Vous êtes en terminale, vous visez une école de commerce et, comme tout le monde, vous rêvez d’intégrer l’une des cinq ou six stars qui trustent les classements. Mais avez-vous déjà pensé à ce qui se passe de l’autre côté du miroir ? À ces dizaines d’établissements solides, bien accrédités, qui galèrent pourtant à remplir leurs promotions ?
J’ai récemment discuté longuement avec la directrice générale d’une grande école de commerce post-prépa, pas dans le top 5, mais clairement pas non plus dans les bas-fonds. Et franchement, ce qu’elle m’a raconté m’a scotché. Parce que derrière les communiqués lisses et les photos souriantes sur LinkedIn, la réalité est brutale.
L’international ou la mort : la nouvelle règle du jeu
Première grande tendance : si tu n’as pas de campus à l’étranger en 2025, tu es déjà à moitié mort. Les écoles moyennes l’ont bien compris. Berlin, Dubai, Shanghai, Singapour… tout le monde y va. Mais attention, pas n’importe comment.
Pourquoi Berlin ? Parce que c’est proche géographiquement de l’est de la France pour certaines écoles, parce que la ville respire l’entrepreneuriat et parce que le coût reste raisonnable comparé à Londres post-Brexit. Un campus flambant neuf vient d’ouvrir dans le quartier d’Alt-Moabit, entièrement rénové pour coller à l’identité visuelle de l’école. L’idée : que l’étudiant qui passe de Nancy à Berlin ne sente aucun dépaysement.
« On pourrait ouvrir partout, mais on préfère faire peu et bien. On vise uniquement des villes où on peut garder notre niveau d’exigence. »
Traduction : on n’ouvre pas un bureau de recrutement déguisé en campus pour cocher la case « international ». On construit un vrai lieu de vie avec 500 étudiants à terme, des MSc entièrement en anglais, un International BBA et même des micro-certifications techniques.
Les prépas ne sont plus le Graal unique
Deuxième choc : les classes préparatoires EC se vident à vitesse grand V. Et ce ne sont pas les écoles moyennes qui en profitent. Ce sont les HEC, ESSEC, ESCP et consorts qui raflent la mise.
Conséquence directe : certaines écoles ont préféré réduire drastiquement leurs recrutements sur prépa plutôt que de descendre trop bas dans la liste d’attente.
« L’an dernier on a limité à 100 admissions post-prépa. On préfère garder le niveau que remplir à tout prix. »
C’est violent dit comme ça, mais c’est la réalité. Et ça pose une question de fond : les prépas vont-elles encore alimenter les grandes écoles dans dix ans ? La réponse est oui… mais de moins en moins. Les écoles diversifient déjà : admissions parallèles, BUT, université, bachelor étrangers. La mixité des profils devient même un argument de vente.
L’apprentissage, ce grand malade
Troisième bombe : l’instabilité des financements de l’apprentissage. Tout le secteur tousse. Les règles changent tous les six mois, les entreprises hésitent, les étudiants stressent.
Pourtant, les écoles sérieuses tiennent le choc en mettant la main à la poche quand il le faut. Elles renforcent leurs bourses internes, créent des fonds d’urgence. Parce que laisser un apprenti sans entreprise au dernier moment, c’est détruire des années de confiance.
Mais clairement, on a atteint un plafond. Certains acteurs peu scrupuleux ont pourri le marché avec des promesses intenables. Résultat : tout le monde paie l’addition.
Objectif 5 000 étudiants en trois ans
Avec un budget autour de 50 millions d’euros, l’équilibre financier reste l’obsession. L’objectif ? Passer de 3 200 à 5 000 étudiants rapidement. Comment ? Grâce à un recrutement international massif, notamment via un partenaire éducatif britannique qui injecte des dizaines de millions.
- 20 M€ déjà engagés pour le campus berlinois et le recrutement de profs-chercheurs
- Executive MBA en préparation en Inde
- 40 M€ d’investissements prévus au total
Le partenaire apporte l’argent et la vision long terme. L’école apporte les accréditations françaises et internationales. Un mariage de raison qui semble fonctionner.
Et les femmes à la tête des grandes écoles ?
Petite parenthèse qui mérite d’être ouverte : il y a encore très peu de femmes directrices générales de grandes business schools en France. La personne que j’ai interviewée l’a dit cash : quand elle partira (pas tout de suite, le projet la passionne trop), elle souhaite que ce soit une femme qui prenne la suite.
Un détail ? Non. Un signal fort dans un milieu encore ultra-masculin au sommet.
Ce que ça change pour vous, futur étudiant
Concrètement, si vous visez une école hors top 5, les opportunités n’ont jamais été aussi nombreuses :
- Campus à l’étranger dès la première année possible
- Parcours 100 % anglais
- Spécialisations pointues dès la L3 ou M1
- Bourses plus généreuses pour compenser l’apprentissage instable
- Mixité des profils valorisée (donc plus de chances si vous venez d’université ou BUT)
Et surtout, des écoles qui se battent pour vous séduire plutôt que de vous faire passer au laminoir des concours.
Alors oui, les tops schools continuent de dominer. Mais le paysage 2026-2030 va profondément changer. Les écoles moyennes montent en gamme, s’internationalisent à marche forcée et deviennent parfois plus attractives pour un étudiant qui veut une expérience vraiment globale sans payer 15 000 € de frais de scolarité par an.
La guerre est déclarée. Et croyez-moi, les prochains classements risquent de réserver quelques surprises.
Personnellement, ce qui m’a le plus marqué dans cet échange, c’est la lucidité. Pas de langue de bois, pas de discours marketing. Juste la réalité d’un secteur en pleine mutation démographique, financière et géopolitique. Et ça fait du bien.
Si vous préparez Parcoursup ou un concours en 2026, ne regardez plus seulement les cinq premières lignes des classements. Creusez. Visitez. Posez des questions cash. Vous pourriez être très agréablement surpris.
