Il y a des soirs où même les séries les plus folles prennent fin. Hier, à Rotterdam, l’équipe de France féminine de handball a vécu ça : une première défaite dans ce Mondial 2025, 23-26 contre les Pays-Bas, devant une salle bouillante et enfin remplie. Finie l’invincibilité qui durait depuis… 36 matchs de phase de groupes dans les grandes compétitions. Autant dire une éternité.
Et maintenant ? Un quart de finale mercredi contre le Danemark qui sent la poudre. Parce que oui, le petit matelas confortable que représentait ce « joker » en cas de faux pas vient de partir en fumée. On passe directement en mode survie.
Un vrai test, enfin
Jusqu’à présent, les Bleues avançaient tranquillement, presque en roue libre. Des victoires solides, parfois larges, mais toujours contre des équipes d’un calibre inférieur. Les Pays-Bas, co-organisateurs et invaincus comme nous, c’était autre chose. Un révélateur. Et le miroir n’a pas été tendre.
Dès les premières minutes, ça sentait le roussi : 1-5 à la 6e, 2-7 à la 11e. Un départ canon des Orange qui a mis tout le monde d’accord. On a senti une équipe de France surprise par l’intensité, par la rugosité de la défense adverse et par une Yara Ten Holte en état de grâce dans les cages néerlandaises (14 arrêts à 40 %).
Heureusement, Hatadou Sako a répondu présente. 15 arrêts à 42 %, dont 11 en première période. Sans elle, l’addition aurait été bien plus salée. La gardienne de Győr a clairement pris la place de numéro 1 laissée vacante par la blessure de Laura Glauser. Et franchement, elle le mérite.
« On avait un joker, on l’a grillé. Ça fait partie de l’apprentissage. »
Sébastien Gardillou, sélectionneur
Le secteur pivot étouffé comme jamais
On savait que les Pays-Bas allaient cibler le point fort des Bleues : la ligne des pivots. Pauletta Foppa, Océane Ondono et Sarah Bouktit nous avaient régalés depuis le tour précédent. Là ? Quatre petits buts à eux trois, dont trois penalties de Bouktit. Autant dire rien.
Les Néerlandaises ont mis un vrai bouchon au cercle. Conséquence : les arrières françaises se sont retrouvées à tirer de loin, souvent dans les bras ou les gants de Ten Holte. Et quand ce n’était pas le cas, c’était à côté ou sur le poteau. 17 balles perdues en tout. Ça fait beaucoup trop à ce niveau.
Les tireuses en souffrance, encore et toujours
Le problème récurrent des Bleues face aux grandes gardiennes est réapparu. On ailières et arrières ont globalement vendangé. À l’exception notable de la capitaine Tamara Horacek (7/9, la patronne) et dans une moindre mesure Clarisse Mairot qui découvre la compétition, le reste a peiné.
Marie-Hélène Sajka à droite ? 0 but pour sa première cape. Léna Grandveau dans un soir sans. Orlane Kanor, pourtant la plus expérimentée avec 6 buts en 4 matchs avant hier, a fini à 0/4. Dur.
Alors oui, on a tenté des choses. Une défense 1-5 avancée sur les gauchères néerlandaises avec Foppa ou Kanor en pointe. Ça a limité la casse sur certaines séquences, mais pas assez pour renverser la vapeur.
Le Danemark, ce vieux fantôme
Conséquence directe de cette défaite : on retrouve en quart celles qui nous avaient sorties en demi-finale de l’Euro 2024 (22-24). Le Danemark. Un adversaire que les Bleues connaissent par cœur et qui leur réussit rarement ces dernières années.
L’avantage ? Le Danemark a aussi beaucoup changé depuis l’an dernier. Nouveau coach, nouvelles joueuses. Mais l’ossature reste costaude et l’envie de revanche sera des deux côtés. Tamara Horacek le disait d’ailleurs très justement : « Je suis piquée, mais je n’ai pas envie de tout ramener à la revanche. C’est une autre compétition. »
Traduction : on va jouer, on va se battre, et on verra qui a le plus faim.
Les points positifs à garder absolument
- Hatadou Sako est bel et bien la patronne des cages désormais
- La défense reste globalement solide quand elle est en a l’occasion
- Tamara Horacek montre l’exemple dans les moments difficiles
- L’état d’esprit semble bon : personne ne s’est effondré après la défaite
Ce qu’il va falloir corriger d’urgence
- Retrouver de l’efficacité à 6 mètres et sur les ailes
- Réduire drastiquement les pertes de balle (17, c’est énorme)
- Trouver des solutions quand le pivot est neutralisé
- Être plus agressives dès le coup d’envoi, pas après 10 minutes
Parce que face au Danemark, il n’y aura pas de seconde chance. Un quart de finale, c’est déjà le couperet. En cas de victoire, deux matchs pour une médaille restent possibles. En cas de défaite… rideau.
Personnellement, j’ai du mal à imaginer cette génération rentrer bredouille. Elles ont trop de caractère, trop d’expérience collective malgré les absentes de poids (Glauser, Zaadi forfait tardif, etc.). Mais le handball est cruel : une mauvaise soirée et tout s’arrête.
Mercredi, il faudra être prêtes dès la première seconde. Pas de round d’observation, pas de mise en route diesel. Juste trente minutes de guerre chacune des deux mi-temps.
Allez les Bleues. On y croit encore.
P.S. : Si vous avez vu le match, dites-moi dans les commentaires ce qui vous a le plus marqué. Moi, c’est cette impression que les Néerlandaises nous ont lu comme un livre ouvert pendant vingt minutes. Flippant, mais formateur.
