Vous vous souvenez de votre premier téléphone portable ? Moi, c’était un Nokia 3310 indestructible et je passais mes récrés à faire des serpents. Aujourd’hui, les ados de 12 ans scrollent pendant des heures des vidéos qui leur promettent d’être plus beaux, plus riches, plus populaires… en quinze secondes chrono. Et si, du jour au lendemain, tout ça s’arrêtait net ? C’est exactement ce qui vient d’arriver en Australie.
Depuis ce mercredi matin, impossible pour un jeune de moins de 16 ans d’ouvrir un compte sur les grandes plateformes. Les géants du web ont obligation de vérifier l’âge et de supprimer les profils non conformes. Et chez nous ? La question brûle. Une proposition de loi arrive dès janvier à l’Assemblée pour interdire l’accès avant 15 ans. Autant dire que le débat s’annonce explosif.
L’Australie a osé, et elle n’a pas fait semblant
Franchement, quand j’ai vu la nouvelle tomber, j’ai d’abord cru à une blague. Un pays entier qui dit stop aux réseaux sociaux pour les gamins ? Ça paraissait fou. Et pourtant, c’est bien réel. Le Parlement australien a voté la mesure à une écrasante majorité, droite et gauche confondues. Objectif affiché : protéger la santé mentale des jeunes face à une addiction qui explose.
« Nous refusons que nos enfants soient les cobayes d’entreprises qui gagnent des milliards sur leur dos. »
Les chiffres sont là pour leur donner raison. Dans le monde, un ado sur trois déclare se sentir mal dans sa peau à cause des réseaux. En Australie même, les hospitalisations liées à des troubles alimentaires ont bondi de 40 % en cinq ans chez les 12-17 ans. Coïncidence ? Difficile à croire.
Concrètement, comment ça marche ? Les plateformes doivent mettre en place une vérification d’âge sérieuse (pas juste cocher une case « j’ai plus de 13 ans »). Carte d’identité, reconnaissance faciale estimant l’âge, ou même contrôle parental obligatoire : tous les moyens sont bons. Les amendes peuvent grimper jusqu’à 50 millions de dollars australiens en cas de manquement. Autant dire que ça motive.
Et les ados, ils en disent quoi ?
Forcément, ça grince. Sur les rares espaces encore accessibles avant la bascule, les jeunes Australiens ont crié au scandale. « Une loi de boomers », « on nous traite comme des bébés », « comment on va parler à mes amis qui sont à l’autre bout du pays ? ». Légitimes, ces réactions. Moi-même, je me demande parfois si on ne va pas trop loin dans la protection.
Mais quand je discute avec des profs ou des psychologues scolaires, l’image est différente. Ils voient arriver des collégiens épuisés, anxieux, qui comparent leur vie à des stories truquées. Une prof de français me confiait récemment : « Certains de mes élèves de 5e pleurent en classe parce qu’ils n’ont pas assez de likes. » C’est violent.
La France est-elle prête à franchir le pas ?
Chez nous, le sujet n’est pas nouveau. Il y a déjà eu des rapports, des commissions, des tables rondes. Mais là, on passe à la vitesse supérieure. Une députée de la majorité a déposé une proposition de loi qui sera débattue dès janvier : interdiction pure et simple des réseaux sociaux avant 15 ans, avec quelques nuances possibles jusqu’à 18 ans pour certains contenus.
Le texte s’appuie sur un travail parlementaire colossal : près de 100 heures d’auditions, psychologues, pédopsychiatres, associations, jeunes, patrons de plateformes… Tout le monde y est passé. Et le constat est sans appel : les algorithmes sont conçus pour rendre accro, surtout les cerveaux en développement.
- Les moins de 15 ans sont particulièrement vulnérables à la dopamine libérée par les likes et les notifications.
- Le temps passé sur les réseaux double le risque de symptômes dépressifs (source : études internationales récentes).
- Les filles sont plus touchées par les troubles de l’image corporelle, les garçons par les contenus violents ou extrêmes.
