Il y a des histoires qui vous prennent aux tripes dès les premières lignes. Celle de Karen Sofía, plus connue sous le pseudo « Bikegirl », en fait partie. Une jeune Colombienne de 25 ans, passionnée de moto jusqu’à l’os, qui partageait sa vie à 200 km/h avec des dizaines de milliers d’abonnés… et qui, en une fraction de seconde, a tout perdu sur un périphérique.
Le plus glaçant ? Quelques heures avant le drame, elle postait une story où elle montrait ses lunettes de vue cassées avec cette phrase : « J’espère ne pas avoir d’accident, car je conduis sans lunettes ». Quand on connaît la suite, on a la chair de poule.
Une Passion Dévorante Qui a Fini par la Consumer
Karen Sofía n’était pas une motarde du dimanche. Sa Suzuki GSX 750 noire et rose, c’était son prolongement, son identité. Sur ses vidéos, on la voyait nettoyer ses jantes pendant des heures, tester des combinaisons, faire des wheelings en pleine ville ou simplement rouler cheveux au vent (enfin, sous le casque). Une vraie pile électrique qui vivait à fond.
Ce qui rend son histoire encore plus dure à avaler, c’est qu’elle incarnait cette nouvelle génération d’influenceurs moto : des filles qui cassent les codes, qui prouvent qu’on peut être féminine et rouler en sportive, qui inspirent des milliers de nanas à passer le permis gros cube. Elle était devenue un symbole.
Le Soir du Drame : Reconstruction Minute par Minute
Jeudi 26 novembre, 21h40. Le périphérique de Floridablanca, en Colombie, est chargé comme souvent en fin de journée. Karen remonte les files – une pratique courante là-bas, même si elle reste hyper risquée. Elle roule sans ses lunettes correctrices, celles qu’elle venait de casser et qu’elle avait montrées à ses abonnés en riant.
Selon les premiers éléments, elle frôle ou heurte légèrement une voiture. Perte d’équilibre immédiate. Chute. Et là, l’inévitable : un semi-remorque qui arrive derrière n’a pas le temps de freiner. L’impact est fatal.
Les secours arrivent vite, mais il n’y a plus rien à faire. Elle décède sur place. À 25 ans.
« Repose en paix, Sofi. Tu étais un petit ange. Vole haut et donne de la force à ta famille en ces moments difficiles. C’était une gentille fille, joyeuse et pleine de rêves »
Une amie proche, dans les colonnes locales
La Remontée de Files : Pratique Courante, Danger Permanent
Dans beaucoup de pays d’Amérique latine, remonter les files est presque culturel chez les motards. C’est rapide, ça évite les bouchons, ça fait gagner un temps fou. Mais bordel, qu’est-ce que c’est dangereux. Un rétroviseur mal placé, un conducteur qui change de voie sans clignotant, une flaque d’huile… et c’est la catastrophe.
Et le pire, c’est que beaucoup le savent. Karen le savait sûrement aussi. Mais quand on est jeune, qu’on a confiance en sa moto et en ses réflexes, on se dit que « ça n’arrive qu’aux autres ».
- Visibilité réduite le soir
- Conducteurs de voitures qui ne regardent pas leurs angles morts
- Vitesse relative très élevée entre la moto et le flux
- État de la chaussée parfois douteux
- Fatigue ou distraction passagère
Autant de facteurs qui, combinés, peuvent transformer une habitude quotidienne en tragédie.
Le Rôle Ambigu des Réseaux Sociaux dans la Sécurité Routière
Il y a un truc qui me chiffonne particulièrement dans cette histoire. Karen filmait beaucoup en roulant. GoPro sur le casque, téléphone parfois à la main pour les stories… On a tous vu ces vidéos où la moto slalome à toute vitesse entre les voitures. C’est impressionnant, ça fait des vues, ça booste l’adrénaline du spectateur.
Mais est-ce qu’on ne pousse pas, sans le vouloir, les jeunes motards à prendre toujours plus de risques pour « faire le buzz » ? Est-ce que montrer des remontées de files à 100 km/h en pleine ville, ça ne banalise pas le danger ?
Je ne jette la pierre à personne – j’ai moi-même partagé des vidéos un peu borderline à une époque – mais cette mort pose une vraie question éthique aux influenceurs moto.
Lunettes Cassées : Symbole d’une Négligence Fatale ?
On pourrait se dire que c’est un détail. Mais conduire sans correction quand on en a besoin, surtout de nuit, sur un périphérique bondé… c’est jouer à la roulette russe.
Beaucoup de motards portent des lentilles ou des lunettes sous leur casque. D’autres optent pour des écrans pinlock avec insert correcteur. Mais quand les lunettes se cassent et qu’on n’a pas de solution de secours, le plus raisonnable serait de rentrer en taxi ou de prendre un Uber.
Karen a choisi de rouler quand même. Peut-être qu’elle se disait que c’était « juste pour ce soir ». Peut-être qu’elle minimisait. On ne le saura jamais.
La Communauté Moto en Deuil
Depuis l’annonce, les hommages pleuvent. Des rassemblements spontanés ont eu lieu en Colombie. Des motards ont collé des stickers « Ride in Peace Bikegirl » sur leurs casques. Sur les groupes Facebook locaux, c’est l’effervescence : tout le monde partage ses plus belles vidéos d’elle, ses lives les plus drôles.
Ce qui ressort, c’est l’image d’une fille solaire, toujours souriante, qui aidait les débutants, qui organisait des balades entre filles pour les encourager à se lancer. Une perte immense pour toute une communauté.
Et Maintenant ? Quelles Leçons Retenir ?
Je ne vais pas faire la morale, ce serait trop facile. Mais cette histoire me fait réfléchir à mes propres pratiques. Est-ce que je prends parfois des risques inutiles ? Est-ce que je surestime toujours mes capacités ?
- Toujours avoir une solution de secours pour la vision (lentilles, deuxième paire de lunettes dans la top-case)
- Ne jamais remonter les files quand la visibilité est réduite (pluie, nuit, fatigue)
- Installer des feux additionnels et des bandes réfléchissantes pour être vu
- Se former régulièrement (stage de perfectionnement tous les 2-3 ans)
- Et surtout : se rappeler que l’immortalité, c’est pour les films Marvel
Parce qu’au final, une moto, ça reste 200 kg lancés à grande vitesse avec juste un casque et une combinaison pour nous protéger. Le reste, c’est de la chance… jusqu’à ce que ça ne le soit plus.
Repose en paix, Sofía. Tu vas manquer à beaucoup de monde. Et peut-être que ton histoire, aussi tragique soit-elle, sauvera des vies en rappelant à certains qu’on n’a qu’une seule.
PS : Si tu es motard et que tu lis ces lignes, prends cinq minutes ce soir pour vérifier ton équipement. Vérifie que tes lunettes de secours sont bien dans ta sacoche. Que ton gilet airbag est chargé. Que tes pneus ont encore de la gomme. Ça ne prend pas longtemps. Et ça peut tout changer.
