Imaginez-vous entrer sous un chapiteau et tomber nez à trompe avec un éléphant de plus de trois mètres soixante. Vous reculez d’un pas, le cœur qui bat un peu plus vite… puis vous réalisez qu’il cligne des yeux un peu trop lentement. À Chartres, en ce moment même, c’est exactement ce qui arrive aux spectateurs du spectacle Imaginarium. Et franchement, c’est bluffant.
Quand le cirque du XXIe siècle réinvente totalement ses icônes
Le cirque sans animaux, on en parle depuis des années. Certaines compagnies ont choisi la voie facile : supprimer purement et simplement les numéros avec éléphants, lions ou tigres. D’autres, comme Rêves de Cirque, préfèrent une solution bien plus audacieuse : recréer l’émotion brute que procure un pachyderme… sans faire souffrir le moindre animal.
Le résultat ? Un géant de silicone, de métal et de rêves qui pèse son poids (littéralement) et qui vole la vedette à tous les artistes humains. Et croyez-moi, quand on voit la bête en mouvement, on oublie très vite qu’il y a un opérateur caché à l’intérieur.
Deux ans de gestation pour un éléphant plus vrai que nature
Tout a commencé par une idée un peu folle : moderniser le vieux cliché du saltimbanque avec sa marionnette. L’équipe s’est souvenue que, au XVIIIe siècle déjà, les forains qui n’avaient pas les moyens d’avoir de vrais animaux bricolaient des marionnettes géantes. Pourquoi ne pas reprendre le concept… en version 2025 ?
- Direction l’Inde, pays où l’éléphant est sacré et où des artisans vivent encore avec eux au quotidien.
- Une artiste indienne spécialisée dans la sculpture hyperréaliste s’occupe de la peau, des plis, des veines, des poils par poils.
- Un ingénieur local conçoit le squelette mécanique et les dizaines de moteurs.
- Deux années de tests, d’ajustements, de nuits blanches.
Le résultat est là : 3,60 m au garrot, plusieurs tonnes, une trompe entièrement manipulée à la main et des oreilles qui battent au rythme de la musique. Les yeux clignent, la queue fouette l’air, la tête se balance avec une douceur effrayante de réalisme.
« On voulait que les gens se posent la question deux secondes : vrai ou faux ? Et quand ils comprennent que c’est une création, qu’ils soient encore plus émerveillés. »
– Un membre de la compagnie
Moitié robot, moitié humain : le secret de la magie
L’astuce la plus géniale, c’est le système hybride. Pas de simple télécommande comme dans un jouet géant. À l’intérieur de l’éléphant, un artiste pilote en direct certains mouvements pendant que des programmes préenregistrés assurent les gestes de base.
Exemple concret : la tête peut osciller doucement grâce à l’électronique, mais si l’acrobate qui danse autour a besoin d’un mouvement plus ample, l’opérateur à l’intérieur amplifie instantanément. La trompe, elle, est 100 % manuelle – un véritable prolongement du corps de l’artiste caché. C’est cette fusion qui donne vie à la bête.
Résultat sur piste : l’éléphant réagit à la musique, accompagne les tableaux, porte un artiste sur son dos, souffle même de la poussière avec sa trompe. Les enfants hurlent de joie, les adultes restent bouche bée. Mission accomplie.
Imaginarium : bien plus qu’un éléphant robotisé
Forcément, on pourrait croire que tout le spectacle repose sur cette star mécanique. Erreur. Imaginarium est une véritable fresque circassienne qui mélange :
- Acrobates venus d’Ukraine, d’Éthiopie, du Mexique ou d’Inde
- Numéros aériens à couper le souffle
- Clowns poétiques (si, si, ça existe)
- Danse contemporaine et théâtre masqué
- Jonglage lumineux et pyrotechnie douce
Le tout sans temps mort pendant deux heures. On passe du rire aux larmes, de l’étonnement à l’émerveillement pur. L’éléphant n’est que la cerise sur un gâteau déjà énorme.
Ce qui frappe aussi, c’est la diversité des artistes. D’anciens gymnastes olympiques reconvertis, des danseurs traditionnels indiens, des porteurs africains… Le cirque devient un vrai carrefour culturel, loin des clichés d’autrefois.
Pourquoi cette tendance va (probablement) tout changer
Soyons honnêtes : la pression sociétale sur les animaux dans les cirques ne faiblit pas. De plus en plus de pays interdisent purement et simplement les numéros avec fauves ou éléphants. Plutôt que de se battre contre ces évolutions, certaines compagnies choisissent l’innovation radicale.
Et si demain tous les grands cirques traditionnels passaient à l’animatronique haute couture ? On garderait l’émotion, la magie, le gigantisme… sans l’ombre éthique. Personnellement, j’ai toujours été partagé sur la question des animaux de cirque. Voir cet éléphant-là m’a presque réconcilié avec l’idée : on peut faire rêver sans faire souffrir.
Et puis il y a un côté poétique. L’éléphant mécanique devient une métaphore : l’homme qui recrée la nature, qui la dépasse presque. Un peu comme les automates du XVIIIe siècle, mais avec les moyens d’aujourd’hui.
Infos pratiques pour ne pas rater le spectacle à Chartres
Le chapiteau est installé jusqu’au 7 décembre seulement à l’Iliade (Parc des Expositions de Chartres). Voici les dernières dates :
- Vendredi 5 décembre : 18 h et 20 h 30
- Samedi 6 décembre : 14 h 30, 17 h (complet) et 19 h 30
- Dimanche 7 décembre : 10 h 45, 14 h et 16 h 30 (complet)
Tarifs entre 10 € (visibilité réduite) et 50 € (première catégorie). Franchement, même en catégorie 2, on voit parfaitement l’éléphant – et c’est largement suffisant pour être scotché.
Petit conseil de ma part : arrivez un peu en avance. L’ambiance sous chapiteau avant le début, avec les lumières tamisées et la musique qui monte doucement, fait déjà partie du spectacle.
Mon avis après avoir vu Imaginarium en vrai
J’y suis allé sceptique. Un éléphant robot, très peu pour moi. Je suis reparti avec des étoiles plein les yeux et l’envie d’y retourner avec mes neveux. Parce que oui, c’est familial sans être gnangnan, impressionnant sans être effrayant, moderne sans renier la tradition circassienne.
Le moment où l’éléphant s’approche du bord de la piste et tend la trompe vers les premiers rangs… j’ai vu des adultes retenir leur souffle comme des gosses de cinq ans. C’est ça, la vraie magie.
Si vous êtes dans le coin (ou même à deux heures de route), foncez. Dans dix ans, on se dira peut-être que c’est à Chartres que le cirque a basculé dans une nouvelle ère. Et on aura raison.
Alors, prêt à aller saluer le plus beau faux éléphant du monde ?
