Vous souvenez-vous de cette euphorie incroyable après la Coupe du monde 2022 ? Le Maroc qui termine quatrième, une performance historique pour le football africain, et au centre de tout ça, un homme qui devient presque un dieu vivant : Walid Regragui. Trois ans plus tard, en pleine Coupe d’Afrique des Nations, le même homme se retrouve sous un feu nourri de critiques. Comment un héros peut-il si vite devenir la cible préférée des supporters et des médias ? C’est fascinant, non ?
Je suis toujours surpris de voir à quelle vitesse l’opinion publique peut basculer dans le sport de haut niveau. Au Maroc, pays passionné de football comme peu d’autres, la pression est permanente. Et aujourd’hui, le sélectionneur des Lions de l’Atlas traverse une zone de turbulences sérieuse juste avant un match décisif contre la Zambie.
La pression monte en pleine CAN
La compétition continentale bat son plein, et chaque conférence de presse de Regragui ressemble à un exercice d’équilibriste. Les questions arrivent de toutes parts, parfois piquantes, souvent insinuantes. On lui demande pourquoi il a sorti un joueur clé alors qu’il venait juste de le faire entrer, ou même s’il a expressément interdit à ses attaquants de tenter leur chance. Le ton est rarement agressif frontalement, mais les sous-entendus sont clairs.
Ce qui m’impressionne, c’est sa capacité à garder le sourire. Il répond toujours avec précision, développe ses choix tactiques, ne fuit jamais le débat. J’ai vu des coaches craquer sous moins que ça, mais lui tient bon. Peut-être que ça bouillonne à l’intérieur, mais extérieurement, il reste maître de lui.
Un passé glorieux qui ne protège plus
Revenons un peu en arrière. Avant de prendre les rênes de la sélection nationale, Regragui a construit un parcours impressionnant en club. Champion avec le FUS de Rabat, puis au Qatar avec Al-Duhail, avant un doublé historique avec le Wydad Casablanca : championnat et Ligue des champions africaine la même année. Et bien sûr, cette demi-finale mondiale qui a fait vibrer tout un continent.
À l’époque, on parlait de lui comme d’un génie tactique, d’un motivateur hors pair. Les joueurs le suivaient aveuglément. Achraf Hakimi, notamment, n’a jamais caché son admiration. Mais depuis l’élimination en huitièmes lors de la précédente CAN face à l’Afrique du Sud, quelque chose s’est brisé. Même une série exceptionnelle de victoires n’a pas suffi à effacer cette déception.
Depuis que le Maroc a fini quatrième, c’est le nouveau Maroc. Le coach a donné un nouvel état d’esprit à ce groupe, je ne l’avais jamais vu.
– Achraf Hakimi, en conférence de presse
Cette sortie récente d’Hakimi montre que les joueurs restent solidaires. Il a même fait le parallèle avec son club, rappelant que la critique facile existe partout quand les résultats ne suivent pas immédiatement.
Les réseaux sociaux, amplificateur impitoyable
Si la presse pose des questions parfois tendancieuses, les réseaux sociaux, eux, ne se gênent pas. On y trouve de tout : analyses tactiques poussées, mais aussi attaques personnelles virulentes. Certains supporters appellent même à un changement de sélectionneur en pleine compétition, évoquant le précédent ivoirien avec Emerse Faé qui avait pris l’équipe en cours de route et remporté le titre.
C’est là que je trouve la situation la plus injuste. Imaginer remplacer un coach au milieu d’une CAN, alors qu’il a prouvé par le passé sa capacité à gérer les moments cruciaux ? C’est risqué, et ça envoie un message terrible aux joueurs.
- Des victoires jugées « sans saveur » malgré les trois points
- Des choix de composition contestés à chaque match
- Une attente démesurée après l’exploit mondial
- La comparaison constante avec d’autres techniciens locaux
Ces points reviennent sans cesse dans les débats en ligne. Et pourtant, quand on regarde les chiffres, le Maroc reste l’une des équipes les plus solides du continent.
