Vous souvenez-vous du frisson quand, petit, vous descendiez l’escalier le matin de Noël et découvriez enfin ce paquet brillant qui n’était là que pour vous ? Ce sentiment d’être spécial, même juste une journée. Aujourd’hui, dans l’Oise, des centaines d’enfants risquent de ne jamais connaître ça.
Pas parce qu’ils ont été sages ou pas. Simplement parce que la solidarité, cette année, tousse sévèrement.
Un effondrement qui laisse sans voix
Je me baladais récemment dans un centre commercial du département, comme tout le monde en cette période. Devant les stands de collecte, des bénévoles souriants tendaient des flyers. Et là, le choc : la plupart des gens passaient sans même pas un regard. Certains faisaient même un écart, comme si on leur proposait un crédit à la consommation. J’ai trouvé ça glaçant.
Et je ne suis visiblement pas le seul à avoir eu cette impression.
« Une personne sur deux s’en moque carrément. Il y a ceux qui donnent tout et ceux qui font semblant de ne pas nous voir. »
Un responsable d’une toute nouvelle collecte pour enfants malades
Le chiffre qui revient sans cesse chez les habitués ? Moitié moins de jouets neufs qu’à la même période l’an dernier. Et l’an dernier, c’était déjà catastrophique.
Pourquoi exiger du neuf, justement ?
On me pose souvent la question. Après tout, un jouet d’occasion propre fait aussi plaisir, non ? Oui, bien sûr. Mais pour certains enfants, le neuf a une valeur symbolique énorme.
Imaginez un gamin placé en foyer après des années de maltraitance. Le seul jouet qu’il a pu garder, on le lui a peut-être arraché. Recevoir quelque chose qui sort de son emballage, qui sent encore le plastique neuf, c’est comme une renaissance. Une preuve qu’on mérite, enfin, quelque chose rien qu’à soi.
Pour les enfants hospitalisés – surtout ceux en oncologie – c’est encore plus vital. Les services imposent le neuf pour des raisons d’hygiène strictes. Un doudou déjà aimé par un autre enfant peut transporter des germes mortels quand on a zéro défense immunitaire.
Les chiffres qui font mal
Voici, en vrac, ce que j’entends sur le terrain ces dernières semaines :
- Une association historique qui vise 1 500 jouets neufs en récolte à peine 300 à J-20.
- Une autre, qui avait déjà dû débourser 4 000 € de sa poche l’an dernier pour compléter, annonce qu’elle ne pourra plus le faire cette année.
- Une troisième, pourtant spécialisée dans l’occasion, reconnaît que même les dons de seconde main stagnent.
- Les cagnottes en ligne peinent à décoller : certaines tournent à quelques centaines d’euros là où il en faudrait des milliers.
Et pendant ce temps, le nombre d’enfants suivis par l’aide sociale à l’enfance dans l’Oise, lui, ne baisse pas. Il augmente même légèrement chaque année.
La faute à qui ? À tout le monde et à personne
Je refuse le discours moralisateur du style « les gens ne sont plus généreux ». D’abord parce que c’est faux : il y a encore des dons magnifiques, des anonymes qui vident leur caddie entier dans les bacs. Ensuite parce que la vie est devenue objectivement plus dure.
Inflation alimentaire à deux chiffres, factures énergétiques qui explosent, loyers qui grimpent… Quand on arrive tout juste à remplir le frigo pour ses propres gosses, offrir un jouet à 30 € à un enfant qu’on ne connaîtra jamais, ça devient un luxe.
Mais il y a autre chose, plus sournois. Une forme de fatigue de l’empathie. Depuis le Covid, on nous a demandé d’être solidaires tous les trois mois : masques, vaccins, Ukraine, inflation, séisme au Maroc, inondations… À force, certaines personnes saturent. C’est humain.
Les derniers espoirs avant la distribution
Il reste quelques dates cruciales dans l’Oise. Les bénévoles croient encore au sursaut :
- Ce week-end dans plusieurs grandes surfaces (Chambly, Pont-Sainte-Maxence, etc.)
- Les marchés de Noël locaux les 13 et 14 décembre
- Quelques points de collecte permanents dans des mairies ou clubs associatifs jusqu’au 19 décembre environ
Après, il sera trop tard. Le tri et la distribution prennent plusieurs jours, surtout quand il s’agit de répartir équitablement entre des dizaines de foyers et services hospitaliers.
« On va devoir faire des choix. Peut-être privilégier les tout-petits ou les ados, je ne sais pas encore. Mais devoir dire à certains qu’on n’a rien… c’est insupportable. »
Un président d’association de bikers engagés
Et si on changeait la donne, là, tout de suite ?
Franchement, ça ne demande pas grand-chose. Un jouet à 15-20 €, c’est le prix de deux menus fast-food. Et pourtant, ça peut illuminer la vie d’un enfant pour des années.
Si vous êtes dans l’Oise ou pas loin, regardez autour de vous. Il y a forcément une collecte près de chez vous ce week-end. Si vous êtes loin, les cagnottes en ligne acceptent les dons de 5 € – ça fait déjà un petit Lego ou un livre.
Parce que oui, il reste du temps. Mais vraiment très peu.
Et parce que, quelque part, un gamin que vous ne croiserez jamais attend peut-être le jouet que vous seul pouvez lui offrir.
Cette année, le Père Noël a besoin de nous tous pour exister.
P.S. : Si vous hésitez encore, repensez à votre meilleur Noël d’enfant. Ce jouet qui vous a fait hurler de joie. Certains gamins de l’Oise n’attendent même pas un vélo ou une console. Juste un truc neuf. Rien qu’à eux. C’est tout.
