Vous souvenez-vous de ce sentiment d’injustice absolue qui vous prend aux tripes quand le sport trahit ses propres valeurs ? Moi oui. Et je parie que des millions d’Algériens n’ont jamais oublié ce 24 juin 1982 à Gijón. Un match Allemagne de l’Ouest – Autriche qui reste, quarante-quatre ans après, le symbole parfait de ce qu’on ne veut plus jamais voir sur un terrain de football.
Aujourd’hui, le destin a décidé de rouvrir cette vieille cicatrice. Le tirage au sort de la Coupe du Monde 2026 vient de placer l’Algérie et l’Autriche dans le même groupe. Et devinez quoi ? Leur affrontement est programmé comme dernier match de poule, à Arlington, au Texas. Le karma a parfois un sens de l’humour assez particulier.
Le jour où le football a eu honte de lui-même
Remettons les choses en perspective. Espagne 1982. L’Algérie dispute sa toute première Coupe du Monde. Et franchement, les Fennecs font plus que tenir leur rang. Ils créent l’une des plus grandes sensations de l’histoire en battant la RFA 2-1 dès leur premier match. Oui, vous avez bien lu : l’Algérie bat l’Allemagne de Rummenigge, Breitner et Schumacher. Un exploit qui fait trembler la planète foot.
Ensuite ? Une défaite logique 0-2 contre l’Autriche, puis une victoire 3-2 contre le Chili. À ce moment-là, l’Algérie a toutes ses chances de passer au second tour. Sauf que… il reste un détail. À l’époque, la FIFA n’imposait pas encore que les derniers matches de groupe se jouent simultanément.
Conséquence ? L’Allemagne et l’Autriche, qui jouaient le lendemain, savaient exactement ce qu’il leur fallait : une victoire 1-0 de la RFA suffirait pour que les deux équipes européennes se qualifient et éliminent l’Algérie. Et c’est exactement ce qui s’est passé.
Après le but de Hrubesch à la 10e minute, plus rien. Vraiment plus rien. Les deux équipes se sont contentées de faire tourner le ballon mollement. Un spectacle lamentable.
Les images sont restées gravées dans toutes les mémoires. Des joueurs qui se passent le ballon en marchant. Des supporters allemands et autrichiens qui huent leurs propres équipes. Un commentateur autrichien qui finit par dire à ses téléspectateurs d’éteindre leur poste. Même Paul Breitner, le rebelle de 1974, serait allé voir les Autrichiens à la mi-temps pour leur dire : « On a réussi, c’est bon, pas besoin d’en faire plus ».
Un scandale qui a changé le règlement pour toujours
Ce match a provoqué une indignation mondiale. En Allemagne, le journal Bild titre « Honte à vous ». En Espagne, on parle d’« Anschluss ». Et surtout, la FIFA prend une décision historique : désormais, les derniers matches de chaque groupe se joueront à la même heure. Un règle qui existe toujours aujourd’hui, et qui porte en elle le souvenir brûlant de Gijón.
Ce n’était pas seulement une tricherie. C’était une trahison du football. L’Algérie, petite nation qui venait de réaliser l’impossible face à une grande puissance européenne, se voyait voler sa qualification par un arrangement entre voisins. Le genre de moment qui laisse des traces pour des générations.
2026 : quand l’histoire bégaie… ou se répare ?
Et voilà que quarante-quatre ans plus tard, le sort remet les deux équipes face à face. Pas n’importe quand. Pas n’importe où. Mais lors du dernier match de groupe, dans un stade texan de 100 000 places. Comme un clin d’œil cruel ou une opportunité en or, selon le point de vue.
Parce que cette fois, les règles ont changé. Plus de calculs possibles dans l’ombre. Plus de matchs joués vingt-quatre heures après les autres. Tout se jouera en même temps. Et surtout, l’Algérie n’arrive plus en victime. Les Fennecs version 2026 ont de l’expérience, du talent, et surtout une envie de revanche qui dépasse largement le cadre sportif.
