Paris sans ses nuits vibrantes, est-ce encore Paris ? En me promenant dans les ruelles pavées de Montmartre, je ne peux m’empêcher de penser à l’éclat bleu qui illuminait autrefois la rue des Martyrs. Ce bleu, c’était celui de Chez Michou, un cabaret qui, pendant près de sept décennies, a fait danser les cœurs et briller les regards. Mais aujourd’hui, une page se tourne : le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de cette institution. Une nouvelle qui résonne comme un adieu à une époque révolue.
L’Héritage d’un Prince Bleu
Depuis 1956, Chez Michou était bien plus qu’un simple cabaret. C’était un refuge, un théâtre de l’extravagance où les Michettes, ces artistes transformistes aux costumes flamboyants, donnaient vie à des icônes comme Dalida ou Johnny Hallyday. Fondé par Michel Catty, surnommé le Prince Bleu de Montmartre, ce lieu a redéfini le transformisme en France. J’ai toujours trouvé fascinant comment un petit espace pouvait devenir un symbole aussi puissant, rivalisant avec des géants comme le Moulin Rouge.
Chez Michou, c’était une explosion de vie, un endroit où l’on pouvait être soi-même, ou quelqu’un d’autre, le temps d’une soirée.
– Un habitué anonyme du cabaret
Le cabaret ne se contentait pas de divertir. Il incarnait une liberté d’expression rare, un espace où les frontières du genre et de l’identité s’effaçaient sous les paillettes. Mais derrière les strass et les plumes, la réalité était plus sombre ces dernières années.
Une Fin Inéluctable
La nouvelle a frappé comme un coup de tonnerre : le 16 juillet 2024, le tribunal de commerce a scellé le destin de Chez Michou. En cessation de paiements depuis fin juin, le cabaret n’a pas survécu à une série de tempêtes. La disparition de son fondateur en 2020 a marqué le début des difficultés. Sans la présence charismatique de Michou, le lieu a perdu une partie de son âme.
Les défis ne se sont pas arrêtés là. Les grèves, les manifestations et les problèmes de stationnement à Paris ont découragé les visiteurs, en particulier les groupes en autocar, qui représentaient une part importante de la clientèle. Selon des sources proches du dossier, les réservations ont chuté de manière drastique, plongeant l’établissement dans un déficit chronique. Est-ce que Montmartre, avec ses rues étroites et son charme bohème, est encore adapté à l’ère des restrictions de circulation ? La question mérite d’être posée.
- Grèves et manifestations : Perturbations majeures affectant l’accès au cabaret.
- Problèmes de stationnement : Difficultés pour les autocars, un frein pour les groupes.
- Déficit chronique : Trois années consécutives de pertes financières.
Face à ces obstacles, la directrice, Catherine Catty-Jacquart, a reconnu qu’il fallait se rendre à l’évidence. La liquidation était inévitable. Mais ce n’est pas seulement une entreprise qui ferme, c’est un pan de l’histoire parisienne qui s’efface.
Les Michettes : Âme du Spectacle
Si Chez Michou a marqué les esprits, c’est grâce à ses Michettes. Ces artistes transformistes, véritables stars du cabaret, incarnaient des figures emblématiques avec une précision et une énergie inégalées. Qui n’a pas souri en voyant une imitation parfaite de Sylvie Vartan ou de Mireille Mathieu ? Leur talent faisait vibrer les spectateurs, qu’ils soient parisiens ou touristes en quête d’une soirée inoubliable.
Les Michettes, c’était la magie de Chez Michou. Leur énergie transformait chaque soirée en un moment suspendu.
– Un spectateur fidèle
Mais derrière les projecteurs, la réalité des artistes était plus complexe. Avec la liquidation, les 22 salariés, dont certains cumulaient des décennies de fidélité, se retrouvent sans emploi. La nouvelle est d’autant plus dure que beaucoup voyaient le cabaret comme une seconde maison. Certains d’entre eux explorent une solution audacieuse : créer une société coopérative pour reprendre le fonds de commerce. Une lueur d’espoir, peut-être, pour préserver l’esprit du lieu.
