Imaginez un instant : un joueur de basket, star incontestée, traverse une carrière jalonnée de médailles internationales, mais n’a jamais soulevé un trophée en club. Cette image, c’est celle d’un compétiteur acharné, d’un homme qui, à 32 ans, refuse de laisser le destin lui glisser entre les doigts. Ce joueur, c’est Evan Fournier, l’arrière français d’Olympiakos, prêt à tout donner lors du Final Four de l’Euroligue 2025 à Abu Dhabi. Dans cet article, je vous emmène dans son parcours, ses frustrations, ses rêves, et cette quête obsessionnelle pour un premier titre professionnel. Pourquoi ce moment est-il si crucial pour lui ? Et qu’est-ce qui fait de Fournier un athlète à part ?
Un Champion Sans Couronne : Le Paradoxe Fournier
Quand on pense à Evan Fournier, on visualise un scoreur d’élite, un leader des Bleus avec deux médailles d’argent olympiques (2021, 2024) et un palmarès international qui force le respect. Pourtant, il y a un vide dans sa vitrine : aucun titre en club. C’est presque difficile à croire pour un joueur de son calibre, qui a écumé la NBA pendant 12 saisons et s’impose aujourd’hui comme une pièce maîtresse d’Olympiakos, avec une moyenne de 16 points par match. Ce paradoxe, Fournier le vit comme une épine dans le pied, une pensée qui le hante sans pour autant le briser.
Je n’en fais pas des cauchemars, mais… j’y pense. Surtout quand il s’agit de l’Euroligue, une compétition qui résonne différemment.
– Evan Fournier, à propos de son absence de titre
Cette quête d’un trophée, c’est bien plus qu’une ligne à ajouter à son CV. Pour Fournier, c’est une affaire d’identité. Fils de judokas, élevé dans une famille où la compétition est une religion, il porte en lui une rage de vaincre qui transcende les parquets. Mais face à Monaco, ce vendredi soir en demi-finale, l’enjeu est colossal : un faux pas, et le rêve s’évanouit encore.
Des Racines de Combattant
Pour comprendre Fournier, il faut remonter à ses origines. Né à Saint-Maurice, près de Paris, il grandit dans l’ombre de Charenton, un club où il domine les catégories jeunes. Ses parents, anciens judokas, lui inculquent une mentalité de guerrier. J’ai toujours trouvé fascinant comment l’environnement familial peut façonner un athlète. Dans le cas de Fournier, c’est presque caricatural : son père hurle pendant les matchs, sa mère râle sur un lancer franc raté. Pas étonnant qu’il déteste perdre.
Une anecdote illustre parfaitement cet état d’esprit. En catégorie poussins, après une défaite, un parent tente de le consoler : « Ce n’est pas grave. » Réponse immédiate de son père : « Si, c’est très grave ! » Cette intensité, Fournier la porte encore aujourd’hui. Perdre, c’est personnel. C’est une blessure qui ne cicatrise qu’avec une victoire.
- Charenton : domination dans les compétitions jeunes, forgeant son instinct de gagnant.
- Parents judokas : une éducation où la compétition est un mode de vie.
- Mentalité : perdre n’est jamais acceptable, une leçon gravée dès l’enfance.
Cette mentalité l’a suivi tout au long de son parcours, de ses débuts à Nanterre et Poitiers jusqu’à son arrivée en NBA en 2012 avec Denver. Mais c’est aussi ce qui rend son absence de titre si frustrante. Comme il le dit lui-même, perdre contre des adversaires comme l’Espagne (Euro 2015, 2022) ou les États-Unis (JO 2021, 2024) n’a rien d’infamant. Mais ça laisse des traces.
La NBA : Un Rêve Sans Couronne
Quand Fournier débarque en NBA à 20 ans, il est plein d’ambition. À Denver, il vit une première saison prometteuse : 57 victoires, une qualification en play-offs. Naïf, il se dit : « Dans deux ans, je suis champion. » Spoiler : ça ne s’est pas passé comme prévu. L’équipe implose, le coach est viré, et Fournier enchaîne les saisons sans jamais atteindre les sommets espérés.
À Orlando, où il passe sept ans, il goûte aux play-offs à deux reprises, mais sans jamais aller loin. « C’était plus fun », admet-il, mais la réalité est dure : en NBA, gagner un titre demande un alignement parfait des planètes. Blessures, transferts, concurrence féroce… Fournier a tout vu, tout vécu. Et pourtant, ce n’est pas en NBA qu’il a trouvé ce « rush » qu’il aime tant.
| Période | Équipe | Résultat marquant |
| 2012-2014 | Denver | Play-offs 2013, 57 victoires |
| 2014-2021 | Orlando | Play-offs 2019, 2020 |
| 2021-2024 | Boston, New York, Detroit | Aucun play-off notable |
| 2024- | Olympiakos | Final Four Euroligue 2025 |
Ce qui frappe dans ce parcours, c’est la résilience. Fournier n’a jamais baissé les bras, même quand les opportunités de titre s’éloignaient. Mais après 12 ans en NBA, il choisit de revenir en Europe. Pourquoi ? Pas seulement pour un trophée, mais pour retrouver cette adrénaline des grands moments.
