Vous êtes sur une route nationale, tard le soir, musique à fond, vous rentrez chez vous après une bonne soirée. Et d’un coup, sans prévenir, un bloc de béton traverse votre pare-brise. En une fraction de seconde, tout bascule. C’est exactement ce qui est arrivé à William, 21 ans, fin octobre en Bretagne. Et ceux qui ont jeté ce projectile ? Deux adolescents qui, aujourd’hui, dorment en prison.
Franchement, quand j’ai lu cette histoire, j’ai eu un frisson. On parle beaucoup de la violence en ville, des règlements de comptes, mais là… c’est le genre d’acte gratuit, presque « pour rire », qui finit dans le sang. Et le pire, c’est que ça n’arrive pas qu’une fois.
Un jeu mortel au-dessus de la nationale
Reprenons depuis le début. Nous sommes dans la nuit du 28 au 29 octobre 2024, sur la RN176, à hauteur de Quévert, près de Dinan dans les Côtes-d’Armor. Deux jeunes décident de se poster sur un pont qui enjambe cette voie rapide. Dans leurs sacs : des pierres, des balles de golf, et surtout un cylindre de béton.
Ils commencent à viser les voitures qui passent en contrebas. D’abord des petits objets, puis plus gros. Deux véhicules sont touchés. Dans l’un d’eux, le passager, un jeune homme de 21 ans, reçoit le bloc de béton de plein fouet. Il décède sur le coup.
Sur le moment, les gendarmes arrivent vite. Des témoins ont vu deux silhouettes s’enfuir. Mais personne n’est interpellé cette nuit-là. L’enquête, elle, va pourtant avancer très sérieusement.
Les indices qui ne mentent pas
Les militaires récupèrent plusieurs objets abandonnés sur place : balles de golf, pierres… Et surtout, des traces ADN. Deux profils masculins bien nets. À partir de là, le travail de fourmi commence.
Pendant ce temps, en juillet déjà, la police avait surpris trois adolescents en train de jeter des ballons d’eau (et bien pire) depuis un autre pont. L’un d’eux avait dans son sac des pierres et… des balles de golf. Le genre de coïncidence qui met la puce à l’oreille.
En recoupant téléphonie, géolocalisation et témoignages, les enquêteurs finissent par identifier formellement deux des trois jeunes. Mercredi dernier, ils sont placés en garde à vue. Et là, surprise : ils passent rapidement aux aveux.
Ils ont reconnu avoir visé les voitures d’abord avec des balles de golf, puis une pierre, et enfin le bloc de béton sur le second véhicule.
Ils n’ont pas d’antécédents judiciaires. Des adolescents lambda, en apparence. Et pourtant.
De la garde à vue à la prison
Jeudi, direction le parquet de Rennes – compétent pour les affaires criminelles impliquant des mineurs. L’information judiciaire est ouverte pour « violences en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner », entre autres qualifications.
En clair : ils n’avaient pas l’intention de tuer, mais ils savaient parfaitement que lancer des blocs de béton depuis 5 ou 6 mètres de haut sur des voitures lancées à 110 km/h pouvait provoquer la mort. La justice ne rigole pas avec ça.
Résultat : les deux jeunes ont été présentés à un juge des libertés et de la détention. Ce dernier a ordonné leur placement en détention provisoire dans l’attente d’une nouvelle audience prévue le 9 décembre. Ils sont donc écroués dès maintenant.
Ces faits qui se répètent un peu trop
Ce qui me choque le plus, c’est que ce n’est pas un cas isolé. Souvenez-vous de Josyane et Gilles, ce couple fauché en 2017 sur l’A4 parce que des gamins jetaient des pierres depuis un pont. Ou encore cette femme tuée en 2019 dans l’Oise par un parpaing. Chaque fois, le même scénario : des jeunes qui « s’amusent », un objet lourd, et une vie brisée.
- 2014 : un nourrisson grièvement blessé par une pierre jetée sur l’A21
- 2016 : une conductrice tuée par un plot en béton sur l’A7
- 2019 : une femme de 52 ans tuée dans l’Oise
- 2021 : un adolescent lance une trottinette depuis un pont, un automobiliste perd un œil
- 2024 : William, 21 ans, en Bretagne
La liste est longue, et elle fait froid dans le dos. À chaque fois, les auteurs sont des mineurs ou de très jeunes majeurs. À chaque fois, ils minimisent : « On voulait juste faire peur », « On ne pensait pas que ça ferait autant de mal ».
Mais quand vous lancez un objet de plusieurs kilos depuis un pont, la physique est implacable. À 110 km/h, l’impact est équivalent à une chute de bien plus haut. C’est une arme, ni plus ni moins.
Pourquoi font-ils ça ?
La question qui revient sans cesse : qu’est-ce qui peut pousser des ados sans histoire particulière à commettre un acte aussi dangereux ? L’ennui ? Le défi entre copains ? La recherche de sensations fortes ? Un mélange de tout ça ?
J’ai discuté avec des éducateurs spécialisés il y a quelques années sur ce genre de phénomènes. Beaucoup parlent d’un effet de groupe : tout seul, personne n’aurait osé. À plusieurs, on se sent invincible. On filme avec le téléphone, on rit, on poste sur les réseaux… jusqu’au moment où ça dérape gravement.
Et puis il y a cette déconnexion totale avec la réalité de l’acte. Depuis le haut du pont, la voiture n’est qu’une petite lumière qui file. On ne voit pas les visages. On n’humanise pas les victimes. C’est presque un jeu vidéo, sauf que quand on perd, c’est pour de vrai.
La réponse pénale : assez sévère ?
Beaucoup de voix s’élèvent déjà pour dire que la détention provisoire pour des mineurs, même dans ce genre d’affaires, c’est trop dur. D’autres, au contraire, estiment que c’est le seul moyen de marquer le coup.
Personnellement, je suis partagé. D’un côté, ce sont des gamins qui ont probablement agi sans mesurer toute la portée de leurs actes. De l’autre… une famille pleure un fils, un frère, un ami. Et cette famille, elle, n’aura pas de seconde chance.
La peine définitive sera décidée plus tard, après expertise psychiatrique, débats sur la responsabilité pénale, etc. Mais déjà, le message est clair : ce genre de « blague » peut vous envoyer derrière les barreaux très longtemps, même à 15 ou 16 ans.
Et nous, sur la route, que peut-on faire ?
Honnêtement, pas grand-chose à part rester vigilant. Certains ponts sont désormais équipés de grillages ou de filets, mais c’est loin d’être systématique. Rouler un peu plus au milieu de la voie sous un pont peut parfois limiter les risques, mais ça reste aléatoire.
Le vrai levier, c’est la prévention en amont. Dans les collèges, les lycées, auprès des parents. Expliquer que « faire le con » depuis un pont, ce n’est pas une petite bêtise, c’est potentiellement un meurtre.
Des campagnes existent déjà, mais elles restent trop discrètes. Peut-être qu’un drame comme celui-ci, aussi terrible soit-il, permettra enfin de faire bouger les choses.
William avait 21 ans. Il rentrait probablement d’une soirée entre amis, ou allait rejoindre quelqu’un qu’il aimait. Sa vie s’est arrêtée net à cause d’un bloc de béton lancé « pour rigoler ».
Aujourd’hui, deux adolescents sont en prison. Leurs familles doivent être effondrées. Et une autre famille vit l’impensable.
Si cette histoire peut éviter ne serait-ce qu’un seul autre drame du même genre, alors elle n’aura pas été totalement vaine. Mais franchement, on préférerait tous ne plus jamais avoir à en parler.
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