Imaginez la scène : vous êtes à San Mamés, le chaudron basque est en fusion, et dès la 37e seconde Guruzeta vient déjà gratter le ballon dans les pieds de Zaïre-Emery. En une fraction de seconde, vous comprenez que la soirée va être longue, très longue. Mercredi soir, le PSG n’est pas simplement allé jouer un match de Ligue des Champions. Il est tombé dans un vrai piège tactique tendu par Ernesto Valverde et son Athletic. Et franchement ? Les Parisiens s’en sont plutôt bien sortis, même si le 0-0 final laisse un goût amer.
Un casse-tête nommé 4-4-2 basque
L’Athletic Bilbao version 2025, c’est l’une des équipes les plus chiantes à jouer en Europe quand elles décident de défendre. Pas dans le sens péjoratif, non : dans le sens où elles le font extrêmement bien. Valverde aligne un 4-4-2 hyper-compact qui se transforme parfois en 4-2-3-1 sans ballon, avec un marquage individuel sur les milieux dès que le ballon part sur un côté. Résultat ? Aucun espace entre les lignes, aucune supériorité numérique facile à créer à l’intérieur.
Le plan est simple sur le papier : presser très haut (l’Athletic est leader de Liga sur les récupérations dans le dernier tiers), récupérer, mais surtout ne jamais se faire punir en transition. Et ça marche plutôt pas mal : seulement 16 % de ces ballons hauts sont convertis en tir cette saison. Mercredi, sur huit récupérations hautes, ils n’ont quasiment rien produit (0,43 xG). Moralité ? Le piège fonctionne… tant que l’adversaire ne trouve pas la clé.
Et c’est là que ça devient intéressant.
Les premières minutes : le PSG prend l’orage de plein fouet
Les vingt premières minutes ressemblaient à un cours de survie. Le PSG a perdu plusieurs ballons dangereux, a parfois été trop lent dans les transmissions, mais a aussi montré les premières pistes. Je me souviens notamment de cette séquence à la 3e minute : construction côté droit, longue, passe laser de Nuno Mendes vers Fabian Ruiz entre les lignes, renversement instantané et frappe de Zaïre-Emery. Pas cadrée, mais l’idée était là.
Puis il y a eu cette récupération haute de Mendes sur Jauregizar vers la 15e, ou encore cette passe de Pacho qui trouve encore Ruiz dans le dos du milieu. Petit à petit, on sentait que Paris cherchait à exploiter les rares décalages que laissait le marquage individuel basque.
« Si tu laisses un joueur du PSG libre à l’intérieur, surtout s’il s’appelle Vitinha ou Ruiz, tu es mort. »
La 19e minute l’a parfaitement illustré. Sancet décroche un peu trop, Vitinha se retrouve seul au niveau du rond central, tourne le jeu en deux touches et manque de peu d’ouvrir le score via Mayulu et Ruiz. Alerte rouge pour Bilbao, qui ajuste immédiatement : Sancet se cale mieux sur le deuxième attaquant, les latéraux sortent plus vite, les couvertures sont plus propres. Fin de la récré.
Luis Enrique sort l’artillerie : les trois armes qui ont fait mal
À partir de la demi-heure, on a senti le tournant. Luis Enrique demande à Barcola et Kvaratskhelia d’inverser les ailes (très bon coaching), accélère la circulation et surtout, surtout, commence à exploiter trois schémas récurrents qui ont mis l’Athletic en grande difficulté.
1. Exploiter la « zone morte » avec Joao Neves
L’une des plus belles séquences du match arrive vers la 35e. Le PSG construit patiemment à gauche, attend le bon moment. Luis Enrique hurle depuis son banc pour que Joao Neves vienne se placer dans l’espace entre le milieu axial droit basque et l’ailier qui suit Mendes. C’est subtil, presque invisible à l’œil nu, mais mortel.
