Vous avez déjà regardé votre facture de gaz en vous disant « mais pourquoi c’est si peu cher comparé à l’électricité » ? Moi oui, pendant des années. Et puis, d’un coup, le Sénat décide que c’était trop beau pour durer. Bienvenue dans le budget 2026 version chambre haute : on baisse les taxes sur l’électricité et on les ménages qui se chauffent au gaz trinquent. Simple, brutal, et franchement malin sur le papier.
Un transfert fiscal qui sent bon la transition énergétique
Concrètement, les sénateurs (majorité de droite, rappelons-le) ont décidé de jouer sur les accises, ces taxes indirectes sur l’énergie que personne ne remarque vraiment jusqu’au jour où elles explosent. L’idée ? Rendre l’électricité un peu plus attractive et le gaz un peu moins. Parce que, oui, en 2025, le gaz reste majoritairement fossile et souvent importé, tandis que l’électricité française est à 90 % décarbonée grâce au nucléaire et aux renouvelables.
Le calcul est presque enfantin : on prend aux uns pour donner aux autres, sans toucher au rendement global pour l’État. Résultat ? Zéro impact sur les finances publiques, dixit la commission des Finances du Sénat. En théorie, c’est neutre pour Bercy. En pratique, c’est une petite révolution dans les foyers.
Combien ça coûte (ou ça rapporte) vraiment ?
Allons dans le vif du sujet, parce que c’est là que ça devient intéressant.
- Si vous vous chauffez à l’électricité → vous gagnez entre 11 € et 45 € par an selon votre consommation.
- Si vous vous chauffez au gaz → vous perdez entre 12 € et 80 € par an, soit 1 à 7 € par mois.
80 €, ce n’est pas rien quand on a déjà du mal à joindre les deux bouts. Mais 45 € d’économie, ça fait aussi une belle différence quand on est en précarité énergétique avec des convecteurs qui tournent à fond.
J’ai fait le calcul rapide pour un appartement de 70 m² bien isolé : un ménage tout électrique peut espérer environ 30 € de moins par an. Un ménage au gaz, lui, risque d’avoisiner les 50-60 € de plus. C’est pas la mort, mais ça commence à peser sur les fins de mois.
Pourquoi maintenant ? Le timing n’est pas anodin
Il faut remettre les choses en perspective. On sort de plusieurs hivers où le gaz russe a fait des siennes, où les prix ont flambé, où l’État a dû sortir le chéquier pour le bouclier tarifaire. Résultat ? Tout le monde (ou presque) s’est mis à regarder l’électricité avec des yeux de Chimène. Pompes à chaleur, radiateurs à inertie, véhicules électriques… l’électrification des usages est lancée.
Le Sénat enfonce le clou : autant accompagner le mouvement avec un petit coup de pouce fiscal. Et tant pis si certains n’ont pas le choix de leur mode de chauffage. Dans les copropriétés anciennes, dans les zones rurales mal raccordées au réseau de chaleur, le gaz reste roi. Et souvent, c’est un roi imposé.
« On ne peut pas pénaliser ceux qui se chauffent au gaz par contrainte plutôt que par choix. »
– Un sénateur de gauche lors des débats
La phrase résonne. Parce qu’elle est juste. Dans beaucoup de logements, changer de système de chauffage, c’est 15 000 à 30 000 € de travaux. Autant dire mission impossible pour une grande partie des Français.
Le gouvernement dans tout ça ? Ni pour, ni contre… mais plutôt pour
Le ministre de l’Économie a rendu un avis de « sagesse ». Dans le jargon parlementaire, ça veut souvent dire « on n’ose pas dire oui mais on ne dira pas non ». Traduction : l’exécutif trouve l’idée plutôt bonne, mais ne veut pas se mouiller avant la navette parlementaire.
Et franchement, on les comprend. L’objectif affiché – favoriser une énergie décarbonée et souveraine – colle parfaitement à la stratégie nationale bas carbone et à la programmation pluriannuelle de l’énergie. C’est cohérent. C’est même assez courageux dans un contexte où tout le monde hurle dès qu’on touche à la facture.
