Quand une équipe disparaît brutalement, c’est tout un petit monde qui vacille. Coureurs, staff, sponsors… tout le monde se retrouve à la rue du jour au lendemain. Florian Sénéchal a vécu ça cet automne, et franchement, on s’est tous dit qu’à 32 ans, avec un palmarès déjà solide, il méritait mieux qu’une fin de carrière en eau de boudin. Et puis, patatras, l’annonce tombe : il signe chez Alpecin-Premier Tech. Autrement dit, il passe du statut de leader en perdant à celui de lieutenant de luxe chez l’une des toutes meilleures formations du WorldTour. Plutôt une sacrée revanche, non ?
Un retour aux sources qui a du sens
Revenons un peu en arrière. Florian, c’est un pur produit du Nord. Cambrai, les pavés dans l’âme, le genre de gars qui a grandi en regardant Paris-Roubaix à la télé avant d’aller s’entraîner sous la pluie battante. Sa carrière, il l’a construite étape par étape. D’abord chez Cofidis en stagiaire, puis six ans chez Quick-Step, l’usine à gagner belge par excellence. Là-bas, il apprend le métier : protéger les leaders, placer les sprinteurs, se sacrifier sur les classiques. Il devient un rouleur précieux, du genre qu’on ne remarque que quand il n’est pas là.
En 2022, il touche le Graal : champion de France sur route. Une victoire magnifique, en solitaire, sous le maillot Arkéa. À ce moment-là, on se dit que le meilleur est à venir. Et puis… plus rien. L’équipe bretonne végète, les résultats ne suivent plus, et cet automne, c’est la douche froide : cessation d’activité. Florian se retrouve sans contrat à quelques semaines du mercato. Dur.
Pourquoi Alpecin était la destination rêvée (même s’il ne le savait pas encore)
Alpecin-Premier Tech, c’est l’équipe qui fait peur à tout le monde sur les classiques flandriennes ces dernières années. Mathieu van der Poel, triple vainqueur de Roubaix, champion du monde, capable de tout. Jasper Philipsen, le sprinteur le plus rapide du peloton quand il est bien emmené. Et derrière, un train ultra-rodé, une organisation millimétrée. Mais il manquait un truc : un gros moteur français, spécialiste des pavés, capable de tenir 250 km à bloc.
Entrée en scène : Florian Sénéchal. Il connaît déjà la maison belge pour y avoir roulé six ans. Il connaît les frères Roodhooft, il parle la même langue (au sens propre comme au figuré). Et surtout, il apporte exactement ce qui manquait : de l’expérience sur les secteurs pavés du Nord, une pointe de vitesse intéressante et une capacité à endurer la souffrance comme peu de coureurs savent le faire.
« Rejoindre cette équipe, c’est un rêve qui devient réalité. Pouvoir rouler aux côtés de Mathieu et Jasper, sur les courses que j’ai toujours aimées… je n’aurais pas pu espérer mieux. »
On imagine facilement Florian dire ça avec le sourire
Un rôle sur mesure : poisson-pilote ou joker caché ?
On va être honnête : sur le papier, il arrive pour bosser. Protéger Van der Poel sur le Tour des Flandres, emmener Philipsen au sprint sur le Tour, fermer les coups sur Roubaix. Classique. Mais j’ai comme l’impression qu’on sous-estime un peu le bonhomme.
Parce que Florian, à 32 ans, est au top physiquement. Il l’a prouvé cette année malgré le marasme d’Arkéa. Et surtout, il a déjà gagné seul : le Grand Prix de Denain, le Samyn, le championnat de France… Ce n’est pas un simple gregario. C’est un coureur capable de saisir sa chance quand elle se présente.
Imaginez un scénario : Van der Poel crève à 80 km de l’arrivée sur Roubaix, Philipsen est distancé. Qui prend les commandes ? Sénéchal. Et là, avec sa connaissance parfaite du parcours (il habite à 30 km de l’arrivée !), il peut très bien aller chercher un top 5, voire mieux. Les frères Roodhooft ne sont pas idiots : ils recrutent un lieutenant, mais aussi un plan B crédible.
- Protection de Van der Poel dans le final des classiques
- Placement de Philipsen dans les sprints massif
- Prise de relais sur les secteurs pavés quand ça tape fort
- Option de victoire si les leaders sont en difficulté
- Expérience française dans une équipe très internationale
Premier Tech : le partenaire titre et nouveau souffle
Petit aparté sur le naming. L’équipe change de nom en 2026 : exit Deceuninck, bienvenue Premier Tech comme co-partenaire titre. Le groupe canadien, qui était chez Israel ces dernières années, a décidé de se rapprocher d’une structure plus stable et moins… polémique. Trois ans de contrat, avec option pour trois de plus. Ça sent l’ambition longue durée.
Et ça tombe bien, parce que l’équipe Alpecin a prouvé qu’elle savait gérer un budget conséquent tout en gardant une culture de performance incroyable. On n’est plus dans l’époque où les sponsors venaient et partaient au gré des résultats. Là, on sent une vraie volonté de construire quelque chose de durable.
Ce que ça change pour les classiques 2026
Soyons clairs : avec Sénéchal dans les rangs, Alpecin devient encore plus effrayante sur les pavés. Déjà que Van der Poel peut attaquer de loin, maintenant il aura un gars capable de le suivre sur 30 km si besoin. Et quand Philipsen aura besoin d’être placé à 300 mètres de la ligne, il y aura un Français costaud pour fermer la porte aux autres trains.
Les adversaires ? Visma-Lease a Bike reste ultra-forte, Lidl-Trek a recruté Turgis, UAE a Laporte et Politt… Mais franchement, sur un jour sans, je ne vois pas qui peut battre une équipe qui aligne Van der Poel, Philipsen, Sénéchal, Kragh Andersen et Vermeersch dans le même final. C’est presque injuste.
Et pour Florian dans tout ça ?
Personnellement, je trouve que c’est le plus beau rebond possible. À 32 ans, beaucoup auraient signé dans une équipe continentale pour assurer une fin de carrière tranquille. Lui, il choisit le très haut niveau, les plus grandes courses, les objectifs majeurs. Et il retrouve la Belgique, ce pays qui l’a fait grandir sportivement.
On l’imagine déjà, en avril prochain, dans le final d’un Tour des Flandres pluvieux, en train de fermer un coup dangereux avant de replacer Van der Poel pour l’attaque décisive. Ou sur le vélodrome de Roubaix, levant les bras avec ses coéquipiers après une nouvelle démonstration.
Parce qu’au fond, c’est ça le cyclisme : des carrières qui semblent finies et qui repartent de plus belle. Des gars qui refusent de baisser les bras. Florian Sénéchal n’a pas choisi la facilité. Il a choisi l’excellence. Et ça, ça force le respect.
Alors oui, 2026 s’annonce passionnant sur les pavés. Et quelque part, on a tous hâte de voir ce Nordiste porter ce nouveau maillot et montrer que, même après la tempête, on peut encore briller plus fort qu’avant.
