Imaginez-vous dimanche soir, lumières d’Abou Dhabi qui s’allument une à une, trois pilotes qui grimpent dans leur cockpit en sachant que l’un d’eux va devenir champion du monde 2025. Et que les deux autres rentreront chez eux avec des regrets immenses. Ça ne vous donne pas des frissons ? Moi, ça fait des années que je n’avais pas ressenti une telle électricité avant une dernière course.
Un scénario qu’on n’avait plus vu depuis quinze ans
Pour la première fois depuis 2010, le titre pilotes se jouera à trois lors du dernier Grand Prix. Douze points séparent le premier du troisième. C’est énorme et minuscule à la fois en Formule 1 moderne. D’un côté, ça semble confortable. De l’autre, un accrochage, une safety car mal placée ou une stratégie foireuse et tout s’effondre.
Ce qui rend ce final encore plus dingue, c’est cette statistique qui donne des sueurs froides : lors des cinq dernières fois où au moins trois pilotes pouvaient mathématiquement être sacrés à l’ultime course (1981, 1983, 1986, 2007, 2010), celui qui arrivait en tête du championnat n’a jamais gagné. Jamais. Zéro sur cinq. On parle quand même de légendes qui ont trébuché au pire moment.
Lando Norris, le favori qui doit gérer une pression inédite
Lando part avec 12 points d’avance et la voiture clairement la plus rapide du plateau depuis plusieurs mois. Sur le papier, c’est presque plié. Il peut terminer troisième derrière Verstappen et Piastri et être quand même champion. Dit comme ça, on se dit qu’il suffit de rouler propre et d’éviter les ennuis.
Mais voilà, Lando n’a jamais été dans cette situation. Gagner des courses oui, dominer une saison oui, mais jouer un titre mondial à la dernière manche ? C’est autre chose. J’ai encore en tête ses erreurs sous pression à certains moments de 2024. Il a progressé, énormément, mais dimanche il n’aura pas le droit à l’erreur.
« S’ils restent calmes et font une course normale, même ennuyeuse, Lando sera champion. »
Martin Brundle, ancien pilote et consultant respecté
Facile à dire depuis le studio TV. Sur la grille, avec 60 tours à gérer, les nerfs vont être mis à rude épreuve.
Oscar Piastri, l’outsider qui peut tout faire exploser
À 24 points de Norris, l’Australien est le moins bien placé des trois. Mais il a une arme secrète : il pilote exactement la même voiture que le leader. S’il gagne la course avec le meilleur tour et que Lando termine au-delà de la 4ᵉ place, Piastri est champion. Improbable ? Oui. Impossible ? Sûrement pas.
Et puis il y a cette dynamique d’équipe chez McLaren. Officiellement, l’écurie soutient Norris. Mais Piastri a montré cette saison qu’il ne se laisse pas faire. Souvenez-vous Las Vegas : il a ignoré les consignes pour garder la tête. Dimanche, si l’occasion se présente, pensez-vous vraiment qu’il lèvera le pied pour son coéquipier ? Je ne crois pas une seconde.
L’aspect psychologique est fascinant. Piastri n’a rien à perdre. Il joue déjà la saison de sa vie. Alors que Norris porte tout le poids d’un premier titre pour McLaren depuis 2008.
Max Verstappen, le champion en titre qui refuse de lâcher
À 12 points, le Néerlandais a besoin de gagner la course et que Norris termine 3ᵉ ou moins bien. Dit comme ça, ça semble compliqué. Mais on parle de Max Verstappen. Le gars qui a gagné trois titres d’affilée et qui a l’habitude de réaliser l’impossible.
Sa Red Bull n’est plus la fusée de début de saison, mais sur un circuit comme Yas Marina, avec ses longues lignes droites et ses zones DRS, tout reste possible. Et puis Max a cette capacité hallucinante à transformer une course moyenne en victoire quand ça compte vraiment.
Il l’a dit lui-même cette semaine : « Je ne viens pas ici pour faire de la figuration. » Traduction : il va attaquer comme un mort de faim dès le premier virage.
Tous les scénarios possibles en un coup d’œil
| Position Norris | Ce qu’il faut pour être champion |
| 1ᵉʳ ou 2ᵉ | Champion quoi qu’il arrive |
| 3ᵉ | Champion même si Verstappen et Piastri font 1-2 |
| 4ᵉ | Champion sauf si Verstappen gagne + meilleur tour |
| 5ᵉ ou moins | Verstappen peut passer devant |
Pour Piastri, c’est plus simple et plus compliqué à la fois : il doit gagner la course + meilleur tour et espérer que Norris soit hors du top 4. Autant dire qu’il a besoin d’un miracle, mais en F1, les miracles arrivent parfois.
Pourquoi cette finale est historique à plus d’un titre
Au-delà du suspense sportif, il y a tout le contexte. McLaren peut remporter son premier titre pilotes depuis Lewis Hamilton en 2008. Red Bull risque de perdre sa couronne après quatre années de domination. Et on a trois pilotes d’à peine 27 ans maximum qui se battent pour la gloire éternelle.
Personnellement, ce qui me fascine le plus, c’est qu’on a trois styles totalement différents :
- Norris, le talent pur qui a mis du temps à transformer l’essai
- Piastri, le rookie surdoué qui explose dès sa deuxième saison complète
- Verstappen, le prédateur expérimenté qui refuse de céder sa place
C’est presque shakespearien.
Le circuit de Yas Marina, juge de paix parfait ?
Abou Dhabi, c’est un peu le circuit qu’on adore détester. Trop clinique, trop prévisible, disent certains. Mais cette année, il pourrait offrir l’une des courses les plus mémorables de l’histoire récente.
Les longues lignes droites favorisent les dépassements en DRS. Les virages lents demandent une traction parfaite – l’un des points forts de la McLaren actuelle. Et la course se termine au crépuscule, avec la piste qui refroidit et les pneus qui évoluent… Tous les ingrédients sont là pour du grand spectacle.
Mon pronostic (et pourquoi il ne vaut peut-être rien)
Si vous me forcez à choisir, je vois Norris champion. La voiture est trop supérieure et il a trop progressé mentalement cette saison. Mais je ne serais pas choqué du tout de voir Verstappen réaliser un énième exploit ou Piastri créer la surprise la plus totale.
Ce qui est sûr, c’est que dimanche soir, l’un des trois vivra le plus beau moment de sa carrière. Et les deux autres auront des regrets pour le reste de leur vie.
Alors rendez-vous dimanche à 17h heure française. Et préparez les calmants. Parce que cette finale risque de nous rendre tous complètement fous.
(Article écrit à J-1 du Grand Prix. Les positions et points mentionnés sont ceux au soir du GP du Qatar 2025)
