Il y a des nouvelles qui vous tombent dessus comme un uppercut. Vous êtes là, à scroller tranquillement, et d’un coup, plus rien ne va. Enzo Badenas, 17 ans à peine, champion d’Espagne 85 cm³, sélectionné en équipe nationale… parti en un instant lors d’un simple entraînement. On a beau connaître les risques du motocross, ça reste toujours ce goût amer : pourquoi lui, pourquoi maintenant ?
Je me souviens encore de la première fois où j’ai vu des images de gamins de 12-13 ans envoyer des whips énormes sur des 85. On se dit qu’on se disait « celui-là, il va tout casser ». Enzo, c’était exactement ça. Un gamin qui semblait né sur une moto.
Un destin qui s’annonçait exceptionnel
Né en janvier 2008 à Gandia, sur la côte est espagnole, Enzo Badenas a grandi les mains dans le cambouis et les yeux rivés sur les circuits. Dès ses débuts, il a enchaîné les podiums dans les championnats régionaux avant de exploser au niveau national.
2022 reste l’année où tout le monde a vraiment compris. À tout juste 14 ans, il décroche le titre de champion d’Espagne 85 cm³. Pas un petit championnat local, non : le vrai, celui où tout le gratin espagnol se bat. Et il gagne. Nettement.
« Sa progression personnelle et professionnelle était remarquable. Sélectionné en équipe d’Espagne, il participait déjà aux championnats d’Europe… »
Communiqué du centre d’entraînement où il évoluait
L’année suivante, il intègre le CETDM (Centre spécialisé de technologie des sports motorisés) rattaché au circuit Ricardo Tormo de Valence. Autant dire le saint des saints pour un jeune espagnol qui rêve de motocross. Là-bas, il travaille avec les meilleurs entraîneurs, bénéficie de structures ultra-pro et côtoie les pilotes qui roulent déjà en MX2 ou MXGP.
Le jour où tout s’est arrêté
Dimanche 7 décembre 2025. Séance privée sur le complexe Red Sand Park, à Vilafamés (Castellón). Un circuit connu, technique, avec du sable lourd et des sauts exigeants. Enzo roule, comme il l’a fait des centaines de fois. Et puis l’accident. Grave. Irréversible.
Les détails précis ne sont pas publics – et c’est tant mieux, la famille mérite le respect – mais on sait que les secours n’ont rien pu faire. À 17 ans, la vie s’arrête là, sur une piste qu’il adorait.
Depuis, les réseaux sociaux du motocross espagnol (et même au-delà) sont inondés de messages. Des pilotes pros, des amateurs, des clubs, des sponsors… Tout le monde poste la même photo : Enzo en plein vol, sourire éclatant sous le casque. On sent la sidération générale.
Le motocross, sport magnifique… et impitoyable
On ne va pas se mentir : on adore ce sport pour l’adrénaline, les sauts fous, le bruit, la poussière. Mais il y a cette face sombre qu’on essaie parfois d’oublier. Les chutes font partie du jeu, et parfois elles ne pardonnent pas.
Ces dernières années, on a perdu trop de jeunes talents. Je pense à Igor Cuharciuc, à René Hofer, à tant d’autres… Et maintenant Enzo. À chaque fois, la même question revient : peut-on faire plus pour la sécurité sans dénaturer le sport ?
- Meilleurs équipements (airbags, colliers cervicaux nouvelle génération)
- Circuits repensés avec des zones de réception plus larges
- Préparation physique ultra-spécifique pour absorber les chocs
- Formation continue sur la gestion du risque
Malgré tout, le risque zéro n’existera jamais. C’est aussi ce qui rend ces pilotes admirables : ils savent, et ils y vont quand même.
Ce qu’Enzo laisse derrière lui
Plus qu’un palmarès (déjà impressionnant pour son âge), Enzo laisse une image : celle d’un gamin passionné, toujours souriant, qui inspirait les plus jeunes. Sur les réseaux, on voit des vidéos de lui qui donne des conseils à des minots de 8-9 ans après l’entraînement. Classe.
Ses potes du CETDM racontent qu’il était le premier arrivé et le dernier parti. Qu’il passait des heures à analyser ses vidéos embarquées, à bosser ses départs, à tester des réglages. Le genre de pilote qui ne laisse rien au hasard.
Au-delà du sportif, il y avait le garçon. Ceux qui l’ont côtoyé parlent d’un mec « simple, drôle, attachant ». Le genre de personne que tout le paddock regrettera.
Et maintenant ?
Le motocross espagnol est en deuil, mais aussi le motocross européen tout entier. Parce qu’Enzo n’était pas « juste » un espoir espagnol. Il avait déjà montré en EMX85 et EMX125 qu’il pouvait battre les meilleurs juniors du continent.
On l’imaginait facilement en MX2 d’ici deux ans, puis en MXGP avec les Viñales, Prado, Fernandez… Cette génération dorée espagnole perd aujourd’hui l’un de ses membres les plus brillants.
Mais surtout, une famille perd un fils, des amis perdent un frère de cœur. Et ça, aucun titre ne pourra jamais le remplacer.
Repose en paix, Enzo. Continue de voler là-haut, là où il n’y a plus de limites de vitesse ni de zones de danger. Tu resteras à jamais dans le cœur du motocross.
Et à tous les jeunes qui roulent ce week-end : prenez soin de vous. On veut vous revoir entiers sur le podium, pas en photo d’hommage.
