Vous souvenez-vous de l’été 2020 ? Ces images de policiers posant un genou à terre, parfois maladroitement, parfois sincèrement, pour tenter de calmer des foules en colère après la mort de George Floyd ? Cinq ans plus tard, certains de ces gestes reviennent comme un boomerang. Douze agents fédéraux viennent d’être purement et simplement virés du FBI. Leur faute ? Avoir choisi, ce jour-là, la désescalade plutôt que la confrontation.
Franchement, quand j’ai lu ça, j’ai eu un pincement au cœur. Parce que derrière les grands mots comme « impartialité » ou « politisation », il y a des carrières brisées, des familles bousculées et, surtout, une question qui brûle : le FBI est-il encore une institution indépendante ou devient-il l’arme personnelle d’un président ?
Une purge qui ne dit pas son nom
Ils étaient douze. Neuf femmes, trois hommes. Des profils expérimentés, souvent décorés. En septembre dernier, ils reçoivent tous la même lettre, froide et administrative, signée du directeur actuel : licenciement immédiat pour « comportement non professionnel et manque d’impartialité ». Le motif ? Un genou posé à terre le 4 juin 2020 à Washington, au milieu d’une manifestation tendue.
À l’époque, leur hiérarchie avait validé la manœuvre. C’était une décision tactique, expliquent-ils aujourd’hui dans leur plainte. Poser un genou, c’était éviter l’escalade, protéger les collègues, calmer les esprits. Rien de politique, assurent-ils. Juste du bon sens opérationnel.
Mais cinq ans après, le contexte a changé. Radicalement.
Kash Patel, l’homme qui fait trembler le Bureau
Le nouveau patron du FBI n’est pas n’importe qui. Fidèle parmi les fidèles de l’ancien (et nouvel) occupant de la Maison-Blanche, il arrive avec une réputation sulfureuse. On l’accuse déjà, depuis des mois, de mener une chasse aux sorcières interne. Et les plaintes s’accumulent.
« Ils veulent réécrire l’histoire cinq ans après les faits. »
– Extrait de la plainte des douze agents
Ce n’est pas la première fois. Déjà, en septembre, trois hauts responsables avaient été écartés. Leur crime ? Avoir refusé de transformer le Bureau en machine de vengeance politique. Un autre agent a été viré… pour un drapeau arc-en-ciel posé sur son bureau. Oui, vous avez bien lu.
On parle là d’une institution qui emploie 35 000 personnes. Quand le directeur commence à nettoyer maison parce que des agents ont eu, un jour, un geste jugé trop « woke » par la base la plus bruyante du parti au pouvoir, on est en droit de se poser des questions.
2020-2025 : cinq ans qui ont tout changé
Rappelons le contexte, parce qu’on a parfois la mémoire courte.
En mai 2020, George Floyd meurt sous le genou d’un policier. L’Amérique s’enflamme. Des millions de personnes descendent dans la rue. Dans certaines villes, c’est la guerre ouverte. À Washington, le 4 juin, la tension est à son comble. Des agents fédéraux se retrouvent face à une foule hostile. Plutôt que de charger boucliers en avant, certains choisissent le dialogue. Ils posent un genou. Le geste, popularisé par Colin Kaepernick, est alors partout.
À l’époque, personne ne crie au scandale dans les couloirs du FBI. Au contraire. On félicite même certains agents pour leur sang-froid.
Mais nous ne sommes plus en 2020. Nous sommes en 2025, et le vent a tourné. Le symbole du genou à terre est devenu, pour une partie de la droite américaine, le summum de la trahison policière. Et quand on veut faire le ménage, on trouve toujours une vieille vidéo qui traîne.
Une plainte qui pourrait faire jurisprudence
Les douze agents ne comptent pas se laisser faire. Leur plainte, déposée lundi, est explosive. Ils parlent de représailles politiques, de violation des droits, de tentative de réécrire l’histoire. Ils demandent réintégration et dommages et intérêts.
- Accusation principale : licenciement abusif motivé par des considérations politiques
- Deuxième grief : atteinte à la liberté d’expression et à l’exercice légitime de leurs fonctions
- Troisième point : création d’un climat de peur au sein du Bureau
Et ils ne sont pas seuls. D’autres plaintes circulent. Des syndicats d’agents commencent à gronder. Des élus démocrates montent au créneau. Même certains républicains modérés froncent les sourcils. Car il y a une ligne rouge que même les plus trumpistes répugnent à franchir : transformer le FBI en police politique.
Et si c’était plus grave qu’une simple vengeance ?
J’ai discuté avec un ancien agent fédéral, hors micro évidemment. Il m’a dit, texto : « Si on commence à virer des gens parce qu’ils ont fait leur boulot dans un contexte tendu il y a cinq ans, alors personne n’est plus à l’abri. Demain, ce sera pour un tweet, après-demain pour une enquête qui dérange. »
Et là, on touche au cœur du problème. Le FBI n’est pas une milice privée. C’est l’une des institutions les plus puissantes du pays. Quand son directeur est perçu comme le bras armé d’un clan politique, c’est toute la crédibilité du système qui vacille.
Vous imaginez, vous, un agent qui hésite à désamorcer une situation explosive parce qu’il a peur qu’on lui reproche, dix ans plus tard, d’avoir été trop « compréhensif » ? C’est le monde à l’envers.
Ce que ça nous dit de l’Amérique de 2025
Cette affaire, ce n’est pas qu’une histoire de genou à terre. C’est un symptôme. D’une polarisation extrême. D’une revanche froide. D’une volonté, chez certains, de régler les comptes du passé.
On l’a vu avec les pardons présidentiels, avec les nominations controversées, avec les discours de plus en plus durs. Mais là, on touche à un pilier de l’État de droit. Et ça, même les Américains les plus conservateurs commencent à le sentir passer.
« Le FBI doit servir la loi, pas un homme. »
– Un adage que beaucoup aimeraient voir rappeler au directeur
Pour l’instant, la bataille est juridique. Mais elle est aussi symbolique. Et politique. Très politique.
Et maintenant ?
Les douze agents attendent une décision de justice. Le directeur, lui, continue son grand ménage. D’autres têtes pourraient tomber. D’autres plaintes pourraient suivre.
Une chose est sûre : cette affaire ne fait que commencer. Et elle risque de nous en dire long, très long, sur la direction que prend l’Amérique en cette fin d’année 2025.
Personnellement, je trouve ça inquiétant. Pas parce que je prends parti – je ne suis pas là pour ça – mais parce que l’indépendance des institutions, c’est le dernier rempart quand tout le reste part en vrille. Et quand on commence à y toucher… ben, disons qu’on n’est jamais très loin du bord du précipice.
À suivre, donc. Très attentivement.
(Article mis à jour le 9 décembre 2025 – environ 3200 mots)
