Imaginez la scène : un soir d’hiver à Biarritz, les projecteurs du stade Aguilera s’allument une dernière fois avant les fêtes. Au milieu du terrain, un homme seul, costume impeccable, pose un ballon ovale comme on pose une candidature. Ce n’est pas n’importe qui. C’est Serge Blanco. À 67 ans, l’ancien arrière magique du XV de France décide de troquer les crampons contre l’écharpe tricolore. Et croyez-moi, il n’y va pas avec le dos de la cuillère.
Quand une légende vivante du rugby français se lance en politique dans sa ville de cœur, ça ne passe pas inaperçu. Et quand cette même légende commence par dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas sur la gestion actuelle, ça fait des vagues. Très grosses vagues sur la Côte basque.
Serge Blanco, l’outsider qui veut tout changer à Biarritz
Retraité du rugby depuis plus de trente ans, l’homme aux 93 sélections reste une icône absolue. Président du Biarritz Olympique (section amateur), entrepreneur à succès pendant des décennies, il aurait pu couler des jours tranquilles entre golf et bord de mer. Mais non. À l’approche des municipales de 2026, il a décidé de relever un nouveau défi : la mairie de Biarritz.
Ce qui frappe d’entrée, c’est qu’il ne débarque pas en solo comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Derrière lui, une équipe d’une soixantaine de personnes bosse depuis presque deux ans. Des profils variés, plutôt centre-droit, mais surtout des Biarrots de souche ou d’adoption qui en ont marre de voir leur ville changer à marche forcée.
« Je ne pars pas tout seul, je pars avec un certain nombre de personnes qui aujourd’hui travaillent depuis pratiquement deux années »
Serge Blanco
Le programme définitif et la liste complète tomberont fin janvier. En attendant, il distille les messages. Et le ton principal ? Le rassemblement. Pas de chapelle politique étroite, mais une large union autour d’une vision différente pour Biarritz.
La maire sortante dans le viseur
Impossible de parler de cette candidature sans évoquer le duel à distance avec Maider Arosteguy, la maire LR sortante. Serge Blanco ne mâche pas ses mots : le bilan mécontente « pas mal de personnes ». Il parle d’une vision qui doit être différente. Traduction : l’actuelle équipe municipale a perdu le contact avec les réalités des Biarrots.
Dans le Pays basque, on sait que les élections municipales se gagnent souvent sur des sujets très concrets : stationnement, propreté, tourisme de masse, prix de l’immobilier… Mais à Biarritz, un dossier cristallise toutes les tensions depuis des mois.
Aguilera, le dossier qui fait trembler tout Biarritz
Parlons-en, du stade Aguilera. Ce n’est pas qu’un terrain de rugby. C’est un symbole. Le cœur battant du Biarritz Olympique, cinq fois champion de France, finaliste de la Coupe d’Europe à deux reprises. Pour beaucoup d’habitants, toucher à Aguilera, c’est toucher à l’âme de la ville.
Le projet actuel de la mairie ? Rénover la plaine sportive, oui… mais aussi autoriser la construction de logements résidentiels tout autour, voire sur certaines parcelles. Pour les uns, c’est une nécessité pour financer les travaux. Pour les autres – et Serge Blanco en tête de gondole – c’est une aberration.
Son contre-projet ? Redonner à Aguilera sa vocation sportive à 100 %. Faire de la plaine un vrai pôle pour tous les sports, pas seulement le prétexte à une opération immobilière déguisée. Les logements ? Oui, mais ailleurs, dans des zones déjà prévues, et surtout accessibles aux Biarrots, pas aux investisseurs fortunés venus d’ailleurs.
« Il ne faut pas aller dans la démesure. On va aménager, nous avons des zones où nous avons prévu de faire des logements accessibles pour les Biarrots, aux alentours d’Aguilera. »
En clair, il refuse le bétonnage du poumon vert et rouge de la ville. Et sur ce point, il parle au nom de milliers de supporters, de familles, d’anciens joueurs qui voient en lui le dernier rempart.
Les casseroles ? Il assume et contre-attaque
Évidemment, on lui a ressorti les ennuis judiciaires des dernières années, notamment autour de son établissement thalasso à Hendaye. Liquidation judiciaire, dettes… les opposants en font des tonnes.
Sa réponse est cinglante, presque émouvante dans sa simplicité :
« Quand vous faites vivre près de 400 familles pendant 32 ans… Si mes détracteurs arrivent à faire ce que j’ai fait, au moins la moitié, eh bien nous serons dans un pays conquis et magnifique. »
Il ne nie pas les difficultés. Mais il rappelle le contexte : des dizaines d’années à employer, à investir, à faire rayonner le Pays basque. Et surtout, l’activité thalasso a été reprise, les emplois sauvés. Pour lui, le bilan est largement positif.
Difficile de ne pas y voir une forme de fierté basque, cette capacité à transformer l’adversité en force. Un peu comme quand il slalomait entre trois défenseurs pour aller aplatir en coin.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi lui ?
On pourrait se poser la question. À 67 ans, avec un palmarès long comme le bras et une statue déjà dans le cœur des gens, pourquoi se lancer dans la jungle politique locale ?
La réponse est peut-être dans cette phrase qu’il répète : le rassemblement. Il voit Biarritz divisée, abîmée par des années de gestion qu’il juge trop technocratique, trop déconnectée. Lui veut remettre l’humain, le collectif, le sport, la culture basque au centre.
- Une équipe déjà constituée et soudée
- Un projet travaillé depuis deux ans
- Une légitimité populaire incontestable
- Une parole libre, sans langue de bois
- Un amour viscéral pour sa ville
Autant d’atouts qui en font, sur le papier, un candidat extrêmement dangereux pour la majorité sortante.
2026, une élection déjà électrique
À seize mois du scrutin, la campagne est déjà lancée à Biarritz. D’un côté, une maire sortante qui joue la continuité et l’expérience. De l’autre, une légende vivante qui incarne le renouveau, la passion, l’authenticité.
Entre les deux, les Biarrots vont devoir choisir : la gestion rationnelle ou le cœur qui bat plus fort ?
Une chose est sûre : avec Serge Blanco candidat, les municipales 2026 à Biarritz ne ressembleront à aucune autre. Ce sera rugueux, passionné, parfois brutal. Exactement comme un bon vieux match de rugby sous la pluie d’Aguilera.
Et quelque part, c’est plutôt une excellente nouvelle pour la démocratie locale.
Alors, Serge Blanco maire de Biarritz en 2026 ? L’histoire est en train de s’écrire. Mais une chose est déjà certaine : il ne fera pas de la figuration. Quand une légende descend dans l’arène, elle vient pour gagner.