Tarik Sektioui, l’alternative qui fait parler
Dans cette tempête, un nom revient souvent : Tarik Sektioui. L’ancien attaquant, aujourd’hui à la tête des équipes de jeunes, impressionne avec ses résultats. Médaille de bronze aux Jeux olympiques, titre au CHAN, victoire récente en Coupe arabe des nations avec les locaux. Son style offensif plaît, et beaucoup le voient comme le successeur idéal.
Le problème ? Cette comparaison permanente mine l’autorité du sélectionneur actuel. Même certains anciens joueurs ou techniciens alimentent le débat, parfois maladroitement. On oublie souvent que Sektioui lui-même parle plutôt d’une relève après la prochaine Coupe du monde.
Personnellement, je trouve ça prématuré. Regragui a démontré qu’il savait gagner les titres qui comptent. Laisser une CAN entière pour juger définitivement me semble plus sage.
La Fédération et l’exigence absolue
Derrière tout ça, il y a aussi la position très claire de la Fédération marocaine. Le président, Fouzi Lekjaa, ne laisse aucune marge : c’est le titre ou rien. Cette exigence, légitime vu les investissements et le niveau de l’équipe, met une pression énorme sur les épaules du coach.
Mais est-ce vraiment réaliste ? La CAN est une compétition imprévisible, où les surprises sont fréquentes. Regardez les dernières éditions : des favoris éliminés précocement, des outsiders sacrés. Vouloir absolument le trophée peut parfois paralyser plus qu’il ne motive.
Le match contre la Zambie, un tournant décisif
Aujourd’hui, tout se joue face à la Zambie pour la troisième journée de poules. Une victoire qualifierait presque certainement le Maroc pour les huitièmes, et pourrait calmer temporairement les critiques. Un résultat mitigé, en revanche, ferait exploser la cocotte-minute.
Regragui le sait. Il a choisi de faire bouclier, protégeant ses joueurs pour qu’ils se concentrent uniquement sur le terrain. C’est une attitude que je respecte profondément. Dans ces moments-là, un sélectionneur doit parfois accepter d’être le paratonnerre.
Les joueurs, eux, semblent touchés par cette solidarité. Hakimi n’est pas le seul à prendre publiquement la défense de son coach. On sent une vraie cohésion dans le groupe, ce qui pourrait faire la différence dans les matchs à élimination directe.
Et si la victoire changeait tout ?
Ce qui est fou dans le football, c’est sa capacité à tout effacer en un instant. Un beau parcours, une demi-finale, un titre, et Regragui redeviendrait le héros incontesté. Le peuple marocain est passionné, mais aussi très chaleureux quand les résultats suivent.
J’ai vu ça tant de fois. Des coaches critiqués pendant des mois, soudain portés en triomphe après une grande victoire. L’aspect le plus intéressant, peut-être, c’est de voir si cette pression supplémentaire motive ou inhibe l’équipe.
Pour ma part, je pense que Regragui a les ressources pour transformer cette adversité en force. Son expérience, son palmarès, sa connaissance du football marocain jouent en sa faveur. Il suffit parfois d’un match référence pour relancer la machine.
Ce que cette situation nous dit du football moderne
Au-delà du cas marocain, cette histoire illustre parfaitement les exigences démesurées du football actuel. Les réseaux sociaux amplifient tout, la presse cherche le buzz, les supporters veulent des résultats immédiats. Peu importe le passé glorieux, seul compte le présent.
Mais est-ce vraiment juste ? Un coach qui a marqué l’histoire du football africain mérite-t-il d’être jugé uniquement sur quelques matchs ? Je ne crois pas. Le temps long, la construction, la vision, tout ça semble parfois oublié au profit de l’émotion immédiate.
- La performance historique en Coupe du monde reste gravée
- Le palmarès en club parle de lui-même
- La solidarité des joueurs montre un vestiaire uni
- La CAN est encore longue et pleine de surprises
Ces éléments devraient, à mon avis, tempérer les jugements hâtifs. Attendons la fin de la compétition avant de tirer des conclusions définitives.
En attendant, je suivrai avec attention ce match contre la Zambie et les suivants. Parce qu’au fond, c’est ça qu’on aime dans le football : cette capacité à écrire des histoires incroyables, où un homme sous pression peut, en quelques semaines, redevenir un héros national. L’aventure continue, et elle promet d’être passionnante.
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