- Une génération dorée avec des joueurs évoluant dans les plus grands championnats
- Un sélectionneur qui connaît parfaitement l’histoire et la charge émotionnelle
- Un peuple entier qui attend ce moment depuis 1982
- Un adversaire autrichien loin d’être insurmontable
Franchement, on sent que quelque chose de grand pourrait se passer.
Pourquoi ce match dépasse largement le football
Ce n’est pas seulement une question de trois points. C’est une histoire de dignité. De mémoire collective. De justice poétique. Pour toute une génération d’Algériens, ce match de 1982 représente bien plus qu’une élimination : c’est le symbole d’un monde où les petits sont toujours écrasés par les arrangements des grands.
Et si 2026 était l’occasion de renverser la vapeur ? Pas seulement sur le terrain, mais dans les esprits. L’occasion de transformer une injustice en triomphe. De montrer que le temps finit parfois par rendre justice.
Ce sera plus qu’un match. Ce sera un exorcisme collectif.
Un supporter algérien de la première heure
J’ai discuté avec des Algériens de tous âges ces derniers jours. Les plus anciens ont les larmes aux yeux en repensant à 1982. Les plus jeunes, qui n’étaient même pas nés, portent déjà ce match comme une mission sacrée. C’est assez incroyable à voir.
Et si l’Autriche jouait elle aussi sa revanche ?
Il faut aussi regarder de l’autre côté. Les Autrichiens d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec ceux de 1982. Beaucoup de joueurs actuels n’étaient même pas nés. Mais ils savent. Ils savent qu’ils traînent ce boulet. Qu’on leur rappelle constamment ce match honteux dès qu’ils croisent la route de l’Algérie.
Ils auront eux aussi envie de prouver quelque chose. De montrer qu’ils sont capables de jouer au football, vraiment. Que leur équipe nationale peut être fière, pas seulement associée à ce triste épisode.
Au final, les deux équipes auront quelque chose à prouver. Mais soyons honnêtes : la charge émotionnelle ne sera pas la même. D’un côté, une nation qui a été volée. De l’autre, une nation qui a profité d’un arrangement. Même quarante-quatre ans après, ça ne s’équilibre pas vraiment.
Ce qu’il faudra surveiller absolument
Sportivement, l’Algérie version 2026 a les moyens de ses ambitions. Avec des joueurs comme Baghdad Bounedjah, Riyad Mahrez s’il est encore là, ou la nouvelle génération qui monte, les Fennecs ont de quoi faire mal. L’Autriche, elle, reste une équipe solide mais rarement transcendante dans les grands tournois.
- La gestion de la pression émotionnelle (énorme pour l’Algérie)
- Le scénario du match (un 1-0 suffira-t-il encore à quelqu’un ?)
- La réaction du public mondial face à cette revanche
- Et surtout : est-ce que le football saura enfin rendre justice ?
Quelque part, j’espère un match fou. Un 4-3 avec des retournements de situation. Des buts dans les dernières minutes. Quelque chose qui efface définitivement le goût amer de 1982. Parce que le football mérite mieux que les arrangements en coulisses. Et l’Algérie mérite sa revanche.
Le 26 ou 27 juin 2026, à Arlington, on aura tous les yeux rivés sur ce match. Pas seulement pour les trois points. Mais pour l’histoire. Pour la justice. Pour voir si, parfois, le destin finit par réparer ce qu’il a brisé.
Et vous, vous y croyez à cette revanche ? Moi, en tout cas, j’ai déjà coché la date sur mon calendrier. Parce que certains matchs dépassent largement le sport. Ils touchent à quelque chose de plus profond. Quelque chose qui ressemble à la rédemption.
(Article rédigé avec passion par un amoureux du football qui attend lui aussi ce moment depuis très, très longtemps)