Vitinha trouve Neves dans cette fameuse zone morte, Barcola (fraîchement passé à droite) colle à la ligne, prend la profondeur, dribble Areso (son seul dribble réussi du match !) et centre en retrait pour Ruiz qui frappe à côté. On était à ça du 1-0. Cette idée de venir occuper l’espace que le bloc adverse laisse quand il coulisse a été utilisée plusieurs fois avec succès.
2. Surcharge latérale + fixation/renversement express
Autre arme fatale : la surcharge d’un côté pour créer un 3-contre-2 temporaire. Exemple parfait en première période : Mendes monte très haut, Barcola redescend servir d’appui, Ruiz vient en soutien. Pendant ce temps, Kvara fixe le latéral gauche adverse et Zaïre-Emery se projette. Le ballon arrive sur Mendes qui résiste, tourne, trouve Zaïre-Emery qui lance Mayulu au point de penalty. Unai Simon sort la parade du siècle. 1,76 xGOT pour le gardien basque en fin de match, ça veut tout dire.
3. Le « passe-et-va » extérieur pour exploser ensuite
Le clou du spectacle, c’est cette action où tout le monde a cru que Ruiz allait frapper… mais non. Mendes s’appuie sur Barcola en une-deux, Ruiz fait semblant de partir dans le dos d’Areso (leurre génial), ce qui fait reculer Jauregizar et ouvre un boulevard. Mendes lance Ruiz du droit, Vivian est aspiré, Barcola prend l’espace laissé libre à pleine vitesse et va taper la barre transversale. J’en ai encore des frissons.
Cette séquence résume parfaitement ce qu’a essayé de faire le PSG toute la seconde période : patience, fixation, accélération brutale dès qu’un espace s’ouvre. Et ça a marché. Sauf que devant, il y avait un mur nommé Unai Simon.
Unai Simon, le facteur X qui change tout
On peut tourner ça dans tous les sens : sans l’immense match du gardien basque, le PSG rentrait avec les trois points. 1,76 expected goals against sauvés, une barre, un arrêt réflexe devant Mayulu, un autre devant Doué en fin de match… L’Espagnol a tout simplement été monstrueux.
Je ne vais pas vous mentir : j’ai rarement vu un gardien peser autant sur un résultat cette saison en Ligue des Champions. Il a transformé des occasions quasi certaines en simple 0-0. Chapeau.
Ce qu’il faut retenir pour la suite
- Le PSG version Luis Enrique sait désormais parfaitement attaquer un bloc bas ultra-compact – c’est acquis.
- Les inversions d’ailiers et les projections des latéraux (Mendes en tête) deviennent des armes létales.
- Fabian Ruiz est en train de devenir le maître à jouer qu’on attendait tous. Sa lecture et sa qualité de passe dans les petits espaces sont dingues.
- Barcola gagne en percussion quand il joue à droite (à noter pour plus tard).
- Il manque encore un vrai finisseur clinique dans les 6 mètres. Mayulu et Doué ont fait ce qu’ils ont pu, mais ça coince au dernier geste.
Au final, ce 0-0 à Bilbao n’est pas une contre-performance. C’est un match référence sur la capacité du PSG à résoudre des problèmes tactiques complexes en direct. Face à Liverpool, Arsenal ou le Bayern plus tard dans la saison, ces solutions-là vont peser lourd.
Parce que oui, on parle quand même d’une équipe qui vient de tenir tête aux champions d’Europe en titre dans l’un des stades les plus chauds du continent, en créant assez d’occasions pour gagner deux fois le match.
Prochain rendez-vous ? On verra si ces parades fonctionnent aussi bien quand le gardien d’en face ne s’appelle pas Unai Simon. Mais une chose est sûre : Luis Enrique a montré qu’il avait plus d’une corde à son arc. Et franchement, ça fait plaisir à voir.
Et vous, quel moment du match vous a le plus marqué ? La barre de Barcola ? L’arrêt de Simon devant Mayulu ? Dites-moi tout en commentaire, on débriefe ensemble.
