Franchement, quand j’ai appris qu’un Ironman allait poser ses bouées juste sous les fenêtres de Louis XIV, j’ai d’abord cru à une blague. Versailles, la ville-musée, celle où on fait la queue pendant des heures pour voir les appartements du Roi-Soleil, allait accueillir 2 000 tarés prêts à nager 1,9 km, pédaler 90 km et courir un semi-marathon d’affilée ? Et pourtant, c’est officiel depuis hier soir : le conseil municipal a voté à l’unanimité. Le 12 juillet 2026, la cité royale entrera dans le club très fermé des villes françaises Ironman.
Et ça, croyez-moi, ce n’est pas rien.
Versailles rejoint le cercle très fermé des Ironman français
Pour ceux qui découvrent le truc, un petit rappel s’impose. L’Ironman, ce n’est pas juste une course. C’est une marque, un mythe, un business colossal détenu par un groupe américain qui fait payer cher le droit de porter son logo. Nice a ouvert le bal en 2005, puis Vichy, Aix-en-Provence, Les Sables-d’Olonne et Tours ont suivi. Chaque fois, les villes alignent des centaines de milliers d’euros pour avoir l’honneur d’accueillir ces athlètes venus du monde entier.
Versailles ? Elle a dit non. Enfin, presque.
Le coup de génie financier de la mairie
Le maire a été clair : pas question de sortir 275 000 euros juste pour le droit d’utilisation de la marque. « On n’a pas les moyens, et même si on les avait, je préférerais les donner aux associations locales », a-t-il expliqué devant le conseil. Résultat ? Une négociation rondement menée : la ville est exonérée des frais d’inscription habituels. Elle apportera « seulement » 8 à 10 000 euros au club organisateur, du matériel et des agents municipaux. Pas mal, non ?
Dans le monde très codifié de l’Ironman, c’est presque une première. Versailles a réussi là où d’autres se sont pliés.
« Je considère que nous n’avons pas les moyens. Je préfère mettre 275 000 euros pour les associations, si on les avait, que pour une manifestation »
Le maire de Versailles, lors du conseil municipal
Le parcours : entre histoire et performance
Maintenant, parlons du concret. Le format choisi pour cette grande première ? L’Ironman 70.3 – comprendre 1,9 km de natation + 90 km de vélo + 21,1 km de course à pied. Pas le full Ironman (qui fait le double), mais déjà un sacré morceau.
Le départ natation aura lieu dans la Pièce d’eau des Suisses, ce grand bassin créé au XVIIe siècle pour les besoins… des jardins du château. Oui, vous nagerez là où les soldats suisses de Louis XIV faisaient leurs manœuvres. L’arrivée course à pied ? Avenue de Paris, avec vue imprenable sur le château. Frissons garantis.
- Natation : 1,9 km dans la Pièce d’eau des Suisses (1 boucle)
- Vélo : 90 km avec un aller-retour vers Rambouillet au cœur de la vallée de Chevreuse (dénivelé raisonnable mais roulant)
- Course à pied : 21,1 km en 3 boucles de 7 km entre la Pièce d’eau et l’avenue de Paris
Petite précision qui a son importance : le parc du château lui-même ne sera pas traversé par les coureurs. Dommage ? Peut-être. Mais ça évite les complications avec les milliers de touristes quotidiens. Et puis, courir devant la façade, c’est déjà pas mal, non ?
Pourquoi ça cartonne déjà (alors que les inscriptions ne sont même pas ouvertes)
Regardez ce qui s’est passé aux Sables-d’Olonne : 3 300 dossards partis en six jours seulement. À Versailles, on table « modestement » sur 2 000 participants pour la première édition. Mais soyons réalistes : avec le château en toile de fond, on risque de faire exploser les serveurs le jour de l’ouverture des inscriptions (probablement début janvier).
Et il y a une raison très simple à ça.