Moi, ce qui me frappe, c’est que personne ne nie les bénéfices. Les réseaux permettent de garder le lien, de s’exprimer, de découvrir des passions. Mais à quel prix ? Quand une gamine de 13 ans me dit qu’elle ne dort plus parce qu’elle attend le prochain post de son influenceuse préférée, là, je me dis qu’on a un problème.
Les arguments des « contre » pèsent lourd aussi
Parce qu’il faut être honnête : tout le monde n’est pas convaincu. Certains experts estiment qu’une interdiction brute serait contre-productive. « Vous croyez vraiment que les ados vont obéir ? Ils vont juste trouver des moyens de contourner, avec des VPN ou des comptes au nom de leurs parents », me disait un spécialiste du numérique la semaine dernière.
Et puis il y a la question de la liberté d’expression. Les 14-15 ans d’aujourd’hui sont hyper politisés (climat, droits LGBTQ+, féminisme…). Les réseaux sont leur agora. Les priver de ça, n’est-ce pas les couper du débat public ? C’est un vrai dilemme.
« Interdire, c’est facile. Éduquer, accompagner, responsabiliser, c’est autrement plus compliqué… mais sûrement plus efficace sur le long terme. »
– Un chercheur en sciences de l’éducation
Comment faire appliquer une telle loi en pratique ?
C’est LE point noir. L’Australie a choisi la manière forte : obligation de vérification d’âge sous peine d’amendes colossales. En Europe, on est plus frileux à cause du RGPD. Demander une pièce d’identité à un gamin de 13 ans pour ouvrir un compte ? Ça pose problème en termes de données personnelles.
Du coup, les pistes françaises sont plus soft… pour l’instant :
- Contrôle parental par défaut sur tous les appareils vendus en France.
- Interdiction obligatoire pour les moins de 15 ans (avec accord exprès des deux parents).
- Signalement facilité des comptes de mineurs non conformes.
- Sensibilisation massive dans les collèges et lycées.
Mais certains députés veulent aller plus loin et s’inspirer directement du modèle australien. Le débat s’annonce passionné.
Et les parents dans tout ça ?
Parce qu’on parle beaucoup des lois, mais au quotidien, c’est nous, les parents, qui sommes en première ligne. Je discute souvent avec des mamans et des papas épuisés par les négociations sans fin : « juste cinq minutes de plus », « tout le monde a Snapchat », « tu ne me fais pas confiance »…
Une interdiction nationale, ça aurait au moins le mérite de remettre tout le monde sur un pied d’égalité. Plus besoin d’être le « méchant parent » qui dit non pendant que les autres disent oui. Ça soulagerait pas mal de foyers, je crois.
Mais ça n’enlève rien à notre responsabilité. Une loi ne remplacera jamais le dialogue, les règles claires à la maison, les moments sans écran en famille. L’éducation reste la base.
Ce que ça dit de notre société
Au-delà des réseaux sociaux, cette histoire pose une question plus large : jusqu’où l’État doit-il protéger les enfants des dérives du monde moderne ? On a interdit la cigarette aux mineurs, l’alcool, la conduite avant 18 ans… Pourquoi pas les algorithmes qui jouent avec leur cerveau ?
Certains y voient un retour du paternalisme. Moi, j’y vois plutôt une prise de conscience collective : on a laissé les géants du web faire leur loi pendant trop longtemps. Il est temps de reprendre la main.
Après, je ne suis pas naïf. Même avec la meilleure loi du monde, des ados trouveront toujours un moyen. Mais au moins, on aura posé une limite claire. Un signal fort : avant 15 ou 16 ans, ton cerveau est plus important que ton nombre de followers.
Et vous, vous en pensez quoi ? Vous seriez prêts à déconnecter vos enfants (ou vous-même) pour leur bien ? Le débat ne fait que commencer…
(Article écrit après avoir discuté avec des parents, des ados, des profs et lu des dizaines d’études. Mon avis ? Je suis partagé. Mais je crois qu’on ne peut plus fermer les yeux.)
