Vous est-il déjà arrivé de faire un geste instinctif, sans réfléchir, parce que l’un de vos proches était en danger ? Cette fraction de seconde où tout bascule. Mardi 2 décembre 2025, dans un coin tranquille du Vexin, un homme de 41 ans a connu ce moment-là. Et il n’en est pas revenu.
Je vais vous raconter cette histoire telle qu’elle s’est déroulée, sans fioritures inutiles, mais avec ce poids qu’ont les drames quand on les regarde de près. Parce que derrière les faits divers, il y a toujours des vies, des choix, et parfois une fin qu’on n’aurait jamais imaginée.
Un après-midi de chasse qui tourne au cauchemar
Il est un peu plus de 16 heures. Deux amis chassent ensemble sur le domaine d’un golf situé route des Bruyères, à Maudétour-en-Vexin. Rien d’inhabituel : l’établissement, régulièrement envahi par les sangliers, autorise des battues pour réguler les populations. Les chiens sont lâchés, les fusils chargés, l’ambiance est celle d’une sortie ordinaire entre passionnés.
Puis, en une seconde, tout dérape. Le chien de l’un des chasseurs file droit vers un bassin de rétention. L’eau est froide, le bord recouvert d’une bâche plastique noire, glissante comme une patinoire. L’animal tombe à l’eau. Sans hésiter, son maître saute pour le récupérer.
Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est que la cartouchière pleine accrochée à sa ceinture allait le tirer vers le fond comme une ancre. Et que la bâche, conçue pour empêcher les herbes de pousser, allait transformer les abords en véritable piège.
« Il a sauté sans réfléchir. J’ai essayé de le retenir, mais c’était trop tard. En deux secondes il était dans l’eau, et la bâche m’empêchait d’approcher… »
Témoignage recueilli auprès du compagnon de chasse
Les secours arrivent trop tard
L’ami, impuissant, compose le 18. Les pompiers du Val-d’Oise dépêchent immédiatement leur équipe de sauvetage aquatique. Quand ils arrivent, le chasseur est déjà porté disparu sous la surface.
Quatre mètres de profondeur. C’est à cette distance du fond que les plongeurs le retrouvent. Le Samu, présent sur place, ne pourra que constater le décès. Le chien, lui, s’en sortira indemne – une maigre consolation dans ce drame absolu.
Quatre mètres, ce n’est pas grand-chose quand on parle d’un lac artificiel. Mais avec des vêtements lourds, une cartouchière pleine de cartouches et le froid de décembre, c’est une tombe.
Les bassins de rétention, ces pièges discrets que personne ne voit
On parle souvent des accidents par balle pendant la chasse – et à juste titre, ils sont nombreux. Mais les noyades ? Elles passent presque inaperçues dans les statistiques. Pourtant, elles existent. Et elles sont d’autant plus sournoises qu’elles surviennent dans des endroits qu’on ne considère pas comme dangereux.
Ces bassins de rétention, que l’on trouve sur les golfs, les zones industrielles ou les lotissements récents, sont conçus pour recueillir les eaux de ruissellement. Leurs berges sont souvent raides, parfois renforcées de plastique ou de géotextile. Quand on glisse dedans en hiver, avec des bottes et des vêtements épais, remonter n’a rien d’évident.
- Bords abrupts et glissants
- Présence fréquente de bâches anti-végétation
- Eau très froide en hiver (hypothermie rapide)
- Charge supplémentaire (armes, cartouchières, sac)
- Absence de points d’appui pour se hisser
Autant de facteurs qui transforment un simple plan d’eau en piège mortel. Et pourtant, personne n’y pense vraiment quand on parle sécurité à la chasse.
La saison 2025-2026, déjà endeuillée
Ce drame n’est malheureusement pas isolé. Depuis l’ouverture de la saison, les accidents de chasse repartent à la hausse. On compte déjà une dizaine de chasseurs tués, sans parler des blessés graves.
Mais ce qui frappe dans ce cas précis, c’est l’absence totale de tir. Pas de balle perdue, pas de ricochet. Juste un geste d’amour pour un chien, et une issue fatale.
J’ai discuté avec plusieurs chasseurs ces derniers jours. Beaucoup m’ont dit la même chose : « On est tous prêts à risquer notre peau pour nos chiens. C’est comme un membre de la famille. » Sauf que parfois, le prix est trop lourd.
Que peut-on apprendre de cette tragédie ?
Au-delà de l’émotion, ce drame pose de vraies questions. Faut-il sensibiliser davantage les chasseurs aux risques aquatiques ? Installer des échelles ou des cordes autour de ces bassins sur les territoires de chasse ? Porter systématiquement des gilets de sauvetage quand on évolue près de l’eau ? Certaines fédérations commencent à y réfléchir sérieusement.
Parce qu’on peut mourir d’une balle, bien sûr. Mais on peut aussi mourir en essayant de faire le bien. Et ça, c’est peut-être le plus difficile à accepter.
« La chasse, ce n’est pas seulement le gibier. C’est aussi la nature, les chiens, les copains. Et parfois, ça finit mal sans qu’on s’y attende. »
Un chasseur expérimenté du Vexin
Ce mardi de décembre, un homme a perdu la vie en sauvant celle qu’il considérait comme son fidèle compagnon. Le chien est rentré à la maison. Lui, non.
Et quelque part, dans le silence du Vexin, il reste cette image : un chasseur qui n’a pas hésité une seconde à plonger pour celui qui ne l’avait jamais abandonné sur le terrain.
Repose en paix.
Nota bene : cet article a été rédigé à partir d’informations recueillies auprès des acteurs locaux et des services de secours. Aucun détail n’a été inventé. Le respect des familles et des proches reste la priorité.
