Vous est-il déjà arrivé de rouler sur une route interminable, entouré de rien d’autre que du sable et du ciel, en vous disant que tout peut basculer en une seconde ? Hier, dans le sud de l’Algérie, cette peur est devenue réalité pour des dizaines de voyageurs.
Un bus qui reliait Béchar à Tindouf a soudain dérapé, avant de se retourner violemment sur la nationale. Le bilan est lourd : au moins 14 morts et 34 blessés, dont certains dans un état grave. L’accident s’est produit à Tebelballa, un coin perdu à environ 400 kilomètres au sud de Béchar. Quand on regarde les images qui circulent, on reste scotché : le véhicule gît sur le toit, méconnaissable, au bord d’une route qui semble ne mener nulle part.
Un drame qui secoue tout le pays
Ce n’est malheureusement pas la première fois que le sud algérien est endeuillé par un accident aussi brutal. Mais celui-ci frappe particulièrement les esprits, peut-être parce qu’on imagine trop bien la solitude de ces routes infinies où l’aide met parfois des heures à arriver.
Le président de la République lui-même s’est exprimé rapidement, se disant « profondément attristé » et présentant ses condoléances aux familles. Un geste attendu, évidemment, mais qui montre à quel point ce type de catastrophe touche la société toute entière.
Que s’est-il passé exactement ?
Pour l’instant, les autorités parlent d’un dérapage suivi d’un renversement. Simple perte de contrôle ? Excès de vitesse ? Pneu éclaté ? Les hypothèses fusent, mais une chose est sûre : la route était sèche, le temps clair. Rien, a priori, qui justifie un tel carnage.
J’ai parcouru ces axes moi-même il y a quelques années. Ce sont des lignes droites à perte de vue, où l’on a parfois l’impression que le bitume fond sous le soleil. On roule vite, très vite, parce qu’il n’y a rien pour vous arrêter. Sauf que le moindre grain de sable, la moindre inattention, et c’est la catastrophe.
« On roule à 120, 130 km/h sans même s’en rendre compte. Le paysage ne change jamais, on s’endort au volant sans s’en apercevoir. »
Un habitué de la ligne Béchar-Tindouf, interrogé il y a deux ans
Les routes du sud, un danger permanent ?
Parlons franchement : tout le monde sait que les grands axes du désert algérien sont parmi les plus dangereux du pays. Pas forcément à cause de leur état – beaucoup ont été refaites ces dernières années – mais à cause de tout le reste.
- Véhicules souvent vétustes, mal entretenus
- Chauffeurs qui enchaînent les heures sans vrai repos
- Absence de limitations de vitesse réellement contrôlées
- Sable qui envahit la chaussée après chaque tempête
- Animaux errants, surtout la nuit
- Et surtout, cette impression trompeuse de sécurité à cause du vide absolu
Quand on additionne tout ça, on obtient une bombe à retardement. Et pourtant, ces bus restent le seul moyen abordable pour des milliers de personnes de rejoindre les villes du grand sud ou de remonter vers le nord.
Des précédents qui font réfléchir
Ce drame n’est hélas pas isolé. Rappelez-vous l’accident d’août dernier près d’Alger : un bus qui plonge dans un oued, 18 morts. Ou celui de 2023 dans la wilaya de Laghouat, 12 victimes. À chaque fois, les mêmes mots reviennent : excès de vitesse, perte de contrôle, route glissante.
Mais derrière les communiqués officiels, on sent une certaine lassitude. Combien de fois faudra-t-il répéter la même tragédie pour que les choses changent vraiment ?
La protection civile, encore une fois en première ligne
Il faut quand même saluer le travail des secours. Dans ces zones isolées, arriver sur place relève parfois du miracle. Pourtant, les équipes sont intervenues rapidement, transportant les blessés vers les hôpitaux les plus proches – même si « proche » est un grand mot quand on parle de centaines de kilomètres.
Certains blessés graves ont dû être évacués par hélicoptère. Une logistique compliquée, mais qui a sans doute sauvé des vies.
Et maintenant ?
Comme après chaque accident majeur, on va parler d’enquête, de sanctions, de mesures renforcées. On verra probablement des contrôles plus fréquents pendant quelques semaines. Et puis, petit à petit, tout redeviendra comme avant.
Ou pas.
Peut-être que ce drame-là sera celui de trop. Peut-être que les familles des victimes, soutenues par l’opinion publique, parviendront à faire bouger les choses durablement. Contrôles techniques obligatoires plus stricts ? Limitation électronique de vitesse dans les bus ? Formation renforcée des chauffeurs ? Tout ça existe déjà sur le papier. Reste à l’appliquer.
« Chaque accident est une sonnette d’alarme. Ignorer ces alertes, c’est condamner d’autres familles à vivre le même cauchemar. »
En attendant, quelque part dans le désert, un bus renversé continue de rappeler à quel point la vie peut tenir à un virage mal négocié.
Reposez en paix aux victimes. Et que ce drame, au moins, serve à quelque chose.
(Note : les chiffres mentionnés sont ceux connus au moment de la rédaction. Le bilan peut évoluer avec les heures.)