Le Retour en Europe : Une Nouvelle Flamme
L’été 2024 marque un tournant. Fournier signe avec Olympiakos, l’un des géants du basket européen. Ce choix, il l’explique simplement : il veut vivre des matchs où l’enjeu fait vibrer. L’Euroligue, avec son intensité et ses rivalités, est le terrain idéal pour un compétiteur comme lui. Et les fans grecs, réputés pour leur ferveur, l’ont adopté comme l’un des leurs.
Ce qui me fait kiffer, ce sont les gros tournois où l’enjeu fait ressortir une partie de moi que je n’exprime jamais ailleurs.
– Evan Fournier, sur sa quête d’intensité
À Olympiakos, Fournier trouve un rôle taillé sur mesure : leader offensif, il enchaîne les performances, devenant une arme redoutable avec ses 16 points et 2,5 passes par match. Mais le vrai test arrive maintenant, avec le Final Four. Face à Monaco, un autre club français, l’équation est simple : gagner ou rentrer chez soi. Et pour Fournier, c’est une chance unique de mettre fin à cette anomalie dans sa carrière.
Le Final Four : Une Occasion en Or
Le Final Four 2025, organisé à Abu Dhabi, est un théâtre à la hauteur des ambitions de Fournier. Olympiakos affronte Monaco en demi-finale, un duel franco-français où chaque panier comptera. Pour Fournier, c’est l’occasion de montrer qu’il peut transcender son équipe, comme il l’a fait avec les Bleus lors des JO. Mais Monaco, avec son roster solide et son style agressif, ne sera pas une proie facile.
Ce qui rend ce moment si spécial, c’est la pression. Fournier excelle dans ces situations. Comme il le dit, c’est dans ces matchs à enjeu qu’il se sent « le plus lui-même ». Une sorte de transe compétitive, presque spirituelle, où chaque action devient un défi personnel. Et si Olympiakos passe l’obstacle monégasque, la finale pourrait être l’apogée de sa carrière.
Les Cicatrices des Défaites Passées
Pour comprendre l’état d’esprit de Fournier, il faut regarder ses défaites. Les finales perdues contre les États-Unis (JO 2021, 2024), la demi-finale de l’Euro 2015 contre l’Espagne, ou encore la Coupe du monde 2019 face à l’Argentine. Chaque revers a laissé une marque. Fournier parle de « traumatismes » et de « frustrations » envers des adversaires comme Kevin Durant ou Facundo Campazzo. Voir les autres célébrer un titre ? « Ça pique », avoue-t-il.
Pourtant, ces échecs l’ont construit. Lors de la Coupe du monde 2019, après une médaille de bronze qu’il glisse dans sa chaussette, dégoûté, il finit par l’accepter. « Elle est chez mes parents, affichée. Ils en sont fiers », raconte-t-il avec un sourire. Cette capacité à transformer la frustration en carburant est ce qui le rend unique.
Un Leader au Cœur des Bleus
Avec l’équipe de France, Fournier a écrit des pages mémorables. Meilleur marqueur des Bleus de 2017 à 2023, il a porté son équipe vers des exploits historiques, comme l’argent à Tokyo en 2021. Ce moment, il en parle encore avec des étoiles dans les yeux : « On était sur un nuage. » Mais même ces médailles ne comblent pas le vide d’un titre en club.
Son leadership va au-delà des stats. « On a véhiculé des valeurs de combat », explique-t-il. Ce n’est pas seulement une question de points marqués, mais d’esprit. Fournier incarne cette mentalité de « chien » qui ne recule devant rien, une qualité forgée dans les dojos de son enfance et sur les parquets du monde entier.
Et Après ? L’Euro 2025 et au-delà
À 32 ans, Fournier ne se projette pas trop loin. L’Euro 2025 (27 août-14 septembre) avec les Bleus ? « J’espère être là », dit-il, tout en mentionnant une cheville qui le fait souffrir. Mais une chose est sûre : tant qu’il n’aura pas soulevé un trophée, il continuera. Et même s’il gagne ce week-end, il l’assure : « Ça n’effacera pas le passé, ses succès et ses déceptions. »
Ce qui me touche dans son discours, c’est cette sérénité. Fournier n’est pas « désespérément » à la recherche d’un titre. Il joue pour le plaisir, pour ce « rush » qui le fait vibrer. Et si le destin ne lui offre pas cette coupe, sa vie ne sera pas ratée. Une leçon d’humilité pour un champion dans l’âme.
Pourquoi Fournier Fascine
Qu’est-ce qui rend Evan Fournier si captivant ? Peut-être cette dualité : un compétiteur féroce, prêt à tout pour gagner, mais aussi un homme lucide, capable d’accepter que le titre ne définit pas tout. Son parcours, des dojos de l’Insep aux parquets de l’Euroligue, est une ode à la persévérance. Et ce week-end, à Abu Dhabi, il a une chance de réécrire son histoire.
Alors, va-t-il enfin soulever ce trophée ? Face à Monaco, puis peut-être en finale, Fournier jouera avec cette flamme qui ne s’éteint jamais. Et même si l’issue reste incertaine, une chose est sûre : il se battra comme un lion. Parce que c’est ça, être Evan Fournier.
