Franchement, quand on regarde les scores des Bleues depuis le début de ce Mondial 2025, on se demande si on suit un championnat du monde ou un tournoi amical de pré-saison. 43-18, 47-21, 42-28… et samedi encore 29-17 face à l’Argentine. Cinq victoires en cinq matches, une différence de buts qui frise l’indécence et, surtout, une impression de maîtrise totale. Mais derrière ces cartons, il y a une méthode qui intrigue autant qu’elle impressionne : la rotation massive.
Oui, on parle bien d’une équipe qui change parfois de système tous les dix minutes, qui fait jouer la pivot au poste d’arrière droit ou qui teste trois défenses différentes dans le même match. Et pourtant, ça gagne. Largement. Alors, génie tactique ou simple luxe réservé aux très gros favoris ? Un peu des deux, sans doute.
La France a transformé le tour principal en laboratoire géant
Depuis l’entame du tour principal, les matches ressemblent parfois à des séances d’entraînement déguisées. Contre la Tunisie, la Chine, la Pologne, l’Autriche et maintenant l’Argentine, les écarts sont tels que le sélectionneur peut se permettre absolument tout. Et il ne s’en prive pas.
Le plus frappant ? Le poste de pivot. On savait déjà que la France possédait probablement la meilleure profondeur mondiale à ce secteur avec Sarah Bouktit, Pauletta Foppa et Oriane Ondono. Mais là, on passe à un autre niveau : Foppa qui monte arrière droit, qui prend les tirs de loin, qui se retrouve même demi-centre pour perforer les défenses. Bouktit qui enchaîne les performances XXL et repart avec le trophée de MVP. Ondono qui apporte son énergie habituelle. Un vrai festival.
« C’est un peu déstabilisant au début. En club, on sait à peu près quand on va jouer. Là, c’est différent. Mais ça marche tellement bien qu’on ne va pas se plaindre ! »
Sarah Bouktit, tout sourire après son nouveau carton
Des blessées, des bobos… et une gestion obligée
Il faut aussi rappeler le contexte. L’équipe de France n’est pas arrivée au complet. Le forfait définitif de Grace Zaadi a été officialisé en cours de compétition. Méline Nocandy et Fatou Karamoko regardent encore les matches depuis les tribunes. D’autres traînent des petits pépins. Dans ces conditions, faire tourner devient presque une nécessité vitale pour préserver tout le monde jusqu’aux phases finales.
Mais ce qui pourrait ressembler à une contrainte s’est transformé en arme absolue. Les joueuses entrent, sortent, reviennent, changent de poste, et l’équipe continue de réciter son handball à une vitesse folle. C’est assez fascinant à observer.
- Camille Depuiset titularisée pour la première fois dans les cages
- Hatadou Sako qui prend le relais après la pause
- Tamara Horacek qui gère le tempo malgré le turnover permanent
- Léna Grandveau testée à droite dans certaines configurations
- Des systèmes en double pivot qui deviennent presque la norme
Les joueuses valident (presque) toutes la méthode
Dans le vestiaire, on sent une vraie adhésion. Même si, soyons honnêtes, ce n’est pas toujours simple à vivre au quotidien.
« C’est important de construire des repères avec tout le monde. Ça peut être perturbant mais c’est bien de concerner tout le monde, de conserver le maximum de fraîcheur. »
Camille Depuiset, après sa première titularisation
La capitaine Tamara Horacek, elle, reste lucide : « Quand on a le score à notre avantage, c’est le moment de travailler toutes les possibilités. Ça ne peut être que bénéfique pour le futur. » Message reçu. Même si, parfois, la continuité de jeu en prend un coup avec autant de changements.
Lundi, la fin de la récréation ?
Et puis il y a ce match qui approche. Lundi, face aux Pays-Bas. Un adversaire d’un tout autre calibre. Les Néerlandaises viennent d’écraser la Pologne 33-22 et, du même coup, ont validé le billet des deux équipes pour les quarts de finale. Mais l’enjeu reste énorme : la première place du groupe, synonyme d’adversaire théoriquement plus abordable en quart.
Et là, le sélectionneur a été très clair : les grandes rotations, c’est fini. Ou presque.
« Non je ne vais pas le faire contre les Pays-Bas. J’avais à cœur de rester dans ce qui m’anime depuis le début, en gestion de temps de jeu notamment, mais là c’est la fin d’un cycle. »
Sébastien Gardillou, cash avant le choc
Traduction : on va enfin voir la vraie équipe de France version phases finales. Celle qui va devoir choisir. Gauchères à l’arrière ? Double pivot permanent ? Léna Grandveau à droite ? Pauletta Foppa recentrée ? Le coach l’admet lui-même : « Il y en a une plus adaptée que les autres. » Laquelle ? Réponse sur le terrain.
Pourquoi cette stratégie peut faire la différence jusqu’au bout
Ce qui est passionnant dans cette histoire, c’est que la France s’est offert un luxe que peu d’équipes peuvent se permettre : tester grandeur nature, en match officiel, presque toutes les options possibles. Quand arrivera le money-time du tournoi – demi-finale, finale –, les automatismes seront là. Peu importe qui sera sur le parquet.
Les adversaires, eux, auront peut-être usé leurs titulaires habituelles dès les quarts. Les Bleues, elles, arriveront avec des organismes préservés et une polyvalence rarement vue à ce niveau.
Évidemment, rien n’est gagné. Le handball féminin reste un sport où une mauvaise soirée peut tout faire basculer. Mais une chose est sûre : cette génération française n’a jamais semblé aussi prête à aller chercher un troisième titre mondial. Et si la clé, finalement, c’était précisément ce tourniquet permanent qu’on a vu depuis dix jours ?
Rendez-vous lundi pour le premier vrai test. Après, il n’y aura plus de matches d’entraînement déguisés. Juste des battles. Et là, on saura si la méthode Gardillou est aussi révolutionnaire qu’elle en a l’air.
En attendant, une chose est certaine : voir les Bleues jouer comme ça, avec cette liberté, cette joie et cette efficacité, ça fait un bien fou au handball français. On en redemande.
Et vous, qu’en pensez-vous ? La rotation massive, génie ou risque inutile quand les enjeux monteront ? Dites-le moi en commentaire, on en discute avec plaisir.
