Vous arrivez parfois à un point où une simple info vous glace le sang. Pas parce qu’elle est spectaculaire, non. Mais parce qu’elle touche à quelque chose de profondément inquiétant sur l’époque qu’on vit. Hier, deux gamins de 16 ans ont été écroués pour un projet d’attaque antisémite. Seize ans. L’âge où, pour la plupart d’entre nous, on galérait avec les contrôles de maths ou les premiers émois amoureux.
Ils, eux, échangeaient des messages sur une volonté de passer à l’acte « sous cinq jours » et postaient des photos de couteaux. Le tout dans un groupe réunissant des sympathisants de l’État islamique. Quand on lit ça, on a envie de se pincer. Et pourtant, c’est la réalité brute de 2025.
Le rajeunissement brutal de la menace djihadiste
Ce qui frappe d’entrée, c’est le chiffre. Ces deux adolescents sont les 19e et 20e mineurs mis en cause dans une affaire de terrorisme depuis janvier 2025. En onze mois. Vingt jeunes. C’est du jamais-vu. On parlait déjà d’un rajeunissement depuis quelques années, mais là, on est dans une accélération folle.
Et attention, il ne s’agit pas de gamins qui « likent » bêtement des vidéos choquantes. On parle de projets concrets, de cibles identifiées (ici des personnes ou lieux liés à la communauté juive), d’adhésion idéologique claire à Daech et, surtout, d’une détermination qui fait froid dans le dos.
Un mode opératoire désormais classique… et terrifiant
Le scénario est presque devenu une routine macabre pour les services antiterroristes :
- Un ou plusieurs adolescents s’isolent progressivement
- Ils basculent dans des groupes fermés sur des applications chiffrées
- Ils consomment massivement la propagande de l’État islamique (vidéos, anasheeds, textes)
- Ils finissent par franchir le pas du projet d’action violente
Ce qui change, c’est la vitesse. Là où il fallait autrefois des mois voire des années pour qu’un adulte se radicalise au point de passer à l’acte, certains adolescents font le chemin en quelques semaines. Internet a compressé le temps de la haine.
« On constate une radicalisation express, presque foudroyante chez certains jeunes. Ils passent de la curiosité malsaine à la planification d’attentat en un rien de temps. »
– Un enquêteur spécialisé, sous couvert d’anonymat
L’antisémitisme, cible privilégiée des plus jeunes djihadistes
Autre élément qui revient trop souvent : la haine des Juifs. Sur les vingt mineurs poursuivis cette année, une proportion impressionnante visait spécifiquement des cibles juives – synagogues, écoles, commerces casher, ou simplement « des Juifs » sans plus de précision.
Ce n’est pas nouveau, hélas. L’antisémitisme est un pilier de l’idéologie djihadiste depuis les années 2000. Mais chez ces très jeunes, il semble prendre une forme encore plus brute, presque primitive. Pas d’analyse géopolitique alambiquée sur le conflit israélo-palestinien. Non. Juste une haine pure, distillée en boucle dans les vidéos de propagande.
Et ça marche. Terriblement bien.
Comment en arrive-t-on là à 16 ans ?
La question taraude tout le monde. Familles, profs, éducateurs, flics… Personne n’a de réponse simple. Mais plusieurs facteurs se croisent presque toujours :
- Un sentiment de vide ou de révolte adolescent classique, mais amplifié
- Une crise identitaire dans une société perçue comme injuste
- L’impression d’appartenir enfin à quelque chose de « grand » en rejoignant la « oumma » mondiale
- La consommation addictive de contenus ultra-violents qui désensibilisent totalement
- L’absence de contre-discours assez fort ou assez tôt
Certains parlent aussi d’un phénomène de gamification de la radicalisation. Les groupes en ligne fonctionnent comme des jeux : niveaux à passer, défis, récompenses symboliques (reconnaissances du groupe). Passer à l’acte devient le « boss final ».
Effrayant, non ?
La réponse des services : entre efficacité et course permanente
Il faut le dire clairement : sans l’action ultra-rapide des services de renseignement, cette affaire se serait probablement terminée dans le sang. Un message repéré, une photo de couteau, une alerte, une géolocalisation, une interpellation en quelques jours. C’est du travail de haute volée.
Mais tout le monde sait que la DGSI et les autres services courent après le temps. Ils traitent des centaines de signalements par mois. Et chaque fois qu’ils en neutralisent un, dix nouveaux profils inquiétants apparaissent.
Le paradoxe ? Plus ils sont efficaces, plus on découvre l’ampleur du problème. Parce que chaque affaire déjouée révèle qu’il y en a des dizaines d’autres en gestation.
Et maintenant ?
Les deux adolescents sont en détention provisoire. Ils risquent gros – jusqu’à 30 ans de prison même s’ils sont mineurs au moment des faits, vu la qualification terroriste. Mais la justice pénale, aussi nécessaire soit-elle, ne suffira pas.
On a besoin d’une réponse globale :
- Mieux repérer en amont (école, famille, réseaux sociaux)
- Développer des contre-discours crédibles tenus par des jeunes eux-mêmes
- Réguler enfin sérieusement les plateformes qui laissent circuler la propagande
- Former massivement les éducateurs, profs, animateurs à détecter les signaux
- Et surtout, redonner du sens à une génération qui semble parfois en manque cruel
Parce que tant qu’on n’aura pas compris que ces gamins ne sont pas des « monstres » tombés du ciel, mais des adolescents en détresse qui ont trouvé dans la haine la réponse à leurs angoisses, on continuera à courir après les attentats.
Et ça, franchement, on ne peut plus se le permettre.
Je ne sais pas vous, mais moi, cette affaire me laisse un goût amer. Pas seulement à cause de la haine antisémite qu’elle révèle – on savait hélas. Mais parce qu’elle nous renvoie à notre échec collectif à parler à une partie de la jeunesse. À lui proposer autre chose que la violence comme projet de vie.
Deux gamins de 16 ans derrière les barreaux pour terrorisme. Si ça, ça ne nous fait pas réfléchir…
