Imaginez la scène : il est presque minuit à l’Assemblée nationale, les travées sont à moitié vides, et pourtant le sort du budget de la Sécurité sociale pour 2026 se joue en cet instant précis. 166 voix pour, 140 contre. À peine 26 voix d’écart. On a connu des victoires plus tranquilles.
Ce vendredi 5 décembre 2025, la partie « recettes » du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) est passée. De justesse. Très justesse même. Et ce vote, croyez-moi, en dit long sur l’état actuel de la politique française.
Un vote qui sent la poudre… et le compromis forcé
Commençons par le plus étonnant : qui a sauvé ce texte ? Pas les habituels alliés du gouvernement, non. Les groupes Renaissance et MoDem n’auraient jamais eu assez de voix seuls. C’est une coalition improbable qui a fait la différence.
Les députés Parti socialiste et Liot (les indépendants du centre-droit ont voté massivement pour. Oui, vous avez bien lu. Des socialistes qui votent un budget porté par un gouvernement de droite modérée. En 2025, tout est possible.
« Le débat parlementaire a porté ses fruits… Le débat va pouvoir se poursuivre »
Bertrand Sorre, député Renaissance de la Manche
En face ? Un front du refus presque total. Le Rassemblement national, la France insoumise et les Écologistes ont voté contre à l’unisson. Une alliance objective des extrêmes qui, pour une fois, fait bloc. Les Républicains et Horizons, pourtant dans la majorité présidentielle élargie, ont préféré… l’abstention majoritaire. Sympa l’esprit d’équipe.
L’absentéisme XXL qui pose question
Sur 577 députés, seuls 306 ont daigné participer au vote. 239 absents ou abstentions volontaires. C’est énorme. Et pas n’importe qui.
- Marine Le Pen ? Absente.
- Manuel Bompard (LFI) ? Absent.
- François Hollande (PS) ? Absent.
- Michel Barnier (LR) ? Absent.
Quand on sait que le texte touche les retraites, la santé, les cotisations… on est en droit de se demander où étaient les « grandes consciences » de la nation ce soir-là.
J’ai regardé les chiffres : sur les 89 députés RN, seuls 69 étaient présents. Chez LFI, même chose. Les socialistes ? Une partie seulement a voté pour, beaucoup se sont évaporés. C’est presque comique si ce n’était pas aussi grave.
Pourquoi ce vote était-il si crucial ?
Parce que sans l’adoption de la partie « recettes », tout le budget Sécu tombait à l’eau. Et avec lui, la possibilité de discuter de la très sensible « suspension » de la réforme des retraites – un sujet qui met tout le monde d’accord… pour s’écharper.
Le gouvernement a dû faire des concessions de dingue pour arracher ces voix socialistes et Liot. On parle notamment d’un compromis sur la CSG sur les revenus du capital, d’ajustements sur certaines taxes, et probablement de quelques promesses dans les couloirs.
« Ce n’est pas un PLFSS, c’est un projet de facturation de vos sauvetages de sièges »
Un député d’opposition lors des débats
La phrase est dure, mais elle résume bien le sentiment de beaucoup : ce budget est un patchwork de compromis pour éviter le 49.3 et sauver la face du gouvernement minoritaire.
Que contient vraiment cette partie « recettes » ?
Sans entrer dans les détails techniques barbares, voici les grandes lignes qui ont fait débat :
- Hausse ciblée de certaines cotisations patronales
- Réaménagement de la CSG pour les hauts revenus du capital (le fameux compromis)
- Nouvelles taxes sur le tabac et l’alcool (comme chaque année, me direz-vous)
- Efforts demandés aux laboratoires pharmaceutiques
- Mesures pour lutter contre la fraude sociale (toujours populaire)
Rien de révolutionnaire, mais assez pour faire hurler la droite dure et une partie de la gauche radicale.
Les grandes leçons de ce vote
D’abord, la majorité présidentielle n’existe plus vraiment. Renaissance + MoDem + Horizons = pas assez. Point. Il faut désormais négocier à chaque texte avec les socialistes ou Liot. Voire les deux en même temps.
Ensuite, l’opposition de gauche et de droite extrême peut mobiliser bien plus que 140 voix quand elle le veut. Le prochain vote sur les dépenses risque d’être encore plus chaud.
Enfin, l’abstention massive des « poids lourds » montre une chose : beaucoup préfèrent ne pas se mouiller plutôt que de prendre position. Triste spectacle.
Et maintenant ?
Le texte passe maintenant à la partie « dépenses ». C’est là que ça va vraiment se corser : hôpitaux, retraites, dépendance… Tous les sujets explosifs y passent.
Le gouvernement va-t-il réussir à tenir cette alliance bancale ? Les socialistes vont-ils continuer à voter avec Renaissance ? Ou vont-ils lâcher au pire moment ?
Une chose est sûre : on n’a jamais vu une législature aussi imprévisible. Chaque vote est une partie de poker où tout le monde bluffe.
Et vous, vous en pensez quoi ? Votre député était-il présent ? A-t-il voté pour ou contre ? N’hésitez pas à vérifier (les listes circulent) et à venir en discuter en commentaire. Parce qu’au final, c’est notre Sécu à tous qui se joue là.
PS : Si vous voulez mon avis (et vous l’avez), le plus inquiétant n’est pas le résultat, mais le fait que près d’un député sur deux n’ait même pas pris la peine de voter sur un texte aussi important. Ça, ça fait réfléchir…
