Imaginez : vous êtes supporter depuis toujours d’un grand club stambouliote, vous avez vibré sur chaque derby, pleuré chaque finale perdue… Et un matin, vous apprenez que des joueurs que vous idolâtrez pariaient contre leur propre équipe. Difficile à avaler, non ? C’est pourtant la réalité brutale qui frappe le football turc en ce moment.
Le genre de nouvelle qui vous fait douter de tout ce que vous avez vu sur un terrain ces dernières saisons.
Un coup de filet historique dans le football turc
Ce vendredi 5 décembre 2025, la justice turque a décidé de frapper fort. Très fort. Un mandat d’arrêt a été émis contre 46 personnes, dont 29 footballeurs professionnels encore en activité ou récemment retraités. À l’heure où j’écris ces lignes, 35 d’entre eux ont déjà été interpellés. On parle là de l’une des plus grosses opérations anti-corruption jamais menée dans le sport roi turc.
Et pas n’importe quels joueurs : on retrouve des noms évoluant dans les plus grands clubs du pays, y compris les mastodontes stambouliotes que sont Galatasaray et Fenerbahçe. Quand vos stars pari sur leur propre match, c’est toute la crédibilité du championnat qui vacille.
« Le football turc vit sa pire crise d’intégrité depuis des décennies. »
– Un observateur régulier de la Süper Lig
Des paris sur… ses propres performances
Ce qui rend l’affaire encore plus sordide, c’est la nature exacte des paris incriminés. Sur les 29 joueurs visés, 27 sont soupçonnés d’avoir misé sur les rencontres de leur propre équipe. Vous avez bien lu.
On ne parle pas ici de parier sur un match de championnat à l’autre bout du pays pour arrondir les fins de mois. Non. On parle de joueurs qui, potentiellement, ont influencé le résultat ou certains événements du match dans lequel ils évoluaient. Carton jaune volontaire ? But contre son camp déguisé ? Perte de balle suspecte en fin de match ? Tout devient suspect rétrospectivement.
L’un des cas les plus médiatisés concerne le jeune défenseur de Galatasaray, Metehan Baltacı. Le gamin a à peine 22 ans et se retrouve déjà au cœur de la tourmente. De l’autre côté du Bosphore, Mert Hakan Yandas (Fenerbahçe) serait, lui, passé par un intermédiaire pour placer ses mises – ce qui ne le rend pas moins coupable aux yeux de la loi.
Même les présidents de club dans le viseur
Et les joueurs ne sont pas les seuls dans le collimateur. Deux présidents de clubs de troisième division sont accusés d’avoir tenté de truquer directement le résultat d’un match les opposant lors de la saison 2023-2024. L’un aurait proposé de l’argent à l’équipe adverse pour « lâcher » la rencontre. Classique, mais toujours aussi choquant quand c’est avéré.
Dans le lot, on retrouve aussi des entraîneurs-adjoints, des agents et même des proches de joueurs. Bref, tout l’écosystème du football turc semble gangréné.
150 arbitres déjà suspendus : la fédération dépassée ?
Ce coup de filet ne sort pas de nulle part. Il s’inscrit dans une vague de répression entamée il y a plusieurs mois. Souvenez-vous : début novembre, près de 150 arbitres ont été suspendus pour avoir eux aussi parié sur des matchs. Oui, les gens censés garantir l’équité du jeu étaient les premiers à le bafouer.
Quelques jours plus tard, 25 joueurs de première division et près de 1 000 évoluant dans les divisions inférieures écopaient de suspensions allant jusqu’à un an. La fédération turque (TFF) avait alors promis un grand ménage. On y est.
- 6 arbitres déjà incarcérés début novembre
- 1 président de club de D1 derrière les barreaux
- Près de 1 150 personnes sanctionnées sportivement avant même l’intervention judiciaire
- Et maintenant 46 mandats d’arrêt…
Autant dire que la TFF, qui jurait vouloir « nettoyer » le football turc, se retrouve un peu dépassée par l’ampleur du désastre.
Pourquoi le football turc est-il si vulnérable ?
Il y a plusieurs raisons, et elles ne datent pas d’hier.
D’abord, les salaires. Même si les stars de Galatasaray, Fenerbahçe ou Beşiktaş touchent très bien leur vie, une grande partie des joueurs de Süper Lig et surtout des divisions inférieures galèrent. Un pari gagnant de quelques milliers d’euros peut représenter plusieurs mois de salaire. La tentation est énorme.
Ensuite, la culture du pari en Turquie. C’est un phénomène de société. Les sites de paris (légaux ou non) pullulent, les cafés de quartier diffusent les cotes en permanence, et parier sur le foot fait presque partie du folklore. Quand tout le monde parie, la frontière entre loisir et dérive devient floue.
Enfin, le manque de contrôle. Pendant des années, la fédération a fermé les yeux. Les sanctions étaient rares, les enquêtes inexistantes. Résultat : un sentiment d’impunité totale. Jusqu’à ce que tout explose.
Quelles conséquences pour la Süper Lig ?
À court terme, c’est la pagaille. Plusieurs matchs risquent d’être reportés si trop de joueurs sont suspendus ou incarcérés. Les classements pourraient être bouleversés par des retraits de points. Les sponsors commencent à s’inquiéter – personne n’a envie d’associer son image à un championnat gangréné par les paris truqués.
À moyen terme, c’est peut-être une chance. Un mal pour un bien. Si la justice et la fédération vont au bout, le football turc pourrait ressortir plus propre. Mais le chemin sera long et douloureux.
Je me souviens encore du scandale de 2011 (l’affaire des matchs truqués qui avait envoyé Fenerbahçe en conférence league pendant deux ans). On pensait avoir touché le fond. Visiblement non.
Et nous, supporters, on fait quoi ?
On continue à aller au stade ? À porter le maillot ? À chanter pour des joueurs qui, peut-être, nous ont trahis ?
C’est la question qui me hante depuis ce matin. Parce que le football, ce n’est pas que du business ou des statistiques. C’est de l’émotion brute. Et quand l’émotion est salie, ça fait mal.
Moi je crois qu’on n’a pas le choix : il faut soutenir les institutions qui nettoient, boycotter ceux qui trichent, et continuer à aimer ce sport malgré tout. Parce que le football turc a trop de passion, trop d’histoire, pour être abandonné aux corrompus.
Mais une chose est sûre : les prochaines semaines qui viennent vont être rudes. Très rudes.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Le football turc va-t-il se relever ? Ou ce scandale va-t-il laisser des traces indélébiles ? Dites-moi tout en commentaire, j’ai besoin de savoir qu’on est plusieurs à encore y croire…
