Vous vous souvenez de l’été 2024 ? Ce moment où tout le foot français a retenu son souffle en voyant les Girondins de Bordeaux plonger en National 2 après des années de galère financière. Beaucoup pensaient que le club au scapulaire allait doucement s’éteindre loin des projecteurs. Et pourtant, un an et demi plus tard, voilà que les Marine et Blanc s’invitent… sur la plateforme qui diffuse la Ligue 1. Oui, vous avez bien lu. À partir de ce samedi, les matchs à domicile de Bordeaux seront visibles sur Ligue 1+. Dingue, non ?
Quand le National 2 devient (presque) Ligue 1
Franchement, quand j’ai vu l’info passer, j’ai d’abord cru à une blague. Un club de quatrième division diffusé avec les moyens d’un match de l’élite ? Cinq caméras au lieu de deux, un vrai car-régie, commentateurs dédiés… On parle là d’une production habituellement réservée à PSG-Monaco ou Marseille-Lyon. Et pourtant, c’est bien réel. Le premier rendez-vous ? Bordeaux – Dinan Léhon ce samedi à 18h au Matmut Atlantique. Autant dire que les supporters bretons risquent d’être un peu surpris en allumant leur appli.
Mais alors, comment on en est arrivé là ?
Un club toujours aussi populaire malgré la chute
La réponse est simple : les Girondins restent un géant endormi. Même en National 2, le club attire. La preuve avec les chiffres de la chaîne locale qui diffusait déjà les matchs : jusqu’à 70 000 spectateurs sur YouTube pour certains chocs. Soixante-dix mille. Laissez-moi vous dire que la plupart des clubs de Ligue 2 rêveraient d’une telle audience digitale.
Dans une région Nouvelle-Aquitaine où plus aucune équipe n’évolue en Ligue 1 depuis la relégation de Bordeaux, le vide est immense. Les gens ont toujours envie de foot de haut niveau, d’histoires, de maillots qui racontent quelque chose. Et Bordeaux, c’est six titres de champion, quatre Coupes de France, une finale de Coupe UEFA… Le scapulaire, ça pèse encore lourd dans le cœur des gens.
« Il y a évidemment un marché ici. Une grande région avec aucune équipe en Ligue 1, c’est une opportunité d’aller chercher de nouveaux abonnés. »
Une responsable de la chaîne locale partenaire
Et elle a raison. Parce que derrière cette décision, il y a clairement une stratégie froide et calculée.
Ligue 1+ a flairé le bon coup
La plateforme qui détient les droits de la Ligue 1 jusqu’en 2029 cherche à grossir. Et vite. Dans un marché du streaming ultra concurrentiel, chaque abonné compte. Alors quand tu vois qu’un club historique, même en quatrième division, fait encore 50 à 70 000 vues par match sur une simple chaîne régionale, tu te dis qu’il y a quelque chose à gratter.
Ajoutez à ça le fait que le président de la structure est un ancien propriétaire du club (oui, je parle de Nicolas de Tavernost, même si officiellement ce n’est « pas la raison »). Disons simplement que ça aide à ouvrir des portes. Mais le dirigeant bordelais le dit lui-même : ce n’est pas du sentimental. C’est du business pur.
- Audience régionale déjà très forte
- Absence totale de club de l’élite dans tout le Sud-Ouest
- Base de supporters nostalgiques prête à payer pour revoir son club en bonne qualité
- Image positive : on « sauve » un grand club en détresse
Le calcul est limpide. En offrant une production premium à Bordeaux, la plateforme transforme un contenu « amateur » en produit presque premium. Et ça coûte quoi ? Quelques caméras supplémentaires et un car-régie. Peanuts comparé au gain potentiel en abonnements.
Un précédent ? Pas vraiment
Dans l’histoire du foot français, on a déjà vu des clubs historiques en divisions inférieures bénéficier d’une petite exposition. Je pense à Saint-Étienne ou Lens à certaines époques. Mais jamais avec une telle qualité de diffusion comparable à la Ligue 1. Là, on entre dans une autre dimension.
On pourrait presque parler de cas d’école. Une plateforme qui utilise le prestige passé d’un club pour capter une audience régionale orpheline. C’est malin. Et ça pose une question : est-ce que d’autres clubs mythiques en galère (Red Star, Sedan, Le Mans…) pourraient bénéficier du même traitement un jour ? J’ai tendance à penser que oui, si les chiffres suivent.
Ce que ça change pour les supporters
Concrètement, pour vous qui suivez les Girondins depuis des années, c’est Noël avant l’heure. Fini les streams un peu pourris avec deux caméras fixes et du son moyen. Là, on parle ralenti, replays, interviews d’après-match de qualité, statistiques en direct… Tout l’attirail.
Et surtout, une visibilité nationale, voire internationale. Car oui, Ligue 1+ est disponible dans de nombreux pays. Un supporter bordelais expatrié à Tokyo ou Montréal pourra revoir son club préféré dans des conditions royales. C’est énorme.
« On reste en 4e division mais la résonance médiatique est nationale, voire internationale. En N2, c’est exceptionnel. »
Arnaud De Carli, vice-président des Girondins
Et il n’exagère pas. Parce qu’en National 2, habituellement, tu as le droit à une caméra GoPro et un mec qui commente tout seul dans sa chambre. Là, c’est autre chose.
Et le foot amateur dans tout ça ?
Attention, il y a un revers à la médaille. Certains puristes du foot amateur vont grincer des dents. Parce que ce traitement de faveur pour Bordeaux risque de creuser encore plus l’écart entre les « gros » clubs historiques et les petits clubs anonymes de N2.
Quand tu joues contre Bordeaux, tu passes à la télé nationale. Quand tu joues contre Bourges ou Romorantin, tu restes dans l’ombre. Est-ce que c’est juste ? Non. Est-ce que c’est la réalité du foot business ? Clairement oui.
Mais soyons honnêtes : si demain le FC Rouen ou le GOAL FC fait 60 000 vues par match, ils auront probablement le même traitement. Le foot pro, même en bas, reste un spectacle. Et le spectacle, ça se monétise.
Vers une remontada médiatique avant la remontada sportive ?
Au-delà de l’aspect purement business, il y a un vrai enjeu d’image pour les Girondins. Être diffusé comme un club de Ligue 1, ça redonne de la fierté. Aux joueurs, au staff, aux supporters. Ça peut créer une dynamique.
Parce que rappelons-le : Bordeaux est leader de sa poule de National 2 avec une équipe jeune et ambitieuse. La remontada sportive est en marche. Et cette exposition médiatique arrive au meilleur moment pour maintenir la flamme.
J’ai presque envie de dire que c’est un cercle vertueux : plus de visibilité → plus de visibilité → plus d’envie de sponsors → plus de moyens pour remonter. Et ainsi de suite.
Alors oui, on est encore loin de la Ligue 1. Mais symboliquement, ce retour sur une plateforme nationale, c’est déjà une petite victoire. Un signe que le scapulaire brille encore, même dans l’obscurité de la quatrième division.
Et quelque part, c’est beau. Le foot, c’est aussi ça : des histoires de résilience, de passion qui ne meurent jamais vraiment. Bordeaux nous le rappelle. Et maintenant, le France entière va pouvoir le voir tous les quinze jours.
Alors rendez-vous samedi à 18h. Peu importe le score, une chose est sûre : le Matmut Atlantique va vibrer. Et cette fois, tout le pays regardera.
