Imaginez un peu : un stade enveloppé d’une brume si dense qu’on distingue à peine les lignes de touche, des fumées pyrotechniques qui s’ajoutent au chaos visuel, et pourtant, au milieu de tout ça, une équipe qui retrouve soudain ses repères. C’est exactement ce qui s’est passé samedi soir à Marcel-Michelin. Clermont, après un mois de décembre cauchemardesque, a enfin dit stop à la spirale négative en dominant largement Bordeaux-Bègles. Une victoire 34 à 19 qui fait un bien fou, autant aux joueurs qu’aux supporters.
J’avoue que j’attendais ce match avec une certaine appréhension. Les Auvergnats venaient de prendre des claques mémorables en Europe et même de s’incliner face à une équipe qui luttait pour son maintien en championnat. On se demandait franchement si le ciel n’allait pas leur tomber sur la tête une fois de plus.
Un succès bâti sur les fondamentaux du rugby
Et puis non. Dès les premières minutes, on a senti autre chose. Une envie, une agressivité, une solidarité qui avaient disparu ces dernières semaines. Clermont a choisi de jouer son rugby là où il excelle traditionnellement : dans le combat, dans la conquête, dans l’occupation intelligente du terrain malgré la visibilité réduite.
Le pack a été impressionnant. Sérieusement. On parle souvent de la force des avants auvergnats, et là, ils ont rappelé pourquoi. Les ballons portés ont fait mal, très mal à la défense bordelaise.
Le maul, cette arme fatale retrouvée
Dès la 22e minute, un essai de pénalité après un maul dominant a lancé les hostilités. 10-0, et déjà on sentait que les visiteurs étaient en difficulté. Peu après, George Moala, de retour de blessure, a profité d’un nouveau ballon porté pour aller aplatir. Le genre de séquence qui fait vibrer tout un stade, même quand on n’y voit pas grand-chose.
Ce n’est pas un hasard si Clermont est l’une des équipes qui marque le plus par ce secteur cette saison. Quand le maul fonctionne, tout le reste suit généralement. Et samedi, ça a marché à merveille.
« L’agressivité qu’ils ont mise fait que les ballons retombent de leur côté »
– Un deuxième ligne bordelais, dépité après la rencontre
Cette phrase résume bien la domination en conquête. Bordeaux a souffert en touche, a été sanctionné en mêlée, et n’a jamais vraiment pu installer son jeu. Quand votre pack prend l’eau comme ça, c’est compliqué de développer quoi que ce soit derrière.
Des individualités qui répondent présent
Marcos Kremer, par exemple. L’Argentin a été partout. Ses plaquages, sa présence dans les rucks, son intensité… Il a montré l’exemple. On l’a vu charger comme un buffle, renverser des adversaires, et surtout contaminer tout le monde avec son énergie.
Harry Plummer aussi mérite qu’on s’arrête sur sa prestation. L’ouvreur néo-zélandais a été précis au pied, a bien dirigé le jeu, et a même inscrit des points importants en fin de match pour sceller la victoire. Le public l’adore déjà, et on comprend pourquoi.
Et que dire de Giorgi Dzmanashvili ? Son essai en seconde période, au moment où Bordeaux revenait légèrement, a fait basculer définitivement la rencontre. Un essai de puissance, typique de ce qu’on attend d’un pilier droit moderne.
Une défense héroïque malgré les absences
La seconde période a été plus compliquée. La sortie sur blessure du capitaine Baptiste Jauneau dès le début a fait mal. Le demi de mêlée s’est blessé au genou, et on croise les doigts pour que ce ne soit pas trop grave. Mais ses coéquipiers ont serré les rangs.
Il y a eu cette séquence défensive vers l’heure de jeu, où Clermont a repoussé attaque après attaque bordelaise près de sa ligne. Le public a poussé, les joueurs se sont envoyés comme rarement cette saison. Ce genre de moment forge une équipe.
- Une défense agressive et solidaire
- Des plaquages à l’impact maximum
- Une conquête qui tient bon malgré la fatigue
- Une gestion intelligente des temps faibles
Ces ingrédients ont permis de tenir le score et même de creuser l’écart ensuite. Même l’essai un peu gag encaissé en toute fin de match n’a rien changé à l’euphorie générale.
Christophe Urios, entre soulagement et lucidité
L’entraîneur clermontois avait la pression avant ce match. On sentait que c’était un tournant. Il l’avait dit lui-même : il fallait gagner, point. Et ses joueurs ont répondu présent.
« Les gros joueurs ont pris leur responsabilité. On a retrouvé l’homogénéité qu’on avait perdue depuis un mois. »
– L’entraîneur de Clermont après la victoire
Il a même plaisanté sur la brume : « Je n’ai pas tout vu, on ne voyait pas tout sur le terrain ». Mais derrière l’humour, on sent un vrai soulagement. Les critiques étaient de plus en plus fortes, l’environnement devenait pesant. Cette victoire offre un peu de répit.
D’ailleurs, il a ajouté avec un sourire : il allait recevoir moins de textos désagréables ce soir-là. On imagine sans peine l’ambiance ces dernières semaines autour du club.
Et maintenant ? La crise est-elle vraiment derrière ?
Clermont reste 11e au classement. Ce n’est pas brillant. Mais le peloton n’a pas pris trop d’avance. Quelques victoires consécutives, et tout peut changer rapidement en Top 14. La question est : est-ce le début d’une nouvelle dynamique ?
J’ai l’impression que oui. Quand une équipe retrouve son identité, son combat, sa solidarité, c’est souvent le signe que les choses vont dans le bon sens. Les joueurs ont prouvé qu’ils étaient capables de réagir sous pression.
Mais attention, il faudra confirmer dès les prochains matchs. Le championnat est impitoyable, et les adversaires ne vont pas faire de cadeaux. Surtout que la blessure de Jauneau pourrait peser si elle est longue.
Pourquoi cette victoire fait autant de bien
Parce qu’elle arrive au bon moment, tout simplement. Après les fêtes, avec le Boxing Day et son ambiance particulière, Clermont avait besoin de ce genre de performance référence à domicile.
Le public a répondu présent malgré le froid et la brume. La Yellow Army a poussé, a chanté, a vibré. Ce soutien populaire est essentiel pour une équipe qui traverse une passe difficile.
- Une victoire convaincante sur un concurrent direct
- Une prestation collective aboutie
- Des leaders qui montrent l’exemple
- Un état d’esprit retrouvé
- Du temps gagné pour travailler sereinement
Tous ces éléments font que ce succès va au-delà des quatre points. Il redonne confiance, il soude le groupe, il calme les critiques. Bref, il change beaucoup de choses.
Personnellement, je pense que c’est peut-être le match qui va lancer vraiment la saison de Clermont. On a vu trop souvent des équipes rebondir après des périodes compliquées grâce à ce genre de performance fondatrice.
La brume s’est dissipée dimanche matin au-dessus de l’Auvergne. Espérons qu’elle ne revienne pas de sitôt sur le jeu clermontois. Parce que quand cette équipe joue à son niveau, elle peut poser des problèmes à tout le monde en Top 14.
Le rugby, finalement, c’est aussi ça : des matchs dans le brouillard où tout peut basculer, des équipes qui touchent le fond et qui rebondissent plus fortes. Clermont nous a offert un beau reminder de tout ça samedi soir.
Et vous, vous y avez cru jusqu’au bout ? Ou cette victoire vous a surpris autant que moi ? En tout cas, une chose est sûre : le Top 14 reste passionnant, imprévisible, et c’est pour ça qu’on l’aime.
