Imaginez un gamin qui annonce à 8 ans qu’il sera avocat. Quinze ans plus tard, il est en première année de droit dans la fac la plus réputée de France… et talonneur en équipe première d’un club qui joue la montée en Pro D2. Non, ce n’est pas le scénario d’un film feel-good américain. C’est la vraie vie de Mehdi, 19 ans, et franchement, quand on écoute son parcours, on se dit que certains naissent juste avec une longueur d’avance… ou alors ils bossent comme des fous pour rattraper le temps perdu.
Quand le déclic arrive en internat
Mehdi n’a pas toujours été le premier de la classe. Loin de là. Au collège, il tournait à 12-13 de moyenne, rien de transcendant. En troisième, quelques galères extrascolaires font dérailler le train. Ses parents prennent une décision radicale : direction l’internat à Igny, au lycée La Salle Saint-Nicolas. Et là, bim, déclic.
« C’était ma seconde chance », raconte-t-il aujourd’hui avec le sourire. Nouvelle bande de potes, cadre strict, profs qui croient en lui. Il se met à bosser sérieusement, rattrape son retard et finit par cartonner. Résultat : bac général mention bien avec HGGSP, SES et un 15 de moyenne en terminale. Pas mal pour quelqu’un qui se voyait encore « moyen moins » deux ans avant.
Dans la vie, il faut travailler. Point. Ça n’a pas été simple, j’ai dû bosser plus que les autres, mais le Mehdi de troisième a disparu.
Mehdi
Le film qui a tout changé
À la même époque, il découvre Le Brio en classe de troisième. L’histoire d’une jeune femme issue des quartiers qui intègre la prestigieuse université Panthéon-Assas et explose aux concours d’éloquence. Mehdi, originaire d’Ivry-sur-Seine, se reconnaît totalement. À partir de ce moment, c’est clair : ce sera Assas ou rien.
Il enchaîne les stages en cabinet d’avocats – trouvés tout seul, sans piston zéro – dès la troisième puis en seconde, dans un bel immeuble haussmannien près des Champs-Élysées. Il voit les plaidoiries, les contrats à plusieurs zéros, l’adrénaline des audiences. Le virus est définitivement attrapé.
Et soudain… le ballon ovale
En terminale, son lycée propose une section sport-études avec le Rugby Club Massy Essonne, un gros centre de formation. Mehdi n’y connaît rien au rugby. Il sait juste que le ballon n’est pas rond et que les All Blacks font peur. Mais il a le gabarit (1m85, 105 kg aujourd’hui), alors on lui dit : « Viens essayer. »
Il essaie. Il kiffe. En quelques mois, il passe de « c’est quoi une mêlée ? » à titulaire en équipe Crabos, puis Reichel (l’équivalent Espoirs). Il dévore les vidéos YouTube, lit des livres sur le rugby à la bibliothèque, va voir des matchs du Stade Français. Le gamin est obsédé.
Moins de deux ans après ses premiers pas, il obtient le statut de sportif de haut niveau inscrit sur les listes ministérielles. À la fac, cela lui donne droit à un aménagement d’emploi du temps et des examens déplacés. Un luxe rare en première année de droit.
Une journée dans la peau d’un double projet
Debout 6 h 30. Cours à l’antenne d’Assas à Melun jusqu’à 17 h max. Direct à la BU pour relire les TD de droit civil ou constitutionnel. À 18 h, direction le stade de Charléty ou Massy pour deux heures d’entraînement intensif. Rentré chez ses parents à Charenton vers 22 h 30 – 23 h. Douche, repas, et encore une petite heure de révisions avant de dormir.
- 5 entraînements par semaine
- Match le dimanche (souvent à l’extérieur)
- Nutritionniste, préparateur mental, préparateur physique, kinés à disposition
- Pas de soirée, très peu de sorties
Et pourtant, il assure en cours. « La fac fait vraiment tout pour nous aider », précise-t-il. Les profs comprennent, les dates d’examens sont décalées, les absences justifiées. Mais le rythme reste infernal.
Les blessures, c’est ce qui me fait le plus peur. J’ai déjà fait un ligament et un ménisque en peu de temps. Le rugby de haut niveau, ça ne pardonne pas.
L’éloquence, l’arme secrète
En terminale, sa CPE le pousse à participer au concours d’éloquence du lycée. Il a la trouille, mais accepte. Et là, révélation : il adore. Depuis, il répète sans cesse cette phrase qui résume tout :
Si tu parles bien dans la vie, tu peux faire de grandes choses. L’éloquence, ça ouvre toutes les portes.
Mehdi
Il participe encore aujourd’hui à des concours, prend des cours de théâtre pour travailler la voix et la posture. Parce que, oui, un bon avocat, c’est d’abord quelqu’un qui sait captiver un tribunal.
Droit, rugby… ou les deux ?
Aujourd’hui, Mehdi hésite. Vraiment. Le rêve d’enfant reste intact : passer le CRFPA, prêter serment, plaider. Mais le rugby lui a apporté des valeurs qu’il n’imaginait pas : solidarité, résilience, dépassement de soi permanent.
Il voit déjà une porte de sortie élégante : le master droit des affaires spécial sportifs de haut niveau proposé à certains athlètes de haut niveau, puis un poste de juriste dans un club ou une fédération, ou agent de joueurs. « Je veux lier les deux mondes », explique-t-il. Stage prévu cette année dans un cabinet spécialisé en droit du sport.
En attendant, il continue de tout donner sur les deux tableaux. Président du conseil municipal des jeunes de sa ville, ancien du Service National Universel (il a adoré), il déborde d’énergie. Quand on lui demande comment il fait pour ne pas craquer, il rigole : « Je dors peu, mais je dors bien. »
Ce qu’on peut tous en retenir
L’histoire de Mehdi n’est pas seulement celle d’un surdoué du ballon ovale ou du Code civil. C’est surtout la preuve qu’un déclic, même tardif, peut tout changer. Qu’un internat, un film, un prof, un entraîneur peuvent littéralement réécrire une trajectoire.
Et surtout que, non, il ne faut pas avoir été bon à l’école depuis toujours pour viser l’excellence. Il suffit parfois de tomber sur les bonnes personnes au bon moment, et de bosser comme un dingue ensuite.
Alors la prochaine fois qu’un ado vous dit qu’il est « nul » ou qu’il a raté son collège, racontez-lui l’histoire de ce gamin d’Ivry qui, en deux ans, est passé de 12 de moyenne à Assas + statut sportif de haut niveau.
Parce que des fois, les plus belles histoires ne sont pas dans les films. Elles sont juste à côté de nous.
Et vous, vous avez connu ce genre de déclic qui a tout changé ? Racontez-nous en commentaire, ça m’intéresse vraiment.