Les triathlètes adorent les destinations « bucket list ». Hawaii, Nice, Lanzarote… Ce sont des lieux où on vient pour la course, mais aussi pour le voyage, les photos, le prestige. Versailles ? C’est clairement le nouveau Graal français. Nager là où Louis XIV se baladait en gondole, pédaler dans la vallée de Chevreuse, finir face au château… Même les pros vont se battre pour un dossard.
Les retombées économiques : le vrai jackpot
On parle souvent du coût d’organisation, mais rarement des bénéfices. Pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Un participant à un Ironman 70.3 reste en moyenne 3 à 4 jours sur place, souvent accompagné. Hôtels, restaurants, visites culturelles, locations de voiture… Les études montrent que chaque athlète génère plusieurs milliers d’euros de retombées directes et indirectes.
Pour Versailles, déjà saturée en haute saison, c’est une aubaine en juillet – période traditionnellement plus calme après la frénésie des JO 2024. Les hôtels du Chesnay, de Saint-Cyr, voire de Paris intra-muros vont se remplir. Les restaurants vont tourner à plein régime. Et les cars de touristes chinois risquent de côtoyer des Australiens en combinaison néoprène. Drôle de mélange, mais économiquement gagnant.
« Pour ce type de manifestation, les gens restent en moyenne 3 à 4 jours et consomment sur place »
L’adjoint aux sports de Versailles
Et après ? Vers un full Ironman à Versailles ?
Officiellement, on commence par un 70.3. Mais tout le monde a déjà la suite en tête. Si l’édition 2026 est un succès (et il n’y a aucune raison qu’elle ne le soit pas), la porte est grande ouverte pour passer au format complet : 3,8 km de natation, 180 km de vélo, 42,2 km de course à pied.
Techniquement, c’est possible. La natation pourrait se faire en deux boucles dans la Pièce d’eau, le vélo en deux aller-retours plus longs vers la forêt de Rambouillet, la course à pied en plusieurs boucles élargies. Logistiquement ? Plus compliqué, mais pas infaisable. Après tout, Nice le fait bien depuis vingt ans.
Et puis, avouons-le : finir un full Ironman face au château de Versailles au coucher du soleil, avec « You’ll never walk alone » dans les oreilles… Ça ferait une sacrée ligne sur le CV sportif.
Le rôle clé du Versailles Triathlon
Derrière ce projet, il y a un club local qui bosse dans l’ombre depuis quinze ans : le Versailles Triathlon. C’est eux qui organisent chaque année le Triathlon du Roi – une épreuve sympa, familiale, mais qui n’a rien à voir avec l’ampleur d’un Ironman.
Cette fois, ils passent dans la cour des grands. Avec le soutien de la ville et du château, ils deviennent co-organisateurs d’une épreuve internationale. Pour un club associatif, c’est une reconnaissance énorme. Et une responsabilité dingue.
Mais quand on connaît la passion des bénévoles versaillais, on sait qu’ils vont assurer.
Ce que ça dit de Versailles en 2025
Il y a encore quelques années, Versailles était vue comme une ville figée dans son passé royal. Les JO 2024 ont déjà commencé à changer ça avec les épreuves équestres et le pentathlon moderne. L’Ironman 70.3 va achever la transformation.
La ville-préfecture des Yvelines assume désormais son statut de grande destination sportive internationale. Entre héritage et modernité, elle trace sa route. Et franchement ? Ça lui va plutôt bien.
Alors oui, il y aura des routes fermées, du bruit, des perturbations. Mais il y aura aussi des gamins au bord de l’eau qui verront passer des athlètes du monde entier. Des souvenirs qui marquent une vie. Et peut-être quelques vocations.
Le 12 juillet 2026, Versailles ne sera plus tout à fait la même. Et quelque part, le Roi-Soleil doit sourire en regardant tout ça depuis ses appartements.
Perso, j’ai déjà coché la date.
Et vous, vous serez au bord de la Pièce d’eau des Suisses pour encourager les finishers ? Ou peut-être… sur la ligne de départ ?