Les gagnants et les perdants : qui est vraiment concerné ?
Environ 11 millions de logements se chauffent principalement à l’électricité en France. Surtout dans le sud, dans les petites surfaces, dans le neuf. Eux vont sourire en ouvrant leur facture 2026.
À l’inverse, près de 5 millions de maisons individuelles et une bonne partie des copropriétés restent au gaz. Et là, c’est plus compliqué. Parce que parmi eux, il y a :
- Ceux qui pourraient basculer vers la pompe à chaleur… mais qui n’ont pas les moyens.
- Ceux qui vivent en copropriété et qui attendent que 100 % des copropriétaires soient d’accord pour voter les travaux (autant dire jamais).
- Ceux en zone rurale où le réseau électrique saturé rend l’idée d’une PAC risible.
Du coup, la mesure risque de creuser les inégalités plus qu’elle ne les réduit. C’est tout le paradoxe des incitations fiscales « vertes » : elles marchent très bien… quand on a déjà les moyens de verdir.
Et si on regardait plus loin ? Les effets de second tour
À court terme, quelques dizaines d’euros, on va dire que ça passe. Mais sur dix ans ? Si la trajectoire se confirme (et elle se confirmera, soyons réalistes), le différentiel peut devenir énorme.
Imaginons une hausse progressive des accises gaz de 10-15 % par an pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Votre facture gaz pourrait doubler en quinze ans, pendant que l’électricité reste stable grâce au nucléaire. Là, on ne parle plus de 80 € mais de plusieurs centaines d’euros par an. C’est une bombe à retardement sociale.
D’un autre côté, cette pression fiscale peut devenir le déclencheur que beaucoup attendent pour sauter le pas. J’ai vu des voisins passer à la pompe à chaleur uniquement parce que leur chaudière gaz est tombée en panne et que les aides MaPrimeRénov’ étaient au rendez-vous. Sans cette petite carotte (et ce gros bâton fiscal), ils seraient encore au gaz.
Ce qui va se passer maintenant (spoiler : ce n’est pas fini)
Le vote du Sénat, c’est une étape. Importante, symbolique, mais pas définitive. Le texte repart à l’Assemblée nationale en décembre. Et là, deux scénarios :
- Les députés valident la mesure en l’état ou légèrement édulcorée → elle entre en vigueur au 1er janvier 2026.
- Ils la rejettent ou la modifient fortement → retour au Sénat, éventuellement 49.3, et on recommence.
Mon petit doigt me dit que la mesure passera, peut-être avec un dispositif d’accompagnement pour les ménages modestes chauffés au gaz. Parce que politiquement, personne n’a envie de se mettre à dos les 5 millions de foyers concernés juste avant les municipales de 2026.
Mon avis (parce qu’on est entre nous)
Je trouve l’idée globalement bonne. Vraiment. Il faut bien créer des incitations fortes pour sortir des énergies fossiles. Mais je trouve qu’on met encore la charrue avant les bœufs.
Avant de taxer plus le gaz, il faudrait :
- Massifier les aides à la rénovation et au changement de chauffage.
- Simplifier à mort les démarches (parce que là, c’est un calvaire).
- Renforcer le réseau électrique dans les zones rurales.
- Proposer un vrai prêt à taux zéro longue durée pour les travaux énergétiques.
Sans ça, on pénalise ceux qui n’ont pas le choix. Et ça, c’est jamais une bonne idée sur le long terme.
Après, je comprends aussi les sénateurs. Ils se disent : « si on attend que tout soit parfait, on n’avancera jamais ». Et ils n’ont pas complètement tort.
Alors voilà, on est dans ce entre-deux inconfortable où il faut choisir entre l’urgence climatique et la justice sociale. Et comme souvent, c’est le porte-monnaie des classes moyennes et populaires qui trinque en premier.
Vous en pensez quoi, vous ? Votre chaudière est au gaz ou à l’électricité ? Vous avez déjà prévu de changer ? Dites-moi tout en commentaire, je suis curieux de savoir comment ça se passe chez vous.
En attendant, une chose est sûre : en 2026, votre facture énergétique aura un goût un peu plus… politique.