Un Symbole Culturel en Péril
Chez Michou n’était pas seulement un lieu de spectacle, c’était un emblème de la culture parisienne. Son influence s’étend bien au-delà de Montmartre. Dans les années 1970, il a inspiré la pièce La Cage aux Folles, devenue un classique du théâtre et du cinéma. Ce lien avec l’histoire culturelle française donne à sa fermeture une résonance particulière. Comment ne pas ressentir un pincement au cœur en pensant à cette scène qui s’éteint ?
| Aspect | Impact | Signification |
| Influence culturelle | Inspiration de La Cage aux Folles | Symbole de liberté d’expression |
| Transformisme | Pionnier en France | Redéfinition des normes de genre |
| Héritage local | Icône de Montmartre | Perte d’un lieu emblématique |
Pourtant, le transformisme connaît un regain d’intérêt. Des lieux comme Madame Arthur, également à Montmartre, attirent un public jeune et branché. Alors, pourquoi Chez Michou n’a-t-il pas su s’adapter ? Peut-être que son identité, si fortement ancrée dans la vision de son fondateur, était trop difficile à réinventer.
L’Ombre de Michou
Michel Catty, dit Michou, était le cœur battant du cabaret. Surnommé le Prince Bleu pour son amour des tenues azur, il incarnait une joie de vivre contagieuse. Dans ses mémoires, il avait exprimé un souhait surprenant : que son cabaret ne lui survive pas. “Je veux que cette maison disparaisse avec moi”, écrivait-il. Une phrase qui, rétrospectivement, semble prophétique.
Le cabaret, c’était Michou. Sans lui, c’est comme un spectacle sans metteur en scène.
– Un ancien collaborateur
Mais sous la pression de ses Michettes, Michou s’était ravisé avant son décès. Il espérait que l’aventure continue. Malheureusement, les réalités économiques ont eu raison de cet espoir. La question qui se pose maintenant est : l’esprit de Michou peut-il survivre sous une autre forme ?
Et Maintenant ?
La liquidation judiciaire ne signifie pas nécessairement la fin définitive. Un mandataire judiciaire a été désigné pour recueillir d’éventuelles offres de reprise. Les salariés, eux, ne baissent pas les bras. Leur projet de société coopérative pourrait redonner vie au cabaret, peut-être sous une forme modernisée. Mais les défis sont immenses : comment rivaliser avec des établissements qui ont su capter un public plus jeune ?
- Reprise potentielle : Une société coopérative portée par les salariés.
- Modernisation : Adapter le concept à un public contemporain.
- Préservation de l’héritage : Maintenir l’esprit de Michou tout en innovant.
En attendant, la dernière représentation, jouée le 30 juin 2024, restera dans les mémoires comme un adieu émouvant. Les lumières se sont éteintes, mais l’écho des rires et des chansons résonne encore. Pour ma part, je ne peux m’empêcher de penser que Montmartre, sans Chez Michou, perd un peu de son éclat. Et vous, qu’en pensez-vous ?
Un Adieu à Montmartre ?
La fermeture de Chez Michou n’est pas qu’une question économique. Elle soulève une réflexion plus large sur l’évolution des nuits parisiennes. Les cabarets, autrefois au cœur de la vie culturelle, doivent aujourd’hui se réinventer pour survivre. Les jeunes générations, attirées par des expériences plus interactives ou numériques, boudent parfois ces lieux chargés d’histoire. Pourtant, le succès de spectacles comme ceux de Madame Arthur montre qu’il y a encore une place pour le transformisme.
Alors, est-ce la fin d’une époque ou le début d’un renouveau ? Les Michettes et les amoureux de Montmartre espèrent la seconde option. Mais pour l’instant, le rideau est tombé, et il faudra plus qu’un peu de bleu pour ramener l’éclat d’antan.
Paris sans ses cabarets, c’est comme un tableau sans couleurs.
En repensant à ces soirées où les rires fusaient et les costumes scintillaient, je me demande si nous avons su apprécier ce lieu à sa juste valeur. Chez Michou n’était pas seulement un cabaret, c’était une célébration de la diversité, de l’art et de la liberté. Son histoire, même close, continuera d’inspirer. Peut-être qu’un jour, un nouveau projecteur s’allumera à Montmartre, portant l’héritage de ce lieu unique.
