup de pouce » magique du jury pour arrondir à 12. Pour la première fois depuis longtemps, il faut vraiment avoir la moyenne, point. Et pour la mention ? Il fallait être vraiment solide. Finies les mentions à la pelle. C’est exactement ce qui risque d’arriver.
Un décret tout frais, publié ce 5 décembre 2025, vient de mettre un sérieux coup de frein aux petites largesses dont bénéficiaient les candidats jusqu’ici. Et croyez-moi, ça fait déjà beaucoup parler dans les couloirs des lycées et les groupes WhatsApp des parents.
Le bac ne sera plus jamais comme avant
Depuis la réforme de 2019, le bac nouvelle formule repose à 40 % sur le contrôle continu et 60 % sur les épreuves terminales. Jusque-là, tout le monde s’était habitué à un taux de réussite frôlant les 95 % et surtout à une inflation spectaculaire des mentions. En 2025, près de 59 % des bacheliers généraux ont décroché une mention, dont plus de 13 % avec très bien. En 1997 ? À peine plus d’un pour cent. On est passé d’une récompense rare à un phénomène de masse.
Mais voilà, ce que certains appellent « générosité » ressemble pour d’autres à une perte de crédibilité. Et c’est précisément cet argument qui a poussé le ministère à serrer la vis.
Qu’est-ce qui change exactement ?
Le décret limite fortement ce qu’on appelle les « délibérations du jury ». Avant, quand un candidat était juste en-dessous de la moyenne ou d’une mention, le jury pouvait, sous certaines conditions, lui accorder quelques dixièmes, parfois un point entier. C’était officiel, encadré, mais ça arrivait très souvent.
Désormais ? Les critères sont drastiques :
- Le « rattrapage » pour obtenir le bac est limité à des écarts très faibles (généralement 0,5 point maximum).
- Les mentions ne pourront quasiment plus être attribuées « par harmonisation ».
- Seules des situations exceptionnelles (erreur matérielle, maladie grave prouvée) resteront prises en compte.
- Les jurys auront l’obligation de justifier toute bonification… et seront contrôlés.
En clair : fini le petit coup de pouce « parce qu’il a bien bossé toute l’année » ou « parce qu’il était à 0,3 point ». Il faudra avoir les points, vraiment.
« L’objectif est de redonner toute sa valeur au baccalauréat comme diplôme national et premier grade universitaire »
Un haut responsable du ministère, en substance
Pourquoi maintenant ?
Franchement, ça couvait depuis longtemps. À force de voir des mentions « très bien » pleuvoir (parfois avec des notes à 16,1 obtenues après harmonisation), les universités étrangères rigolaient doucement quand elles recevaient des dossiers Parcoursup. Même en France, certains recruteurs commençaient à se dire que la mention, finalement, ne voulait plus dire grand-chose.
Et puis il y a la question de l’équité. Entre un lycéen qui passe dans un établissement où le contrôle continu est généreux et un autre dans un lycée plus sévère, les écarts étaient parfois énormes. Le ministère veut remettre de l’ordre là-dedans.
Personnellement, je trouve que c’est une bonne chose sur le principe… mais le timing est rude. Annoncer ça en décembre 2025 pour une application dès juin 2026, c’est un peu violent pour les terminales actuelles qui avaient intégré la « souplesse » dans leur stratégie.
Quelles conséquences concrètes pour les candidats 2026 ?
Préparez-vous à un choc statistique.
- Le taux de réussite global pourrait descendre sous les 90 % pour la première fois depuis très longtemps.
- Le nombre de mentions « très bien » en voie générale pourrait être divisé par deux, voire plus.
- Les mentions « bien » et « assez bien » vont aussi fondre, surtout celles obtenues à l’arrachée.
- Les candidats « borderline » (entre 11,5 et 12 ou entre 13,8 et 14) seront les plus touchés.
Pour vous donner un ordre d’idée : en 2025, des milliers de lycéens ont obtenu leur mention grâce à 0,5 ou 1 point offert par le jury. En 2026, ces points-là ne viendront plus.
Et sur Parcoursup ? Une mention en moins, c’est parfois la différence entre une prépa prestigieuse ou une fac moins sélective. Les élèves de terminale le savent très bien, et ça commence à stresser sévère.
Les profs et les syndicats disent quoi ?
Forcément, ça gronde. Beaucoup d’enseignants y voient une mesure punitive déguisée. « On nous demande de préparer des élèves dans un système ultra-stressant, et maintenant on leur retire la carotte de la mention ? » m’a confié récemment une prof de philo blasée.
D’autres, au contraire, applaudissent. Un proviseur d’un grand lycée parisien me disait il y a quelques jours : « Enfin ! On va arrêter de prendre les parents et les élèves pour des idiots. Une mention doit redevenir quelque chose d’exceptionnel. »
Et les élèves, dans tout ça ?
Sur les réseaux, c’est la panique douce. Entre ceux qui hurlent à l’injustice (« on change les règles en cours de route ») et ceux qui relativisent (« de toute façon, il fallait bosser »), on sent une génération qui réalise que le bac redevient un vrai examen.
Ce qui est sûr, c’est que la pression va monter d’un cran. Les spécialités abandonnées en première, le choix parfois hasardeux des coefficients… tout va peser plus lourd. Le contrôle continu ? Il va falloir cartonner toute l’année, parce que la bouée de sauvetage du jury ne sera plus là.
Mon avis (puisqu’on est entre nous)
Je vais être honnête : je suis partagé.
D’un côté, je trouve ça sain. Le bac avait perdu de sa superbe. À force de tout lisser, on en faisait un non-événement. Redonner du poids aux notes, c’est redonner du poids au travail fourni.
De l’autre… je pense aux gamins qui vont se retrouver à 11,7 parce qu’ils ont eu un 8 en philo au lieu de 10, et qui n’auront plus aucune marge. C’est dur, surtout quand on sait que les programmes sont chargés et que la santé mentale des lycéens est déjà fragile.
Mais bon, peut-être que c’est le prix à payer pour retrouver un diplôme qui fasse vraiment référence. On verra bien en juillet 2026 si la médecine était plus forte que le mal.
Ce qu’il faut retenir absolument
- Le décret est déjà paru : c’est acté pour 2026.
- Les « coups de pouce » du jury sont quasi supprimés.
- Moins de mentions, potentiellement moins de bacheliers.
- Le bac redevient un examen où chaque point compte vraiment.
- Si vous êtes parent de terminale : parlez-en avec votre enfant dès maintenant.
Le compte à rebours est lancé. Les lycéens de cette année vont être les premiers à passer le bac dans sa version « sans filet ». Ça va être intense. Mais peut-être que, finalement, c’est exactement ce dont on avait besoin pour redonner ses lettres de noblesse à ce rite de passage à la française.
À suivre de très près.
