Il y a des nouvelles qu’on préférerait ne jamais lire. Ce samedi 29 novembre 2025, en fin d’après-midi, un TGV qui filait vers Angers a brutalement rencontré l’irréparable : une personne s’est jetée sous le train. Le choc, inévitable à cette vitesse, a été fatal. Et comme à chaque fois dans ces cas-là, c’est tout un pan du réseau ferré qui s’est figé pendant plusieurs heures.
Je ne vais pas vous mentir : ces histoires me nouent toujours l’estomac. Parce qu’au-delà du drame humain, il y a ces centaines de voyageurs qui n’ont rien demandé, coincés dans des rames, parfois sans information claire, et surtout ce conducteur qui va porter cette image toute sa vie.
Ce qui s’est passé près de Bouchemaine
Vers 16 heures, sur la ligne classique entre Nantes et Angers-Saint-Laud, un TGV transportant environ 300 personnes percute mortellement un individu à Bouchemaine, dans le Maine-et-Loire. L’hypothèse privilégiée très rapidement par les enquêteurs ? Un geste volontaire. Les gendarmes parlent d’un « suicide probable ». Une enquête est ouverte, comme toujours, mais les premiers éléments ne laissent guère de place au doute.
Le train roule à près de 200 km/h sur cette portion. À cette vitesse, le conducteur n’a aucune chance de freiner à temps. Le choc est immédiat, violent, irréversible. La personne décède sur le coup.
« L’enquête judiciaire est terminée. Nous attendons maintenant l’autorisation des forces de l’ordre pour reprendre les circulations. »
Communiqué officiel du gestionnaire du réseau en fin d’après-midi
Un axe stratégique complètement paralysé
La ligne concernée n’est pas n’importe laquelle. C’est l’artère principale entre Nantes, Angers et Le Mans, et au-delà vers Paris ou Lille pour certains trains. Résultat : dès 16 h 15, plus rien ne passe dans les deux sens.
Les conséquences sont lourdes :
- Retards estimés entre 1 h 30 et 3 heures pour tous les TGV et Ouigo circulant dans le secteur
- Suppressions de dessertes sur certaines gares
- Détournements possibles via la LGV Atlantique quand c’est techniquement faisable
- Intercités également touchés
- Des trains immobilisés parfois plusieurs heures en pleine voie
En clair, c’est tout l’ouest qui tousse ce samedi soir. Et quand on sait que nous sommes à la veille d’un week-end prolongé pour certains, avec le pont de décembre qui approche, on imagine sans peine la galère des voyageurs.
Le traumatisme des 300 passagers et surtout du conducteur
Dans le TGV, l’ambiance a dû être terrible. Le freinage d’urgence, le choc sourd, puis le silence. Beaucoup de voyageurs ont compris immédiatement ce qui venait de se produire. Les témoignages qui filtrent parlent de cris, de pleurs, de passagers choqués.
Mais celui qui reste marqué à vie, c’est le conducteur. En France, on estime qu’un mécanicien de train vit ce genre d’événement dramatique tous les 3 à 5 ans en moyenne selon les secteurs. Chaque fois, c’est un traumatisme majeur. Cellule psychologique activée immédiatement, arrêt de travail long, parfois définitif.
« On ne s’habitue jamais. Même après 25 ans de métier, quand on voit quelqu’un se placer devant le train, on sait que c’est fini. Pour lui, et un peu pour nous aussi. »
Un conducteur expérimenté, témoignage anonyme recueilli il y a quelques années
Pourquoi ces drames se répètent-ils encore ?
La question revient à chaque fois, et elle est légitime. Comment, en 2025, avec toute la technologie dont on dispose, ces suicides sur les voies restent-ils aussi fréquents ?
D’abord un chiffre qui donne le vertige : en France, on compte environ 300 à 400 suicides par an sur le réseau ferré, selon les années. C’est énorme. Et chaque fois, c’est entre 2 et 6 heures d’interruption minimum.
Les solutions existent pourtant, mais elles coûtent cher :
- Clôtures anti-intrusion le long des zones sensibles (déjà fait sur certaines portions LGV, mais pas partout)
- Systèmes de détection automatique d’obstacles (en test)
- Caméras et intelligence artificielle pour repérer les comportements suspects en gare ou le long des voies
- Partenariats renforcés avec les associations de prévention du suicide
Le problème, c’est que le réseau classique français fait des milliers de kilomètres. Clôturer partout est quasi impossible. Et même là où c’est fait, certains passent par-dessus.
Et les voyageurs dans tout ça ?
Ils sont les grands oubliés, souvent. Coincés dans un train sans clim parfois, sans toilettes fonctionnelles après plusieurs heures, avec des enfants, des animaux, des correspondances ratées… La colère monte vite.
Ce que beaucoup ignorent, c’est que la SNCF a des procédures précises : prise en charge psychologique si nécessaire, distribution d’eau et de kits repas quand l’immobilisation dépasse 3-4 heures, remboursement ou report sans frais. Mais sur le moment, l’information ne passe pas toujours bien.
J’ai déjà vécu ça personnellement, il y a quelques années entre Bordeaux et Paris. Trois heures bloqués en pleine campagne après un accident de personne. L’ambiance dans la voiture-bar était surréaliste : certains pleuraient, d’autres râlaient, un monsieur âgé faisait des blagues pour détendre l’atmosphère. On finit par créer des liens bizarres dans ces moments-là.
Un trafic qui reprend doucement
Vers 19 heures, les autorités ont enfin donné leur feu vert. Les équipes ont remis la voie en état, vérifié la caténaire, contrôlé la motrice. Les premiers trains ont pu repartir, avec des retards qui se sont propagés toute la soirée.
À l’heure où j’écris ces lignes, le trafic reste très perturbé. Certains voyageurs dormiront à l’hôtel ce soir, pris en charge. D’autres ont tout simplement annulé leur week-end.
Ce genre de drame nous rappelle une chose essentielle : derrière les retards, les annulations, les galères, il y a d’abord une vie brisée. Une personne qui, pour des raisons qu’on ne connaîtra peut-être jamais, a choisi de mettre fin à ses jours de la manière la plus brutale qui soit.
Alors oui, on peste quand le train a trois heures de retard. Mais parfois, prendre un peu de hauteur ne fait pas de mal. Et se dire que derrière chaque « accident de personne », il y a un être humain qui n’allait pas bien. Très mal.
Prenez soin de vous. Et des autres.
