Vous est-il déjà arrivé de rentrer chez vous et de trouver la porte intacte… mais l’appartement totalement vidé ? C’est le cauchemar qu’ont vécu des dizaines de familles en Île-de-France ces dernières années. Pas de pied-de-biche, pas de bruit de perceuse. Juste une odeur âcre dans le couloir et des serrures qui avaient littéralement fondu.
Ce n’est pas le scénario d’un film de braquage un peu trop créatif. C’est la réalité d’une bande particulièrement maline qui sévissait l’été, quand les appartements étaient souvent vides. Et aujourd’hui, une partie de ce réseau comparaît enfin devant la justice.
Le procès qui révèle une technique de cambriolage jamais vue
Ce mercredi matin, cinq hommes âgés de 37 à 42 ans se sont assis sur le banc des prévenus au tribunal correctionnel de Nanterre. Tous originaires de Géorgie. Tous accusés d’avoir participé à une série impressionnante de vols avec une méthode qui a laissé les enquêteurs pantois au début : l’attaque à l’acide.
Imaginez la scène. Les cambrioleurs repèrent un bel immeuble, souvent dans des quartiers résidentiels cossus. Ils attendent que les habitants partent en vacances – l’été, c’est la saison idéale. Puis, en pleine journée ou en début de soirée, ils s’approchent de la porte.
Aucun outil bruyant. Ils appliquent d’abord une colle spéciale pour boucher le trou de la serrure et éviter les projections. Ensuite, ils injectent un produit corrosif ultra-puissant. En quelques minutes, le cylindre en métal se dissout complètement. La porte s’ouvre comme par magie. Et ils repartent avec bijoux, liquidités, montres de luxe.
Une organisation quasi militaire
Ce qui frappe dans cette affaire, c’est le niveau de professionnalisme. On n’est pas face à des voleurs opportunistes. Les enquêteurs parlent d’une véritable entreprise criminelle.
- Repérages précis plusieurs jours à l’avance
- Véhicules banalisés avec plaques étrangères ou fausses
- Logements temporaires loués sous de fausses identités
- Répartition claire des rôles : guetteurs, exécutants, chauffeurs
- Déplacement rapide entre plusieurs départements le même jour
Ils pouvaient ainsi frapper cinq ou six appartements dans la même résidence en une seule après-midi. Le temps que les premiers propriétaires rentrent et découvrent le désastre, le gang était déjà à l’autre bout de l’Île-de-France.
Comment l’acide a révolutionné le cambriolage discret
Traditionnellement, quand on pense effraction, on imagine du bruit, des traces, des portes défoncées. Là, rien. Les victimes mettaient parfois plusieurs heures à comprendre qu’elles avaient été cambriolées. La porte fermait encore à peu près, la serrure pendouillait bizarrement, mais rien d’alarmant au premier regard.
Le produit utilisé ? Un acide extrêmement corrosif, probablement importé ou fabriqué dans des conditions clandestines. Les spécialistes parlent d’une mixture capable de dissoudre l’acier en quelques minutes seulement. Dangereux à manipuler, mais terriblement efficace.
« On n’avait jamais vu ça à cette échelle. C’est propre, rapide, et ça ne laisse presque aucune trace exploitable. »
Un enquêteur expérimenté dans ce type d’affaires
Et pourtant, même les meilleurs finissent par commettre des erreurs.
L’erreur qui a tout fait basculer
Pendant deux étés, en 2022 et 2023, ils ont opéré en toute impunité. Les services de police recevaient bien des plaintes, mais les liens n’étaient pas évidents au début. Chaque cambriolage semblait isolé.
Puis vint cette fameuse série dans une résidence de standing. Trop d’appartements touchés le même jour. Les enquêteurs ont commencé à comparer les modes opératoires. Les résidus chimiques, les horaires, les descriptions physiques. Tout concordait.
Et surtout, il y a eu cette fameuse caméra de vidéosurveillance dans un parking souterrain. Des images floues, mais suffisantes pour identifier un véhicule. De fil en aiguille, les arrestations ont eu lieu. Cinq hommes. Une partie du réseau seulement, car les enquêteurs savent qu’ils n’étaient pas seuls.
Un phénomène bien plus large qu’on ne le croit
Ce qui glace le sang, c’est qu’on parle ici d’une vingtaine de faits jugés… mais les investigations ont permis d’en recenser près de quatre-vingts avec le même mode opératoire. Paris, Hauts-de-Seine, Val-de-Marne, Essonne, Seine-Saint-Denis… Aucun département n’a été épargné.
Et la Géorgie dans tout ça ? Le pays n’est pas choisi au hasard. Ces dernières années, plusieurs réseaux spécialisés dans le cambriolage de luxe sont originaires de ce pays du Caucase. Une sorte de spécialisation criminelle qui inquiète sérieusement les autorités européennes.
J’ai discuté avec des habitants touchés. L’un d’eux m’a confié : « On se sent violé dans son intimité. Même en changeant toutes les serrures, on n’est plus jamais vraiment tranquille. » C’est peut-être l’aspect le plus dur à vivre.
Que risque vraiment le gang ?
Le procès qui s’est ouvert ce mercredi doit durer trois jours. Les cinq prévenus encourent jusqu’à dix ans de prison pour vol en bande organisée avec effraction. Mais en réalité, les peines pourraient être plus lourdes vu le nombre de faits et le préjudice total, estimé à plusieurs millions d’euros.
Certains jouent la carte du petit exécutant. « J’étais juste le chauffeur », dira probablement l’un d’eux. D’autres nient farouchement. Mais les éléments matériels sont accablants : ADN, téléphones portables, véhicules, et même des bijoux retrouvés.
Et nous, comment on se protège vraiment ?
Franchement, cette affaire m’a fait réfléchir. On met des alarmes, des portes blindées, des serrures 5 points… Et un gars arrive avec une seringue d’acide et c’est fini.
Les spécialistes recommandent maintenant des cylindres anti-acide (oui, ça existe), des protections chimiques autour de la serrure, ou encore des systèmes qui détectent les produits corrosifs. Ça paraît fou d’en arriver là.
- Vérifier régulièrement l’état de sa serrure (décoloration, traces suspectes)
- Installer une mini-caméra sur le palier (discrète mais efficace)
- Ne jamais laisser d’indices de départ en vacances prolongé
- Participer aux réseaux de voisins vigilants
- Penser à la protection chimique (demander à son serrurier)
Parce qu’au final, le plus inquiétant dans cette histoire, c’est que cette technique risque de se répandre. Déjà, d’autres affaires similaires ont été signalées dans d’autres régions. Quand une méthode marche et reste impunie longtemps, elle fait école.
Suivre ce procès jusqu’à vendredi, c’est aussi comprendre comment évolue la criminalité aujourd’hui. Plus discrète, plus technique, plus internationale. Et surtout, beaucoup plus difficile à combattre avec les méthodes classiques.
Une chose est sûre : ce soir, en rentrant chez moi, je regarderai ma serrure un peu différemment.
Et vous, aviez-vous déjà entendu parler de cambriolages à l’acide avant cette affaire ?
