Vous est-il déjà arrivé de vous dire que le rêve pouvait tourner au cauchemar en un claquement de doigts ? C’est exactement ce qu’ont vécu plusieurs jeunes femmes qui pensaient simplement passer un casting pour leur premier grand rôle.
Elles avaient vingt ans, l’envie brûlante de percer dans le cinéma, et lui… lui était un réalisateur connu, installé dans de beaux bureaux à Neuilly-sur-Seine. Le piège était parfait.
Huit ans de prison pour des viols sous emprise
Dans la nuit du 5 au 6 décembre 2025, la cour d’assises des Hauts-de-Seine a rendu son verdict : huit années d’emprisonnement ferme pour un homme de 51 ans reconnu coupable du viol de trois jeunes femmes et de l’agression sexuelle d’une quatrième.
Huit ans. C’est moitié moins que ce qu’avait requis l’avocat général (quinze ans), mais c’est déjà énorme quand on sait que l’accusé a comparu libre et est reparti menottes aux poignets.
Le plus glaçant ? Il a fini par reconnaître les faits à la barre, parlant même d’une étrange « plénitude » après avoir avoué. Comme si, quelque part, il se libérait d’un poids.
Le scénario était toujours le même
Repérage sur les réseaux sociaux ou sites spécialisés dédiés aux comédiens. Message privé flatteur : « J’ai un rôle qui pourrait coller parfaitement à ton profil. » Envoi du scénario. Rendez-vous dans un bureau chic.
Puis, une fois sur place, l’ambiance change. On parle moins du film, on propose un verre « pour détendre l’atmosphère ». Un deuxième. Un troisième. Et puis, presque naturellement, arrive la proposition de « tester la drogue de l’amour », la MDMA, censée « libérer les émotions pour mieux jouer ».
Les jeunes femmes, souvent impressionnées par l’homme en face d’elles, acceptent. Elles veulent montrer qu’elles sont « ouvertes », « cool », prêtes à tout pour le rôle. Et là, c’est le trou noir. Black-out total ou partiel. Elles se réveillent le lendemain avec la sensation diffuse que quelque chose de grave s’est passé.
« J’avais l’impression d’être dans du coton. Je ne comprenais plus ce qui se passait, mais je n’arrivais pas à dire non.
Cette phrase, ou des très proches, est revenue des dizaines de fois à l’audience.
Consentement ou soumission chimique ?
La question centrale du procès tournait autour de cette notion ultra-complexe : y a-t-il eu consentement quand la victime est sous l’emprise massive d’alcool et de MDMA ?
La cour a tranché : non. En fournissant la drogue, en insistant pour qu’elles en prennent, en profitant de leur état d’ébriété avancé, l’accusé a annihilé leur capacité à dire oui ou non de façon lucide.
C’est d’ailleurs ce qui a permis de qualifier les faits de viol et non pas seulement d’agression sexuelle pour trois des victimes.
- Alcool en grande quantité servi sans limite
- MDMA présentée comme un « outil de travail d’acteur »
- Différence d’âge et de statut (réalisateur expérimenté vs jeunes comédiennes en galère)
- Huis clos dans un bureau sans témoin
- Promesse implicite ou explicite d’un rôle en échange
Tous ces éléments réunis créent ce qu’on appelle aujourd’hui une zone grise du consentement que la justice commence enfin à regarder en face.
Un acquittement partiel qui fait débat
Il y a quand même eu deux acquittements. Deux jeunes femmes avec lesquelles le réalisateur a ensuite entretenu une relation sentimentale, parfois plusieurs mois.
Pour la cour, le fait qu’elles soient revenues, qu’elles aient accepté de revoir l’homme après la première soirée, a semé le doute. Était-ce vraiment un viol si elles sont revenues ?
Beaucoup d’associations féministes ont crié au scandale. Parce que revenir peut aussi être le signe d’une emprise psychologique puissante, surtout quand on a vingt ans et qu’on croit encore que ce rôle va arriver.
Moi, ce qui me frappe, c’est qu’on continue à demander aux victimes d’être « parfaites » pour être crues. Si elles reviennent, c’est suspect. Si elles ne reviennent pas, on leur reproche de ne pas avoir assez lutté. C’est épuisant.
Les aveux surprise de l’accusé
Le moment le plus fort du procès ? Quand l’accusé, jusqu’alors dans le déni total, a craqué.
« Tout est de ma faute. Je reconnais aujourd’hui avoir commis des viols. Je ressens même une forme de plénitude à le dire enfin. »
Il a pleuré. Il a dit qu’il n’était plus le même homme. Que c’était il y a dix ans, qu’il avait changé.
Son avocat, lui, continue de parler d’un homme « insistant, très insistant », mais pas d’un violeur. Il envisage l’appel.
Et maintenant ?
Huit ans, c’est long. Et en même temps, c’est peu quand on pense à la vie brisée de ces jeunes femmes qui, dix ans après, tremblent encore en racontant.
Cette affaire rappelle cruellement que le cinéma français, comme Hollywood avant lui, a ses zones d’ombre. Que le « génie » ou le « créateur » ne doit plus être une excuse pour tout.
Depuis #MeToo, les langues se délient. Les castings « privés » dans des bureaux ou appartements sont de plus en plus surveillés. Des chartes éthiques apparaissent. Des associations accompagnent les victimes.
Mais il reste du chemin. Beaucoup.
Parce que tant qu’une jeune comédienne croira qu’elle doit accepter un verre, une ligne, ou un « test d’intimité » pour avoir sa chance… le piège restera tendu.
Et nous, public, devons continuer à poser la seule question qui vaille : était-elle vraiment libre de dire non ?
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