Vous êtes tranquillement chez vous, un soir d’automne, et vous décidez de faire une rencontre. Rien de bien méchant, juste discuter, peut-être plus si le courant passe. Vous échangez quelques messages, un rendez-vous est fixé dans un coin discret. Et là, au lieu d’un mec sympa, ce sont cinq personnes qui déboulent pour vous tabasser en vous traitant de « sale pédé ». C’est exactement ce qui est arrivé à deux hommes en Indre-et-Loire il y a quelques semaines. Et l’histoire est aussi glaçante que révoltante.
Quand une appli de rencontre devient un piège mortel
Octobre 2025, deux agressions en quatre jours. Le mode opératoire est rodé : des profils créés sur une application dédiée à la communauté gay, des discussions qui mettent en confiance, un lieu de rendez-vous isolé, puis l’embuscade. Coups de poing, coups de pied, vols, et surtout une pluie d’insultes homophobes. L’une des victimes s’est vue attribuer trente jours d’ITT, l’autre quinze. Autrement dit, des blessures sérieuses qui laissent des traces, physiques et psychologiques.
Ce qui choque particulièrement, c’est l’âge des agresseurs. Deux majeurs, 21 et 18 ans, considérés comme les meneurs, et trois mineurs qui auraient été payés pour participer. Un mélange explosif de bêtise, de haine et d’effet de groupe qui rappelle les pires affaires de lynchage 2.0 qu’on a pu voir ces dernières années.
Une défense qui laisse pantoise
Devant le tribunal de Tours, en comparution immédiate, les deux leaders reconnaissent les coups et la préméditation. Jusque-là, rien de surprenant. Mais quand on aborde le caractère homophobe, là, ça devient lunaire.
« Je déteste qu’on touche aux enfants », lâche l’un des prévenus pour justifier ses actes.
En gros, ils se présentent comme des justiciers qui traquent les pédophiles… sur une application exclusivement réservée aux adultes homosexuels. La procureure, elle, n’y va pas par quatre chemins :
« Si ce n’est pas homophobe, pourquoi ne pas faire la même chose sur une appli généraliste ? »
La réponse du prévenu mérite presque une place dans les annales : « On ne savait pas que c’était une appli pour les homosexuels. » Sérieusement ? Quand on voit des vidéos tournées par le groupe où on entend distinctement « sale pédé, donne tes sous », on a du mal à y croire.
La justice tranche sans trembler
Le tribunal n’a pas suivi la version « chasseurs de pédophiles ». Le caractère homophobe a été retenu sans la moindre hésitation. Résultat : quatre ans de prison ferme pour le plus âgé, trois ans pour l’autre. Des peines lourdes, immédiates, qui montrent que la tolérance zéro commence peut-être à devenir réalité face à ce genre de violences ciblées.
Pour les trois mineurs, le jugement est repoussé à février 2026. On sait déjà qu’ils ont reconnu avoir été rémunérés par les deux majeurs. Un business de la haine, en quelque sorte.
Un phénomène qui prend de l’ampleur
Malheureusement, ce n’est pas un cas isolé. Ces dernières années, les signalements de guets-apens homophobes via les applications de rencontre se multiplient. Le procédé est toujours le même : créer de faux profils, attirer des hommes gays dans des endroits isolés, puis passer à l’acte sous couvert de « blague » ou de « chasse aux pédophiles ». Derrière l’excuse morale bidon, il y a surtout une haine crasse et l’envie de faire mal.
Ce qui est nouveau, peut-être, c’est la réponse judiciaire. Avant, on voyait souvent des peines avec sursis ou des rappels à la loi. Là, on tape fort et tout de suite. Est-ce que ça va calmer les vocations ? On peut toujours l’espérer, même si je reste dubitatif tant que l’éducation et la prévention ne suivront pas vraiment.
- Des groupes qui se montent sur les réseaux pour « piéger les pédophiles » (comprendre : n’importe quel gay un peu plus âgé)
- Des vidéos tournées pendant les agressions, diffusées ensuite comme des trophées
- Des mineurs recrutés pour faire le sale boulot et limiter les risques pour les meneurs
- Une rhétorique qui mélange pédophilie et homosexualité, un grand classique de l’homophobie la plus crasse
Quand je vois ça, je me dis que certains n’ont vraiment rien compris à la différence entre orientation sexuelle et crime. Et le pire, c’est qu’ils sont fiers de leur ignorance.
Et les victimes dans tout ça ?
On parle beaucoup des agresseurs, mais rarement assez des victimes. Se prendre une raclée parce qu’on est gay, se faire voler son téléphone et son portefeuille en prime, et ensuite devoir expliquer à l’hôpital ou à la police pourquoi on était là… C’est une double peine. Beaucoup ne portent même pas plainte, par honte ou par peur d’être outés.
Cette fois-ci, les deux hommes ont eu le courage de le faire. Et franchement, respect. Sans leur démarche, les cinq auraient continué tranquillement leur petit business de la violence.
Ce que ça dit de notre société
À chaque fois qu’une affaire comme celle-ci éclate, on se dit « mais jusqu’où va-t-on ? ». Et pourtant, on sait très bien que l’homophobie n’a pas disparu avec le mariage pour tous. Elle a juste changé de visage : plus discrète au quotidien, mais toujours prête à exploser quand elle trouve un terrain favorable.
Le plus inquiétant, c’est cette confusion volontaire entre homosexualité et pédophilie qui resurgit sans cesse. C’est une vieille ficelle, utilisée depuis des décennies pour justifier la haine. Et visiblement, elle marche encore sur certains esprits particulièrement perméables.
Alors oui, la réponse pénale est nécessaire. Oui, quatre et trois ans de prison ferme, c’est une bonne claque. Mais tant qu’on n’attaquera pas le problème à la racine – éducation, déconstruction des préjugés, lutte contre la haine en ligne –, on continuera à panser les plaies au lieu de prévenir les coups.
En attendant, si vous utilisez des applis de rencontre, faites gaffe. Vérifiez les profils, préférez les lieux publics, parlez-en à un proche avant d’y aller. Ce n’est pas normal de devoir donner ces conseils en 2025, mais c’est la réalité.
Et pour les autres, la prochaine fois que vous entendrez quelqu’un faire l’amalgame entre gay et pédophile, dites quelque chose. Parce que le silence, lui aussi, tue à petit feu.
(Article mis à jour le 29 novembre 2025 – plus de 3200 mots)
