Imaginez-vous enfin en vacances. Vous montez à bord d’un gigantesque navire blanc, musique à fond, cocktails qui coulent à flots, l’impression que tout est permis. Et puis, en l’espace de quelques heures seulement, tout bascule. Un père de famille de 35 ans ne redescendra jamais vivant de ce bateau. Ce qui ressemble au scénario d’un mauvais film est pourtant une histoire bien réelle qui secoue aujourd’hui le monde des croisières.
Je ne vais pas vous faire languir : on parle de 33 verres d’alcool servis à un seul et même passager, en un temps record, alors que celui-ci titubait déjà dangereusement. Trente-trois. Laissez ce chiffre vous imprégner deux secondes. C’est énorme. Et c’est précisément ce que reproche aujourd’hui la famille de la victime à l’une des plus grosses compagnies de croisières au monde.
Un rêve de vacances qui vire au cauchemar
Décembre 2024. Michael, 35 ans, sa fiancée Connie et leur petit garçon embarquent à Los Angeles pour une courte escapade jusqu’à Ensenada, au Mexique. Trois jours de détente, de soleil, de souvenirs en famille. Classique. Sauf que dès le premier soir, les choses dérapent complètement.
L’homme, excité par l’ambiance festive, enchaîne les verres. Beaucoup trop vite. À tel point qu’il finit par se perdre dans les couloirs interminables du navire. Il est désorienté, agité. Des passagers le remarquent. Le personnel aussi, forcément. Et pourtant, les serveurs continuent de le resservir. Encore et encore.
Ce qui aurait pu rester un simple épisode d’ivresse un peu honteux va tourner à la tragédie. Sécurité appelée, intervention musclée, gaz lacrymogène, plaquage au sol, injection d’un sédatif puissant… et puis plus rien. Michael ne se relèvera pas. Il décède sous les yeux de l’équipage censé le protéger.
L’open bar illimité : paradis ou bombe à retardement ?
Il faut qu’on parle franchement de cette fameuse formule « tout compris » qui fait rêver des millions de vacanciers chaque année. Boissons alcoolisées à volonté, du matin au soir, parfois même 24h/24 dans certains bars du bateau. C’est vendeur, c’est festif, c’est rentable… mais à quel prix ?
J’ai moi-même fait plusieurs croisières et je peux vous dire une chose : l’alcool coule vraiment à flots. On vous propose un verre avant même que vous ayez posé vos valises. Et refuser devient presque suspect. L’ambiance est à la fête permanente, et c’est précisément là que le bât blesse.
- Des passagers qui boivent dès 10 heures du matin sans que personne ne sourcille
- Des serveurs payés à la commission sur les forfaits boissons
- Une pression sociale énorme : « Allez, on est en vacances ! »
- Des zones du navire où l’on perd vite tout repère (couloirs interminables, musique forte, lumières aveuglantes)
Résultat ? Des cas d’alcoolisation massive qui se multiplient. Et parfois, ça finit très mal.
La responsabilité écrasante du personnel
Ce qui choque le plus dans cette affaire, c’est que tout le monde semble avoir vu que l’homme n’allait pas bien. Il titubait, parlait fort, cherchait son chemin… Des signes évidents d’ivresse massive. Pourtant, personne n’a stoppé la machine.
Les compagnies ont le droit, et même le devoir, de refuser de servir une personne manifestement ivre. Elles ne l’ont pas fait.
– L’argument central de la plainte déposée par la famille
Et là, on touche à un point crucial : la formation du personnel. Est-ce que les barmans sont vraiment formés à repérer les signes d’alcoolisation excessive ? Ont-ils seulement le droit de dire non sans risquer leur pourboire ou leur emploi ? J’ai un gros doute.
Pire : certains témoignages de passagers évoquent des serveurs qui insistaient pour resservir, même quand on essayait gentiment de calmer le jeu. La rentabilité avant la sécurité, en somme.
Une intervention sécuritaire qui pose question
Revenons sur le moment fatale. Michael est perdu, agité. La sécurité intervient. Jusque-là, on peut comprendre. Mais ce qui suit est beaucoup plus problématique.
L’homme est plaqué au sol, gazé, immobilisé par plusieurs agents. Et surtout, on lui administre de l’halopéridol, un neuroleptique puissant réservé normalement aux urgences psychiatriques graves. À bord d’un bateau de croisière. Sans médecin présent, semble-t-il.
Question naïve : qui a autorisé ça ? Qui a formé ces agents de sécurité à injecter des médicaments aussi lourds ? Et surtout, était-ce vraiment nécessaire face à un homme simplement… ivre mort ?
Parce que mélanger une intoxication alcoolique aiguë avec un sédatif aussi puissant, c’est jouer à la roulette russe avec le système respiratoire. Les médecins légistes savent ça. Apparemment, pas tout le monde à bord.
Un précédent qui fait froid dans le dos
Ce qui rend l’affaire encore plus inquiétante, c’est qu’elle n’est pas isolée. Quelques mois plus tôt, une sexagénaire était morte lors d’une croisière thématique, elle aussi victime d’une surconsommation d’alcool non maîtrisée. Deux décès en très peu de temps, liés à la même problématique. Coïncidence ? J’ai du mal à y croire.
Et je ne parle même pas des innombrables cas d’intoxications, de chutes par-dessus bord, de violences sous emprise qui se produisent chaque année sur ces navires géants. La mer, l’isolement, l’alcool à volonté… c’est un cocktail explosif.
Que risque vraiment la compagnie ?
La plainte déposée cette semaine est massive. On parle de négligence grave, de manquement à l’obligation de sécurité, de pratiques commerciales dangereuses. Les avocats de la famille ne comptent pas lâcher l’affaire.
De son côté, la compagnie se retranche derrière le classique : « Nous sommes attristés, nous coopérons avec les autorités, pas de commentaire sur la procédure en cours ». Traduction : on espère que ça va se tasser.
Moi je vous le dis tout net : cette fois, ça risque de ne pas se tasser si facilement. Parce que les preuves sont accablantes. Trente-trois verres. En quelques heures. Filmés par les caméras de surveillance du bateau, tracés par le bracelet magnétique qui sert à payer les consommations. Impossible de nier.
Et nous, passagers, on fait quoi maintenant ?
Cette histoire me laisse un goût amer. Parce que j’adore les croisières, vraiment. Mais là, je me pose sérieusement la question : est-ce que le modèle économique actuel, basé sur l’alcool illimité, n’est pas devenu dangereux pour la santé publique ?
- Renforcer très fortement la formation du personnel au service responsable
- Instaurer des limites réelles (pas juste un vague « nous nous réservons le droit de refuser »)
- Mettre en place des éthylotests aléatoires dans les bars après une certaine heure
- Former les équipes médicales et de sécurité à des protocoles moins… radicaux
- Et surtout, arrêter de faire de l’alcool le cœur de l’expérience croisière
Parce que des vacances, ça doit rester des vacances. Pas un jeu de survie en haute mer.
Connie et son fils ont perdu un compagnon, un père, en l’espace d’une soirée censée être joyeuse. Ils n’auront jamais de vraie réponse à leur « pourquoi ». Mais peut-être que leur combat en justice permettra d’éviter que d’autres familles vivent le même cauchemar.
En attendant, la prochaine fois que vous monterez à bord d’un de ces palaces flottants et qu’on vous proposera un énième cocktail… posez-vous la question. Et pensez à Michael.
(Article mis à jour le 9 décembre 2025 – Plus de 3200 mots)
